Majoritairement, ces jeunes trouvent dans cette activité une occupation lucrative
ALORS que les pouvoirs publics continuent à exercer une pression sur les marchands illicites en milieu urbain et dans les lieux les plus fréquentés, ces derniers ont fini par trouver la parade.
Les abords des principales villes de la wilaya ont leur marché. Ainsi, la sortie Sud du chef-lieu de la wilaya sur la RN5 en direction d’El Esnam a fini par devenir un lieu de vente au grand dam des automobilistes et des usagers de ce tronçon routier qui longe l’autoroute. Même scène à l’Ouest sur la RN en direction de Aïn Bessem. Même si un espace a été réservé à l’activité, les accotements de la route sont occupés. Sur le même trajet et au niveau du village Saïd Abid, les abords sont occupés de la même manière. La décision d’éradiquer ces marchés illicites, prise en début de l’année dernière avait causé des émeutes et c’est peut-être la raison qui pousse les pouvoirs publics à laisser faire. Sur les bas-côtés des routes nationales, dans les quartiers à forte densité d’habitants, dans des véhicules et sillonnant les quartiers des villes, le nombre des marchands informels va crescendo en l’absence, pour l’heure, de mesures pour l’éradication de ces activités illicites qui portent un préjudice, tant à l’économie nationale, qu’aux usagers de ces axes routiers.
Qui sont ces marchands?
Majoritairement, ces jeunes trouvent dans cette activité une occupation lucrative, puisqu’ils n’ont aucun impôt ou charge à payer. Beaucoup ont abandonné les locaux proposés dans les enceintes, comme le marché couvert de Draâ El Bordj pour cause de loyer trop élevé, selon eux. D’autres refusent de rejoindre les locaux réalisés dans le cadre du programme présidentiel, parce que ces magasins sont situés dans des quartiers à faible présence de clients. Comme une traînée de poudre, le nombre augmente et l’espace se rétrécit. Le phénomène ne cesse de prendre de l’ampleur. Il demeure un véritable danger pour les usagers des routes nationales 5,8 et 26.
Les clients désireux de s’approvisionner au niveau de ces sites prennent des risques et mettent aussi en danger la vie d’autrui. Renvoyés de l’école dès leur jeune âge, ces commerçants justifient le recours à cette activité en évoquant le manque d’opportunités. L’obligation de gagner de quoi vivre est explicitement donnée par cette réponse d’un commerçant exerçant sur la RN 5. «Je suis chômeur, sans aucun diplôme et je travaille pour une famille entière. J’exerce cette activité pour survivre mes proches et moi.»
L’activité jusque-là exclusive aux grandes agglomérations tend à s’étendre et à gagner même les petits villages. L’exemple le plus en vue reste le village d’Ighrem où les abords en terre sont occupés par des jeunes qui proposent des légumes frais cueillis dans les jardins familiaux.
«Nous vivons de ça. Je produis et je vends mon produit sur le bord de la route, parce qu’il n’y a pas d’autre solution» confie un sexagénaire assis sur une pierre, et qui en plus des légumes propose aussi de l’huile d’olive. L’activité n’est donc pas exclusive aux jeunes mais touche toutes les catégories d’âge.
Sur le même axe routier qui traverse les communes de Bechloul, Adjiba, Thaourirth vers Bordj Bou Arréridj et Ahnif, Chorfa vers Béjaïa, l’image est la même. Les routes sont rétrécies par des étals posés sur les accotements. Les jeunes proposent, sur le bas-côté, des fruits et des légumes à des prix pourtant relativement très élevés, bravant même les fermes interdits des pouvoirs publics locaux.
Les locaux du président: un gaspillage
La décision d’octroyer en moyenne 100 locaux à chaque commune est, au regard de ce qui se passe, une décision à l’effet inverse. Des bâtisses ont été réalisées sans aucune étude préalable, sans une réflexion sur l’impact économique… on a construit pour faire plaisir au décideur. Aujourd’hui, l’ensemble, pour ne pas dire tout cet argent, est parti en fumée et les bâtisses vouées à un avenir incertain. Les locaux de Thiliouine à l’entrée de la daïra de Kadiria, ceux de la commune d’El Esnam, ceux d’Ath Mansour, de Bouira… pour ne citer que ces cas, sont tous à l’abandon, des lieux infestés par des dealers, des toxicomanes, et réservés à des beuveries. Malgré les mesures de facilitations accordées par l’Etat, les commerçants informels refusent toujours de s’installer dans ces locaux réalisés depuis plusieurs mois, et qui sont actuellement à l’abandon. L’inexistence de circuits bien huilés, de marchés de gros et de demi-gros, la disparition des commissions de contrôle des prix, la hausse anarchique des prix… sont autant de facteurs qui poussent à l’apparition de ces activités hautement rentables. Dans un entretien à l’APS, le directeur du commerce de la wilaya de Bouira, Goumri Ahmed, avait affirmé que ce phénomène est constaté «beaucoup plus aux abords des routes, en dehors des milieux urbains, tandis qu’au niveau des villes, il a été éradiqué après plusieurs interventions des forces de l’ordre». Il a, aussi, fait savoir que des travaux de réalisation de quatre marchés de proximité avaient été lancés depuis plusieurs mois dans les communes de Bechloul, Kadiria, Sour El Ghozlane et Bir Ghbalou. Destinés à offrir des prestations de proximité au profit des ménages, ces projets ont été dotés d’une enveloppe financière globale de 41 millions de dinars, mobilisée sur les budgets des plans communaux de développement de ces communes, a précisé le directeur. Avec ces nouvelles réalisations, la wilaya sera dotée d’un total de 14 marchés de proximité, dont sept ont été concrétisés durant ces trois dernières années au profit de la commune de Bouira (trois marchés) et de celles de Sour El-Ghozlane, Aïn Bessem, Lakhdaria et M’chedallah.
«Ces espaces commerciaux viennent à point nommé pour débarrasser les villes des marchés informels, qui enlaidissent l’environnement et sont aussi sources de désordre et d’atteinte à l’environnement», a fait remarquer le même responsable.