Par NAZIM BRAHIMI
Auteur et spécialiste des questions liées au monde du travail, Zahir Battache revient, dans cet entretien, sur la situation du système national de retraite. Il estime que les retraites dépendent surtout du niveau de la croissance économique future.
Reporters : Le système national de retraite est en difficulté. Quelles en sont les causes principales ?
Zahir Battache : A mon sens, il y a quatre facteurs essentiels qui ont généré une telle situation. Il y a, premièrement, le chômage sévissant (manque de cotisations sociales qui servent à alimenter le système de retraites). Deuxièmement, la réduction de la croissance et le manque d’investissement, créateur d’emplois. Troisièmement, une tendance des salaires à la baisse, ce qui implique une cotisation réduite, et quatrièmement, une augmentation du nombre de retraités en raison des derniers départs massifs.
Face au déficit qui s’est fortement creusé depuis 2015, les autorités ont injecté des solutions. Quel est votre avis sur ces solutions ?
Tout d’abord, toute solution de dernière minute n’est que vaine. Le système de retraite a besoin d’hommes et de femmes capables de cerner les problèmes futurs éventuels. Certes, les tentatives de sauvetage peuvent donner un souffle le temps d’une échéance mais pas pour longtemps. Justement, pour que toute solution soit efficace, elle doit répondre aux 5 impératifs cités dans la première question, c’est-à-dire remédier à la question du chômage par un investissement créateur de richesse et d’emploi, ce qui induira automatiquement une revalorisation générale des salaires et par conséquent une meilleure mobilisation des ressources par cotisation.
Les pouvoirs publics prévoient une stabilité du déficit financier de la caisse dans les années à venir. Est-ce possible ?
Je ne vais pas m’inscrire dans un débat entre un « pessimisme » d’il y a quelques mois et un « optimisme » apparaissant vraisemblablement « à la mode », à l’instar du pantalon « jean » algérien qui paraîtra dans peu de temps. Une stabilité du déficit financier de la caisse dans les mois à venir est fort probable, mais, pour parler des années à venir, la question reste tributaire de réformes tenant pour principale politique le seul retour vers une vraie croissance économique.
Donc seule une dynamique de croissance économique est à même de permette une maîtrise de l’équation ?
D’une manière générale, on sait que des économies qui se développent sont des économies qui mettent de plus en plus en place un système de protection sociale. L’équation est simple : baisse de la croissance économique induit une baisse du taux d’emploi (hausse du taux de chômage). Ce qui se traduit par la baisse du nombre de cotisants et hausse du ratio de dépendance économique, ce qui aboutira nécessairement vers la hausse du problème de financement des retraites. En conclusion, l’avenir de nos retraites dépend en premier degré du niveau de la croissance économique future.
On évoque aussi le poids de l’informel dans le monde de travail (non-déclaration, sous-déclaration…). Que pensez-vous à ce propos ?
Le système algérien de retraite est fondé sur le principe de répartition. Les pensions versées durant une année sont financées par des cotisations prélevées la même année. Ce qui explique que la question de l’emploi est primordiale pour sa survie -tant qu’il y a plus de cotisations, tant le système tend vers ses équilibres. En sus, comme je l’ai évoqué précédemment, les retraites sont indexées aux salaires, une défaillance dans la déclaration est préjudiciable à toute l’économie nationale et, bien entendu, préjudiciable pour le système de sécurité sociale tout entier et pour le système de retraite en particulier.