Zappés des discours électoraux: Raïs et Oued Allel tournent le dos aux élections

Zappés des discours électoraux:  Raïs et Oued Allel tournent le dos aux élections
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À Raïs comme à Oued Allel, c’est le désintérêt total envers le vote du 4 mai. Les habitants de ces deux localités sont conscients de l’enjeu majeur de cette élection : le taux de participation, sachant que le spectre de l’abstention plane sur la consultation. Ils se délectent de cette revanche, après deux décennies de douleur et de sentiment d’abandon.

En cette matinée ensoleillée du mois d’avril, les rues de Raïs, lieu de l’un des massacres collectifs de 1997, sont désertes. Seuls quelques habitants sont regroupés devant un café qui vient d’entrer en activité. Un jeune homme s’affaire à laver la machine à café, dehors, à même le trottoir.

Mehdi, coiffeur, est un ancien militant du FLN. Aujourd’hui, il ne veut plus entendre parler de la politique. Dans cette bourgade de la plaine de la Mitidja, située à peine à une vingtaine de kilomètres d’Alger, aucun parti ni candidat n’a pensé à organiser une activité électorale. Les victimes des massacres collectifs sont les grands absents de cette campagne qui s’achève. Les habitants de Raïs l’ont constaté et ont tiré les enseignements de ce énième reniement. “À Raïs, personne ne vote. On ne croit plus à l’État qui n’a même pas pris la peine de nous indemniser en tant que victimes du terrorisme. Ce qui nous est arrivé nous a fait détester la politique.” À côté de lui, Rabie fixe le vide. Il est l’un des rares survivants de la famille Bekari. Celle qui a payé le plus lourd tribut lors du massacre de Raïs en perdant une quarantaine de ses membres.

Les hommes ont été enterrés dans une fosse commune et les femmes et les enfants dans une autre. Le nombre de morts était tellement élevé qu’il devenait compliqué, à l’époque, de trouver pour chacun d’eux une place pour une tombe individuelle. “Je n’oublierai jamais ce jour-là. Je campais à Chenoua plage. En apprenant la nouvelle, je me suis empressé de rentrer. J’ai été confronté à l’horreur. Les terroristes, on les connaît, mais si on les touche, on va en prison.” Rabie lâche : “La réconciliation, je hais ce mot. Je ne n’arrive même plus à le prononcer.”

LG Algérie

Depuis cette tragique nuit, les pouvoirs publics ont consenti quelques efforts pour sortir ce quartier de son isolement. Toutes les habitations ont été raccordées à l’eau potable et à l’électricité. Les voies publiques refaites. Un établissement de cycle moyen et deux écoles primaires ont été ouverts. Deux d’entre eux sont dotés d’une cantine. La municipalité s’est échinée, ces trois dernières années, à améliorer le cadre de vie dans la localité en procédant à la construction d’un stade où des tournois sont organisés et d’une maison de jeunes pour briser le cercle du désœuvrement. La plupart des familles qui avaient fui l’endroit après le massacre ont réoccupé leurs maisons.