L’idée fait son chemin : Des tribunaux spéciaux pour la sécurité routière ?

L’idée fait son chemin : Des tribunaux spéciaux pour la sécurité routière ?

A titre de membres de la société civile inquiets des pertes humaines et matérielles sur les routes du pays, maître Fatma-Zohra Benbraham et le docteur Smaïl Boulbina ont animé au forum d’El Moudjahid une conférence durant laquelle ils ont fait des propositions visant à amoindrir l’hécatombe que subit le pays quotidiennement sur les routes.

Intervenant le premier, le docteur Boulbina préconise, dans la liste de ses recommandations, le retour des tribunaux de simple police qui existaient par le passé en Algérie. Ces tribunaux jugeaient les infractions routières et autres petits délits commis par les citoyens. Ces tribunaux de simple police, dirigés par des magistrats qualifiés, n’infligeaient que des amendes.

Maître Benbraham est allée loin dans cette revendication. Pour elle, il est urgent d’installer des tribunaux spéciaux concernant les crimes, les délits ou les infractions commis sur les routes «puisque c’est une recommandation du président de la République, pourquoi ne pas installer des tribunaux spéciaux pour désengorger les tribunaux normaux et redonner à la justice le rang qui devrait être le sien en matière de répression de la délinquance routière ? Par ailleurs, je m’étonne que les magistrats qui jugent les automobilistes en infraction ne proposent pas à ces derniers d’effectuer des travaux d’intérêt général», dira-t-elle, estimant que les travaux d’intérêt général sont un moyen de dissuasion.

5 mesures appliquées, c’est moins 50% d’accidents

Boulbina s’indigne du fait qu’on ne refait les routes qu’à l’occasion d’une visite présidentielle ou ministérielle. Cependant, il reste optimiste et il est fermement persuadé que si les pouvoirs publics appliquent cinq recommandations qu’il conseille, en une année, les accidents de la route diminueront de 50%.

Intervenant en présence d’une députée, du délégué général du Centre national de prévention et de la sécurité routière (CNPSR), Ahmed Naït El Hocine, des officiers supérieurs de l’ANP, de la Gendarmerie nationale, des douanes et des représentants de divers ministères, le conférencier a listé ses recommandations. Sur les routes, il propose la séparation des deux sens notamment au sommet de certaines côtes, l’interdiction d’attribution de lignes de transport de voyageurs de plus de 700 kilomètres particulièrement pour les privés «car ils ne respectent pas la période de repos des conducteurs. Ce n’est pas le cas des sociétés de transport de l’Etat».

S’agissant des conducteurs professionnels, il propose l’instauration d’un ordre de mission uniforme facilitant aux agents de l’ordre la possibilité de contrôle de la circulation des véhicules. Il estime, par ailleurs, que l’Algérie ne devrait autoriser à vendre des véhicules que les marques qui assument leurs responsabilités sur la qualité et la sécurité des véhicules qu’elles produisent.

Boulbina a également énuméré d’autres recommandations tout aussi intéressantes et pouvant sécuriser davantage les routes. Mais l’important pour lui, c’est de s’interroger pour savoir qui est responsable et qui est coupable dans cette tuerie quotidienne. Il cite les politiques, les élus, les administrateurs, les entrepreneurs, les automobilistes, les piétons et les magistrats. Il n’a, en outre, pas ménagé les agents de l’ordre, policiers ou gendarmes, qui ne respectent pas le code de la route. «Ils ne mettent même pas la ceinture de sécurité et ils font de la vitesse pour rien, exposant les citoyens aux risques. Ils donnent un mauvais exemple aux simples citoyens», déplore-t-il.

Les APC sur le banc des accusés

De son côté, maître Benbraham a fustigé les communes qui n’entretiennent pas leur patrimoine routier. «Elles violent les lois du pays et causent des drames.» Pour preuve, elle cite le cas de l’entretien des avaloirs jamais faits et l’occupation des trottoirs par des commerçants alors que ces espaces sont réservés normalement à la circulation piétonne. «Je m’étonne que les citoyens victimes de dommages que causent les négligences des municipalités n’attaquent pas ces institutions en justice. Une fois qu’on leur aura vidé leurs caisses en dommages et intérêts, les maires s’apercevront des problèmes qu’ils créent à leurs administrés.» Elle n’a pas, non plus, épargné les wilayas pour leur négligence s’agissant de l’entretien des chemins de wilaya (CW). «La route crée l’économie et cette économie entretient la route», souligne-t-elle.

Abachi L.