Zairi «Djebbour est un frère, mais je vote le Maroc au match retour»

Zairi «Djebbour est un frère, mais je vote le Maroc au match retour»

Jawad Zairi prenait le soin de bien écouter la question, marquant un temps d’arrêt de quelques secondes, avant de répondre. Il paraissait tourner sa langue par deux fois avant de se prononcer, car, sans doute, sait-il l’impact que peut avoir chaque mot qu’il pipera en ces temps de derby où la polémique boursoufle dans les deux camps, cela s’entend. Entretien.

Jawad Zairi, bonsoir !

Bonsoir !

C’est le quotidien algérien, Le Buteur. Pourriez-vous nous accorder un peu de votre temps pour un entretien ?

Là, maintenant ?

Oui…

Est-ce que c’est possible que vous me rappeliez demain, car je suis un peu pris là ?

Demain ? Il n’y a pas moyen de vous avoir aujourd’hui ?

Bah…. OK, allez-y puisque vous insistez.

Algérie-Maroc, ça vous rappelle quoi ?

Personnellement ? Le quart de finale de la Coupe de la CAN 2004 en Tunisie. C’était un match au cours duquel on était passés par différentes situations. C’était vraiment intense au niveau du jeu, de l’émotion aussi. On était menés au score durant tout le match, puis on revient à 1-1 dans les arrêts de jeu pour ensuite l’emporter par 3-1 au bout. C’était un scénario fou.

Vous avez, vous-même, inscrit le troisième but ?

En effet. Je m’en rappelle encore.

On connaît la passion et l’engouement que les derbys Algérie-Maroc suscitent, du moins de l’extérieur. Comment c’est de l’intérieur ?

(Il marque un temps d’arrêt) C’est un grand moment. Des matches très intenses. Je n’en ai pas joué beaucoup comme ça, mais celui de 2004 résume un peu la situation. C’est un combat ! Il y a beaucoup d’engagement, de l’agressivité.

Vous avez employé le terme combat, c’est si intense que ça ?

C’est des matches très disputés, oui. Il y a eu peut-être des p’tits conflits, sans pour autant que cela dépasse le rectangle vert. C’est vrai que la passion et l’enjeu se font souvent ressentir, mais le respect de l’autre l’emporte à chaque fois. Je ne me souviens pas qu’il y ait eu de dépassements de part et d’autre. ça n’a, en tout cas, jamais été comme face à l’Egypte (rires).

Ça se joue dans les règles de l’art, c’est ça ?

Absolument. On se donne à fond durant le match. Au coup de sifflet final, on se fait la bise et on se donne rendez-vous au prochain match ! (Rires).

Avez-vous suivi le dernier Algérie-Maroc (1-0, ndlr) ?

Non ! En fait, j’étais en déplacement, ce qui fait que je n’ai pas eu le temps de regarder ça en direct. Bon, j’ai pu suivre quelques séquences par la suite. J’en ai eu aussi des échos. On m’a dit que dans l’ensemble, les Algériens étaient plus agressifs. Les Marocains sont des joueurs excellents techniquement… après, je ne sais pas. Peut-être qu’ils ont manqué d’agressivité, d’envie, de cohésion. Je risque de dire peut-être n’importe quoi, puisque je suis loin du groupe. Rafik (Djebbour, ndlr) m’a raconté un peu son match. Voilà…

Vous avez évoqué ça avec Djebbour alors ?

Oui, on en a parlé dès son retour. On a refait carrément le match ! (Rires).

Qu’est-ce qu’il vous a dit ?

Bah que l’Algérie avait joué avec beaucoup le cœur. Il m’a raconté aussi un peu l’ambiance qui y régnait. D’après lui, c’était chaud !

Vous a-t-il parlé du Maroc ? Comment il l’a trouvé ?

Ouais. Il m’a dit que techniquement, il a trouvé les joueurs marocains très bons. Qu’individuellement, il les a trouvés très fort. En fait, c’est grâce au collectif que l’Algérie a fait la différence. Et c’est vrai.

Vous côtoyez Djebbour depuis janvier à l’Olympiakos, quel homme est-il ?

Un gars très sympa. J’ai beaucoup d’amitié pour lui.

Qu’est-ce qu’il a apporté à l’Olympiacos depuis sa venue ?

Beaucoup de choses. Il a marqué beaucoup de buts. Non, je pense qu’il ait réussi une très bonne deuxième partie de saison avec nous. C’est ce qu’il lui fallait. Un grand club à la mesure de son talent qui lui permettrait de passer un cap. C’est bien qu’il ait décidé de venir. Il s’est bien adapté. Le fait qu’il connaisse bien le championnat grec l’a beaucoup aidé.

Quelles sont ses qualités intrinsèques ?

C’est un bon joueur d’appui. En tant que je joueur technique, il me sert beaucoup (rires) ! Non, franchement, il est excellent. Il a un bon jeu de tête. Il est solide. Adroit. Il est complet quoi. C’est une très bonne affaire qu’a faite l’Olympiakos en le faisant signer.

Le match a accouché d’une petite polémique au tour de l’arbitrage. Les Marocains ont beaucoup contesté le penalty accordé à l’Algérie et, par ricochet, la victoire. Pensez-vous que l’arbitre a mis son grain de sel ce jour-là ?

Franchement, je n’en sais rien. Il fallait être dedans pour le dire. Peut-être que l’arbitre n’a pas été à la hauteur. Peut-être que non. En fait, ce qu’il fallait, c’est de mettre le ballon dans les filets. Ça n’aurait jamais fait jaser chez nous autant.

Donc, pour vous, cette polémique n’a pas lieu d’être ?

Oui, carrément. Il faut vite penser au prochain match. Admettons que l’arbitre ait privilégié l’Algérie, ce que je ne peux avancer, qu’est-ce que ça va changer ? Rien ! Donc autant oublier ça et se concentrer sur le prochain match.

Même Gerets en a pris pour son grade, il faut dire que ça a jasé chez vous…

J’imagine… C’était un match important. Un derby. Donc, c’est normal qu’on en parle un peu à l’excès. Le coach est très souvent désigné du doigt après une défaite. C’est un peu dans l’ordre des choses et lui-même le sait pertinemment (il rit franchement). Après, il va falloir lui laisser le temps. L’aventure ne fait que commencer. Attendons que la mayonnaise prenne. Je suis sûr qu’il est capable de faire quelque chose avec cette équipe.

Qu’est-ce qui manque, selon vous, à cette équipe du Maroc pour qu’elle réponde aux attentes ?

Du temps. C’est une nouvelle génération. Les joueurs ont besoin de vivre un peu plus ensemble. De travailler leurs mécanismes. Ils sont très forts individuellement, il n’y a rien à dire. Mais ils ont besoin de peaufiner leur collectif. De marquer des buts aussi, car j’ai constaté que dans le jeu, ils sont quand même pas mal.

Qu’est-ce qui fait que vous n’êtes plus convoqué en sélection. Officiellement, vous n’avez pas pris votre retraite internationale, non ?

Non ! Non ! Je reste ouvert à la sélection. Je pense avoir ma place dans cette équipe. Techniquement, je suis encore apte. Bah, jusqu’à maintenant, on ne m’a plus rappelé, mais cela n’empêche pas que je reste ouvert à la sélection. Je suis revenu en force avec mon club. Après, il n’y a que le Bon Dieu qui décidera si je reviendrai un jour ou pas en sélection.

Le match retour, c’est dans pas longtemps, les esprits se sont quelque peu chauffés lors de ce premier match. Vous qui connaissez la conjoncture, ça sera comment au retour ?

Comme d’habitude !

C’est-à-dire ?

Bah, un match très intense dans le jeu. Il y aura comme d’habitude beaucoup de passion, compte tenu de l’enjeu, mais je ne pense pas que cela va dépasser le cadre sportif. Et puis, il ne faut que vous les journalistes chauffiez un peu trop la baudruche. Essayez de dépassionner un peu les débats et de ne pas trop enflammer les choses. Ça va rendre beaucoup de service à tout le monde, je vous assure (il le dit avec enthousiasme).

Les quatre équipes qui composent ce groupe sont logées à la même enseigne, quatre points chacune après trois journées, avez-vous un favori ?

Pfffffffffffff… Difficile à dire. Non, sincèrement, ça se joue très serré dans ce groupe. Il faudra peut-être attendre de voir ce qu’il en sera lors de la prochaine journée. L’Algérie ira jouer au Maroc, ça peut la desservir. Enfin, je dis ça comme ça. Si le Maroc gagne, il aura 7 points. L’Algérie, 4. Ça risque de se jouer dès le prochain match. Je le crains, oui.

Vous votez donc Maroc ?

(Rires) Oui.