Celle qui a été arrêté à la Casbah d’Alger en 1957 reste inébranlable et ne cessa de rappeler que « le colonialisme a spolié la terre, privé les Algériens des droits les plus élémentaires ».
La sénatrice Zohra Drif était, hier, l’invitée de « Rendez vous avec la parole », un espace de débats qu’organise le CCI. Parmi l’assistance, l’on remarquait au premier rang Mme Khalida Toumi et de nombreux cadres du secteur de la Culture. En prélude, un extrait du débat qui a lieu récemment au théâtre de la Criée de Marseille entre l’ancienne moudjahida et Bernard Henri Levy a été projeté. On y voit la militante de la Zone autonome d’Alger, rappelant sur un ton de pédagogue, la cruauté du colonialisme qui avait dénié, dira-t-elle, « aux Algériens la qualité d’êtres humains ». Ses propos ont constitué le fil du débat qui n’a pas débordé sur sa propre expérience militante ou des sujets complexes comme l’écriture de l’histoire. Celle qui a été arrêté à la Casbah d’Alger en 1957 reste inébranlable et ne cessa de rappeler que « le colonialisme a spolié la terre, privé les Algériens des droits les plus élémentaires ». « Je comprends la nouvelle génération qui peine à imaginer ce que ce système a été », clamera-t-elle. Elle a expliqué ensuite avoir répondu à l’invitation des organisateurs du colloque de Marseille pour contrer ce révisionnisme « qui a commencé à se faire jour depuis quelques années ». Selon elle, « un courant cherche à délégitimer le combat libérateur et au delà celui des peuples qui luttent pour leur dignité ». Evoquant l’Algérie actuelle, elle estimera que « des problèmes existent et doivent trouver des solutions entre nous. 50 ans n’étant rien dans la vie d’une nation ». A ce propos, elle déplore que « des Algériens débattent de problèmes internes à l’étranger ». Pour autant, « il n’y a aucune comparaison à faire entre l’Algérien de 1954 et celui de 2012 ». « Reconquérir sa terre, redevenir libre est en soi un grand pas ».
INTÉRÊTS ET LEURRE
Mme Drif a estimé « qu’il n’y avait aucune symétrie à établir entre ceux qui sont oppressé et ceux qui oppressent ». Elle défendra le recours aux bombes car « nous n’avions pas d’autres armes et la France n’a pas épargné les civils depuis 1830 ». Dans la salle, une femme rappellera que « les Français ont fait beaucoup de mal aux civils qu’ils ont tués par milliers ». Toutefois, un jeune qui semble ignorer l’histoire de son pays dira que « tous les juifs sont des sionistes », ignorant la place et le rôle d’hommes comme Curiel, Alleg et bien d’autres. Le débat s’est focalisé sur la figure controversée de BHL qualifié par Mme Drif de « prêcheur de la haine et d’homme qui dénature, manipule les débats qu’il soumet à ses propres obsessions » suite à sa dernière contribution parue dans Le Point et distribuée aux présents. Elle abordera évidemment les derniers événements au Sahel, avouant « qu’elle a peur pour notre pays, les manœuvres autour du Sahara remontants selon elle à la guerre de l’indépendance ».
Elle se montre catégorique. « Depuis l’invasion de l’Irak, le colonialisme cherche à se redéployer ». En filigrane, on devine une méfiance sinon une hostilité à l’égard du « printemps arabe ». « L’Occident, qui s’est accommodé de régimes qui arrangeaient ses affaires, n’a que des intérêts et sa prétendue défense de la démocratie est un leurre », a-t-elle affirmé.
R. Hammoudi