Yasmina Khadra : ” Bouteflika doit s’exprimer”

Yasmina Khadra : ” Bouteflika doit s’exprimer”

Dans un entretien accordé à l’agence Reuters, le romancier Yasmina Khadra exhorte le président Bouteflka à prendre la parole, après “des mois de silence”, et s’adresser enfin au peuple algérien.

“Ce qu’ils (le peuple algérien) exigent c’est ne pas s’adresser à un dictateur, mais plutôt à un président qui doit s’exprimer», a-t-il déclaré à l’agence. Et d’ajouter : « L’Algérien est pressé. Il veut une solution immédiate, et on peut le comprendre… Sa vie a été une série d’échecs et de désillusions, et sa foi a été touchée. Il demande une amélioration inconditionnelle des conditions de vie, de la décence et le droit d’avoir des rêves”.



Concernant les réformes entreprises par le gouvernement, Khadra les trouve insuffisantes : “Oui, des réformes ont été entreprises, mais rien ne semble changer dans la vie quotidienne du citoyen” . Le directeur du CCA demande aux gouvernement d’impliquer les jeunes dans ses décisions. «Le cercle de prise de décision doit s’ouvrir aux jeunes talents, et il y en a beaucoup en Algérie…un débat national est nécessaire sur les aspirations des personnes et des propositions légitimes des jeunes. Le malentendu réside dans notre incapacité à s’écouter les uns les autres”, a déclaré Khadra.

Un nouveau roman en écriture

Après le succès de son dernier roman ” Ce que le jour doit à la nuit”, consacré à la période coloniale, Yasmina Khadra a commencé l’écriture d’un nouveau livre qui traitera, comme souvent, un sujet d’actualité. Cette fois le romancier a choisi comme trame à son histoire le phénomène des pirates somaliens.

«J’ai choisi la Corne de l’Afrique pour parler du phénomène de la piraterie. Mais c’est plutôt une approche philosophique sur le concept de la mort pour les Européens et pour les Africains.” Le personnage principal du roman sera un européen : “Pour la première fois, je vais entrer dans la peau d’un européen (un Allemand) qui va faire un voyage initiatique à travers le choc des mentalités”.Selon Khadra, ses romans servent à “faire la lumière sur certains coins sombres de notre époque et de la complexité des cultures. Mes romans sont une invitation à découvrir l’Autre.”

Khadra l’incompris !

Une fois n’est pas coutume, Yasmina Khadra continue à porter un regard sévère sur la société algérienne pour son “allergie à la réussite” et sa détestation ” des gens qui brillent par leur talent”, et de fustiger la presse algérienne de” l’Algérie officielle” : “Même si je suis recherché dans le monde entier, dans l’Algérie officielle des organismes culturels essayent de m’isoler et utilisent souvent la presse pour me discréditer.”

Sans doute que pas mal de journalistes algériens n’apprécient pas certaines des déclarations et des prises de position de l’ex officier en faveur de l’armée et du président Bouteflika, mais cela n’a pas empêché Yasmina Khadra d’accepter d’être nommé à la tête du Centre Culturel Algérien de Paris. Aussi, quasiment tous ses romans sont distribués en Algérie. Une reconnaissance “officielle”, à laquelle d’autres auteurs algériens n’ont pas eu droit.

Concernant la situation de la culture en Algérie, Khadra estime que celle-ci n’aura pas sa place en Algérie “tant que l’artiste et l’intellectuel continuent à être vu avec la haine et la suspicion”.

Mais malgré les critiques, il a déclaré qu’il avait construit une maison à Oran pour retourner un jour vivre en Algérie. “C’est la preuve que j’ai l’intention de retourner définitivement dans mon pays. Mon histoire, mon peuple, mes habitudes sont là” a-t-il déclaré. Et de conclure : “Nous avons un beau pays. Nous devons en faire un paradis après que nous ayons réussi à le transformer en un enfer “.