Vingt et un Egyptiens ont été condamnés à mort ce matin dans le procès des violences ayant suivi un match de football l’an dernier à Port-Saïd (nord-est).
Après le verdict, huit personnes ont été tuées par balle dont deux policiers à Port-Saïd, selon un bilan provisoire, alors que des proches des condamnés à mort tentaient d’envahir la prison où ces derniers sont détenus, selon la télévision d’Etat et des témoins. Des hommes non identifiés ont en outre tiré à l’arme automatique sur la police qui a répondu par du gaz lacrymogène, ont dit les témoins. Des blindés ont aussi été déployés et des affrontements avaient lieu dans les rues autour de la prison.
Devant le tribunal, un homme ayant perdu son fils dans les violences pleurait de joie. «Je suis satisfait du verdict», a-t-il dit à l’AFP. En février 2012, 74 personnes étaient mortes à Port-Saïd après un match entre le club cairote d’Al-Ahly et une équipe locale, Al-Masry. Plus de 70 personnes, dont neuf policiers, étaient jugées pour leur responsabilité présumée dans ces violences. «Soit justice leur est rendue, soit nous mourrons comme eux!», avaient mis en garde au tribunal des membres des familles des victimes en brandissant des photos de leurs proches. Des centaines d’ «Ultras» d’Al-Ahly, des supporters fervents et organisés qui revendiquent la majorité des victimes, s’étaient rassemblés tôt samedi devant leur club au Caire, agitant des drapeaux.
Hier au moins sept personnes ont été tuées dans des affrontements entre manifestants hostiles au pouvoir islamiste et forces de l’ordre, alors que le pays marquait le deuxième anniversaire du «Jour de la Révolution».

«On n’a pas fait la révolution pour qu’un groupe corrompu en remplace un autre», lançait une manifestante, Maha Kamal, 40 ans. «L’Egypte a besoin d’une nouvelle révolution pour les jeunes et pour une vraie démocratie», affirmait un autre manifestant, Chawki Ahmed, 65 ans.
En outre, plus de 450 personnes ont été blessées au total dans douze gouvernorats, selon le ministère de la Santé, qui n’a pas donné de décompte entre manifestants et policiers. L’armée a déployé dans la soirée des hommes et des blindés légers pour protéger les bâtiments de la police et du gouvernorat local à Suez, à l’entrée sud du canal du même nom et théâtre des plus fortes violences, ont indiqué des témoins et des sources de sécurité. Des manifestants se sont aussi rendus près du palais présidentiel, où la police a tenté de les disperser avec du gaz lacrymogène. A Ismaïliya (nord-est), des manifestants ont mis le feu au siège local du Parti de la liberté et de la justice (PLJ), la formation politique des Frères musulmans, et envahi le siège du gouvernorat. Des bâtiments publics ont également été la cible des contestataires à Damiette (nord) et Kafr el-Cheikh (delta du Nil), et des incidents ont aussi eu lieu à Alexandrie, deuxième ville du pays. En fin de soirée la place Tahrir était toutefois largement désertée en raison de la densité des tirs de lacrymogènes.
Dans la nuit, le président Mohamed Morsi a appelé ses compatriotes à «rejeter la violence dans les paroles et dans les actes» et a promis que les responsables de ces heurts meurtriers seraient «traduits en justice», dans des messages postés sur ses comptes Twitter et Facebook. Ce regain de tension dans la crise opposant le président islamiste Mohamed Morsi qui se prévaut d’avoir été démocratiquement élu en juin dernier, et l’opposition qui l’accuse de dérive autoritaire, est aggravé par les lourdes difficultés économiques que traverse le pays. Des accrochages sporadiques entre groupes de jeunes et forces de l’ordre ont eu lieu toute la journée aux abords de la place Tahrir où des milliers de personnes se sont massées.
Une énorme pancarte était déployée sur la place avec l’inscription : «Le peuple veut faire tomber le régime», tandis que la foule scandait «dégage, dégage!» à l’encontre de M. Morsi, comme elle l’avait fait pour M. Moubarak il y a deux ans. L’opposition, composée de mouvements en majorité de gauche et libéraux et qui affiche une unité encore précaire, avait appelé à défiler en reprenant les mêmes mots d’ordre qu’il y a deux ans : «Pain, liberté, justice sociale».
R. I. /AFP