Algérie : Mais qui est donc Yacine Zaid ?

Algérie : Mais qui est donc Yacine Zaid ?

Mais qui est donc ce Yacine Zaid ? D’où sort-il ? Quel est son passé ? Son histoire ? Qui est ce turbulent militant qu’il faut mettre en prison à tout prix ? Beaucoup de gens, sur les réseaux sociaux mais également dans la vie réelle, éprouvent une sympathie naturelle pour ce courageux militant et se sentent solidaire mais peu le connaissent.

Yacine est un enfant du peuple. Un enfant du pays profond. Né à Laghouat, il a grandit à Sidi Belabes ou ses parents s’étaient installés. Après la mort de sa mère, alors qu’il n’est qu’un enfant, son père retourne à Laghouat ou il refait sa vie. Yacine grandit auprès de sa grand-mère à Sidi Belabes. D’un abord très sociable et sympathique, il passe sa jeunesse entre Hassi Messaoud, ou il travaille comme agent de sécurité, et les deux villes de ses racines. Après le décès de sa grand-mère, il s’installera définitivement à Laghouat. C’est un jeune qui aime sortir, s’amuser et tous ceux qui l’ont connu se souviennent de sa générosité. S’il ne s’intéresse pas à la vie politique, ni syndicale, il ne supporte pas l’injustice et surtout la « Haggra ». Il intervient régulièrement pour défendre, ici un travailleur lésé, là une famille dans le besoin, ce qui lui vaut, des problèmes avec les administrations et les employeurs. Jusqu’au jour, ou c’est lui même qui est victime du mépris et de la hoggra de son employeur à Hassi Messaoud. Licencié abusivement après de longues années de travail, Yacine décide de se battre. Et il le fera seul pendant un long moment. Il mènera son combat contre une multinationale. Ce qui lui coutera plus de trente procès intentés par la société qui le harcèlera devant les tribunaux pour le décourager. Yacine tiendra et remportera son combat. C’est durant ces années très dures, sans argent, sans même quelques fois de quoi manger, qu’il se rendra compte de l’absence de l »état algérien. A plusieurs reprises, m’a t-il raconté, il a sollicité la justice algérienne, les services de sécurité et les administrations pour leur expliquer le comportement «  colonial » des entreprises étrangères. Avec le temps, les décisions injustes de la justice algérienne et des administrations, il se rendra compte, de la complicité des dirigeants. Il comprendra que le patriotisme claironné dans les médias n’est qu’un slogan vide, destiné à la consommation de la population pour cacher, des trahisons, des vols, et exploiter les richesses des algériens. C’est durant ce long combat, presque solitaire, qu’il croisera la route de syndicalistes et de militants des droits de l’homme. « En fait, j’ai toujours été un syndicaliste et un militant, mais je ne le savais pas » m’a t-il confié, alors que nous étions sur la route entre Ouargla et Hassi Messaoud au mois de juin dernier. Cette même route, ou il a été arrêté. Ces rencontres, lui ouvriront les yeux et d’autres horizons. Il savait désormais qu’il n’était pas seul, que les femmes de ce pays avaient enfanté des hommes libres et dignes. Il a compris aussi, qu’à plusieurs, qu’en s’aidant les uns les autres, le combat devenait plus efficace, que des actions plus tranchantes étaient possibles. Fort de son expérience, il prendra sous sa coupe, de nombreux jeunes, partout à travers le pays, qu’il aidera, par ses conseils à s’organiser. Il créera la section de la ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme de Laghouat, dont il est le président. Il inaugurera un journalisme citoyen inconnu en Algérie. Yacine, sa caméra dans le sac, parcourt des centaines de kilomètres pour aller filmer des citoyens dans le besoin. Après l’un de ses reportages, une campagne de solidarité s’était créé et les dons avaient permis d’acheter un appartement à une famille. Je l’ai accompagné lors d’un reportage dans un coin isolé de la Mitidja. On avait rendu visite à une femme, dont le mari était décédé, qui dormait dehors avec ses trois enfants. Inutile de dire que le « dehors », c’est la forêt, à la lisière d’un hameau de quelques maisons, après quelques kilomètres d’une piste, elle même, relié à une petite route communale. Le bout du monde de la Mitidja. Autant dire, qu’il n’y avait aucun risque de croiser un journaliste dans le coin.

A peine avait-on terminé et qu’on reprenait la route, qu’il me parlait d’une autre famille, dans la wilaya de Tiaret, qu’il voulait absolument aller rencontrer. « Ils sont dans la même situation que cette famille. Je dois aller les voir, faire le reportage, le diffuser. Ça les aidera peut-être ».

Yahia Bounouar