Comme d’habitude, Karim Ziani parle avec une extraordinaire spontanéité lorsqu’il s’adresse aux supporters algériens à travers Le Buteur et El Heddaf.
Le patron des Verts a parlé de sa nouvelle vie en Turquie, de la situation catastrophique de Wolfsburg et, naturellement, du derby du 27 mars entre l’Algérie et le Maroc. Contrairement aux Marocains, Ziani évite de faire dans la provocation, se contentant de réserver sa réponse sur le terrain. Entretien.
Tout d’abord, parlez-nous un peu de votre vie en Turquie. Vous êtes-vous habitué à ce pays ?
Je suis presque chez moi dans ce pays musulman, grâce notamment aux dirigeants et à l’entraîneur de Kayserispor qui se plient en quatre pour rendre mon quotidien agréable. Déjà, je n’ai pas de problème de nourriture, en plus je suis dans un club familial. Non, vraiment, je n’ai pas à me plaindre de ce côté-là. Même le niveau du championnat turc, et contrairement à ce que beaucoup pensent, est appréciable à tel point que j’ai l’intention de rester longtemps ici. Les moyens dont disposent certains clubs en Turquie sont plus importants.
Vous dites ça aussi parce qu’en Turquie, vous jouez plus souvent, non ?
Je vous mentirais si je vous disais le contraire, parce qu’un footballeur n’est heureux que lorsqu’il joue. Je n’aime pas deux choses : les blessures et le banc de touche. Jusqu’à présent, j’en suis épargné depuis que je suis en Turquie, el hamdoullah. Je ne vous cache pas que je suis passé par des moments difficiles en Allemagne, parce que je ne jouais pas. Là, les choses sont complètement différentes et c’est pour cela que je suis heureux. Vous savez, ce que j’ai joué en Turquie pendant un mois, je ne l’ai pas joué en une année en Allemagne, toute la différence est là.
Le fait d’enchaîner les matchs ne vous fait-il pas craindre des blessures ?
Au contraire ! Je suis venu pour ça finalement. Et même si je jouais tous les trois jours, je ne craindrais rien, je serais encore plus heureux. J’aime trop le ballon et je suis prêt à jouer matin et soir s’il le faut (il rit).
Surtout que le coach vous utilise au poste que vous préférez le plus, c’est-à-dire comme milieu axial juste derrière les attaquants…
Oui, c’est ça. C’est là où je me sens à l’aise, que ce soit en 10 ou en 8. Jusque-là et malgré la défaite d’hier (1-0 face à Sivasspor), les résultats lui ont donné raison. Nous sommes toujours quatrièmes et nous essayons de terminer dans le trio de tête pour pouvoir participer à l’Europa-League.
Vous avez joué à Marseille pour ensuite être transféré chez le champion d’Allemagne. Maintenant, vous vous trouvez dans le championnat turc en train de lutter pour la 3e place. Ne nourrissez-vous certains regrets sincèrement ?
A quoi ça sert de jouer dans un grand club pour s’entraîner à fond toute la semaine, en sachant que le jour du match on se retrouve sur le banc ? Non, le bonheur d’un footballeur se trouve sur le terrain, pas ailleurs. Cela fait un mois et demi que je joue en Turquie et je me sens heureux à chaque fois que je prends mon sac pour aller à l’entraînement, parce que je sais que l’entraîneur compte sur moi. Je souhaite seulement que les choses continuent de la sorte, car comme je viens de vous confier, j’ai l’intention de rester longtemps dans le championnat turc.
Peut-on comprendre par là que des grands clubs turcs vous ont déjà sollicité ?
C’est encore trop tôt d’en parler. Pour l’instant, je me concentre à fond sur mon club et les objectifs à atteindre avec Kayserispor, tout en pensant naturellement à l’Equipe nationale.
Avant de parler de l’Equipe nationale, on voudrait bien vous demander de nous faire un commentaire sur Wolfsburg qui ne cesse de dégringoler vers le bas du classement…
Même quand j’étais là-bas, je ne jouais pas. Donc, les résultats actuels de Wolfsburg n’ont rien à voir avec mon départ. Et puis, je joue à Kayserispor et je n’ai pas envie de parler d’autres clubs.
Mais vous appartenez toujours à Wolfsburg puisque vous n’êtes que prêté à Kayserispor…
Cela ne veut pas dire que je retournerai forcément à Wolfsburg. Seul le Bon Dieu peut savoir où je jouerai la saison prochaine. Ce qui se passe à Wolfsburg ne m’intéresse pas, c’est le présent qui m’intéresse et le présent, c’est mon club et le match de l’Equipe nationale du 27 mars.
Dites donc, vous semblez impatient d’en découdre avec les Marocains…
Je suis impatient de jouer ce match, mais je suis aussi impatient de sentir l’air du pays et de rencontrer les gars. Ça fait quand même longtemps qu’on ne s’est pas vus, depuis le match du Luxembourg. Nous savons tous que le moindre faux pas est interdit face aux Marocains. Il nous faut donc nous concentrer à fond sur cette mission.
Vous en parlez entre vous déjà ?
Et comment ! On en parle constamment et on sait combien notre responsabilité est grande, car un autre résultat autre que la victoire voudra dire la fin des éliminatoires pour nous.
Comment avez-vous senti vos coéquipiers ?
Tout le monde est impatient d’en découdre. Tous les joueurs sont décidés à ne pas décevoir les supporters qui nous ont toujours soutenus à fond.
Vous êtes le seul avec Anthar Yahia à avoir joué le dernier Algérie-Maroc de la CAN-2004. Quel souvenir en gardez-vous ?
Forcément, ce n’est pas un bon souvenir, car nous avons été éliminés après avoir mené au score jusqu’aux temps morts. En comptabilisant beaucoup de temps additionnel, l’arbitre avait permis aux Marocains d’égaliser, puis de prendre l’avantage dans le temps additionnel. Je garde, par contre, un excellent souvenir de cette CAN qui était le début d’une belle aventure pour un groupe de jeunes dont Anthar, Samir Beloufa et moi-même. C’était la naissance d’une jeune et belle équipe qui avait les moyens d’atteindre facilement la finale.
Peut-on parler de revanche pour vous et Anthar, le 27 mars à Annaba ?
Pas forcément, et ce pour diverses raisons. L’équipe n’est plus la même, mis à part Anthar et moi qui avions 22 ans seulement en Tunisie. On jouait presque tous notre première CAN qui nous avait permis d’apprendre beaucoup de choses qu’on maîtrise parfaitement aujourd’hui. Ensuite, et sur les deux effectifs algérien et marocain, il n’y aura pas beaucoup de joueurs qui étaient là en 2004, mis à part Anthar et moi côté algérien et deux ou trois joueurs côté marocain. Enfin, la troisième raison, la plus importante à mon avis, est que cette fois-ci, on jouera en aller et retour, c’est-à-dire qu’on n’aura pas le droit à l’erreur, surtout que nous avons un statut de mondialiste à défendre. Pour toutes ces raisons, le nom de l’adversaire ne nous importe pas, seule la victoire nous intéresse, car après avoir vécu des moments extraordinaires en Angla et en Afrique du Sud, nous avons envie que cela continue encore. Après nos deux contre-performances face à la Tanzanie et la Centrafrique, nous n’avons plus le droit de lâcher le moindre point.
Mais les matchs contre le Maroc ont un cachet particulier…
Vous me connaissez très bien et vous savez que je n’aime pas perdre, même en amical, et ce quel que soit l’adversaire. Vu notre situation, je ne pense qu’aux trois points, je ne verrai même pas qui sera en face de moi à Annaba.
Les joueurs marocains disent être supérieurs puisqu’ils évoluent dans de grands clubs européens. Ils disent aussi qu’ils viendront à Annaba pour gagner. Qu’en dites-vous ?
Rien. Ce match se jouera sur le terrain, je préfère donc leur réserver ma réponse sur le terrain, pas ailleurs.
Tous les Algériens, y compris Benchikha, disent que lorsque Ziani est en forme, l’équipe d’Algérie ne passe jamais à côté…
Cela me pousse à donner le maximum le 27 à Annaba pour donner raison aux supporters algériens. Si ça peut les rassurer, je leur dis qu’au jour d’aujourd’hui, je suis en pleine forme avec mon club. J’espère que cela se répercutera sur le rendement de l’Equipe nationale.
Vous refusez de parler de revanche, alors qu’en 2004 à Sfax, vous étiez très déçu, non seulement par l’élimination mais aussi parce que vous n’aviez pas été titularisé, alors que vous étiez l’un des meilleurs Algériens du tournoi…
Mais je vous assure que j’ai complètement oublié cet épisode. Nous sommes en 2011 et ce qui m’intéresse aujourd’hui, ce sont les trois points et la qualification à la CAN. Le match de 2004 fait partie du passé. J’ai sept ans de plus, je suis plus conscient de la tâche qui nous attend.
Les Marocains disent que la pression sera sur vous et qu’ils vont jouer libérés…
Tant mieux, car nous avons sorti nos meilleurs matchs lorsque nous étions sous pression. Avec un stade archicomble derrière nous, nous n’avons peur de rien, croyez-moi.
Surtout avec le retour en force de nos attaquants Ghezzal, Djebbour et Ziaya…
Oui, leur retour en force nous aidera beaucoup, en attendant celui de Meghni, Matmour et Halliche qui, j’en suis convaincu, retrouveront bientôt leur niveau et termineront les éliminatoires avec nous inch’Allah.
Vous avez sans doute envie de dire quelque chose aux supporters des Verts ?
Je ne vais pas leur demander de remplir le stade, car je sais que si on avait un stade de 200 000 personnes, ils le rempliraient. Tout ce que je leur demande, c’est de nous soutenir jusqu’au bout et on leur promet de tout donner sur le terrain pour leur rendre le sourire et se qualifier à la CAN.