Le FLN argue que les électeurs qui donnent le mandat à un élu sont les seuls habilités à le déchoir de cette qualité. Est-ce vrai?
Les débats qui ont eu lieu à l’APN les 4 et 5 octobre en cours sur la loi électorale ont laissé apparaître au grand jour les divergences entre le FLN et le RND. Deux articles divisent ces deux partis de l’Alliance présidentielle. Il s’agit de l’article 67 qui traite du nomadisme politique et de l’article 93 qui a trait à la démission des ministres trois mois avant les législatives pour ceux qui désirent se porter candidat.
Le FLN a tout fait pour inciter la commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l’APN à supprimer le premier article et amender le second. Ce qui fut fait. Dans le cadre des débats, tous les intervenants du FLN ont salué la démarche tandis que ceux du RND ont dénoncé un acte qui vise à saborder les réformes politiques. Selon une source bien informée, les manoeuvres du FLN ont commencé en plein dernier Conseil des ministres, le 11 septembre dernier. Belkahdem, secrétaire général du FLN, aurait voulu, sans insister, faire changer d’avis au chef de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika, en lui faisant remarquer que l’article sur la démission des ministres n’a pas été débattu. Et à Bouteflika, surpris, de souligner que le projet de loi a été adopté par le Conseil des ministres et que le dossier était clos. Belkhadem aurait alors menacé, sans plus, de bloquer l’article à l’APN. En ce moment, ajoute notre source, le chef de l’Etat s’est tourné vers le secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia, pour avoir son avis. Ouyahia ayant exprimé l’accord de son parti sur l’article, Bouteflika aurait demandé alors de passer à l’ordre du jour.
C’est cela qui explique, selon toujours notre source, l’acharnement du FLN à amender cet article.
A travers cet acte, le FLN a réussi à se mettre à dos tous les partis siégeant à l’APN, y compris ceux de l’Alliance présidentielle. Le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, a précisé ce 5 octobre, que c’est le chef de l’Etat, lui-même, qui a demandé d’inclure les deux articles dans le cadre de la loi électorale. Le ministre a souligné, sans le nommer, que l’article 93 traduit la proposition d’un parti lors des consultations sur les réformes politiques. Il s’agit, en fait, du président du Mouvement national de l’espérance (MNE), Mohamed Hadef. Ce dernier a estimé que toute modification de cet article serait une tentative de faire avorter les réformes politiques.
Les faux arguments du FLN
Pour le FLN, parti majoritaire au gouvernement, la démission des ministres trois mois avant les législatives, serait synonyme de la perte de tous les atouts. Une telle mesure signifie que les candidats du FLN partent à chances égales avec leurs concurrents, ce qui n’arrange guère les affaires du parti de Belkhadem. Les acteurs politiques, à part le FLN, demandent, en effet, l’égalité des chances. Or, un candidat qui est également ministre, a plus de chance qu’un candidat ordinaire. C’est pourquoi le FLN manoeuvre dans tous les sens pour amender cette disposition. Au demeurant, il a réussi à réduire le délai à 45 jours tout en demandant le gel (un congé) des activités et non la démission. Mais l’amendement du FLN a de fortes chances de ne pas aboutir, du fait qu’il est le seul à défendre la disposition. Concernant l’article sur le nomadisme politique, celui-ci oblige l’élu à ne pas changer de casquette politique durant son mandat, sous peine de se voir déchu. Une disposition qui n’arrange pas le FLN. Normal, disent les observateurs, expliquant que la majorité des élus qui changent de parti rejoignent le FLN pour jouir des privilèges. L’ex-parti unique argue que c’est le peuple qui donne le mandat à l’élu et c’est à lui de le lui enlever. Selon ce raisonnement, un parti ne pourrait obliger un élu à lui rester fidèle. Or, ce que le FLN n’ignore pas, le peuple donne le mandat à un parti, représenté par une liste électorale. Cette liste porte le projet de société du parti. Donc, à partir de leurs convictions, les électeurs choissent la liste qui reflète le mieux leurs aspirations. Changer de parti pour un élu, c’est changer de projet. Or l’électeur a voté pour le projet et non pour la personne. C’est la règle de toute élection. Ceci justifiant cela, le changement de couleur politique de l’élu signifie-t-il le changement d’opinion de l’électeur? Un député qui représente les citoyens qui l’ont mandaté pour défendre un projet de société donné peut-il ou a-t-il le droit de finir son mandat à défendre le contraire?
Les analystes expliquent, en outre, que le changement de parti pour les élus remet en cause les résultats des élections. Est-il admissible qu’un parti qui a raflé 50 sièges à l’APN finisse son mandat avec 30 députés et celui qui en a 30 finisse à 50 députés?