Le secrétaire d’Etat adjoint américain
Quand c’est la presse américaine qui appuie la guerre au Sahel, il faut craindre le pire.
La crise sahélienne n’a pas seulement induit un chaos au nord du Mali, mais a divisé également la communauté internationale qui n’arrive pas à dégager une position cohérente. Tout le monde est d’accord sur tout et rien à la fois. En déplacement à Alger pour discuter avec le Président Bouteflika et d’autres responsables algériens de cette crise justement, le secrétaire d’Etat adjoint américain, William Burns, a rappelé que Washington appuie la position «leader» de l’Algérie en faveur de la promotion du dialogue politique entre les Maliens.
«Les Etats-Unis appuient la position leader de l’Algérie en faveur de la promotion du dialogue politique entre le gouvernement malien et les Touareg du Mali», a indiqué M.Burns, lors d’un point de presse organisé au siège de l’ambassade des Etats-Unis à Alger. «Nous continuons de favoriser une coordination des efforts en vue d’accélérer les discussions politiques au Mali et nous savons que l’Algérie a un rôle à jouer en la matière», a souligné M.Burns. Les mêmes propos ont été tenus par d’autres responsables américains en visite à Alger, depuis ces quelques dernières semaines dont la secrétaire d’Etat, Hillary Clinton, et le commandant de l’Africom, le général Carter Ham. Tous saluent et appuient le rôle leader de l’Algérie dans la région, mais quelque chose bloque dans le règlement de cette crise.
Les principaux acteurs occidentaux soutiennent, en filigrane l’option militaire qui est publiquement déclinée dans une autre version; celle de régler la crise par la voie diplomatique (sic). Plusieurs pays et organisations internationales dont l’ONU ont soutenu que le dialogue «doit rester la priorité pour régler la crise au Mali, et qu’une opération militaire devait être la solution de dernier recours». Le Haut représentant de l’Union africaine (UA) pour le Mali, Pierre Buyoya, a déclaré, mercredi dernier, à Alger que l’UA «pense que le dialogue est l’un des piliers importants pour ramener la paix dans ce pays».
L’ouverture d’un dialogue entre les protagonistes de la crise malienne a été soutenue également par Londres. L’envoyé spécial du Premier ministre britannique pour le Sahel, Stephen O’Brien, qui a terminé mercredi dernier sa visite à Alger, a, lui aussi, exprimé la détermination du Royaume-Uni à trouver «une solution qui respecte l’intégrité territoriale du Mali, qui mette un terme à la violence et à la souffrance de tant de personnes innocentes».
Le secrétaire général adjoint aux Affaires politiques, Jeffrey Feltman, a également soutenu que «le processus politique doit rester la priorité» au Mali et qu’une opération militaire devait être «la solution de dernier recours». Le commandant de l’Africom, le général Carter Ham, la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton, tous soutiennent l’option diplomatique pour le règlement de cette crise. Pourquoi alors ce défilé diplomatique à Alger? Il y a donc quelque chose qui bloque. Mais qui bloque quoi? A première vue, c’est la position d’Alger qui ne veut pas entendre parler d’une option militaire ou au pire, la participation de ses forces dans cette éventuelle action. Parallèlement donc à cette option politique servie à satiété, se trame une autre, totalement différente, brutale celle-là. Le bruit des bottes pollue l’acoustique de ce nouveau sanctuaire d’Al Qaîda. On assiste alors, depuis quelques mois, à un matraquage médiatique qui s’abat sur la région, appuyé par un moulinet diplomatique à Alger.
Intervenant mercredi dernier devant le Sénat, lors d’une audition consacrée à la situation au Mali, le sous-secrétaire d’Etat américain pour l’Afrique, Johnnie Carson, a souligné que le rôle de l’Algérie, au même titre que celui de la Mauritanie, est «crucial pour une solution durable dans le nord du Mali». Alger ne cache pas sa position: il n’est pas question d’une intervention qui aboutirait à une guerre ethnique sans fin. Mais seule, peut-elle faire face à ces raids diplomatiques incessants? Jeudi dernier, William Burns ne s’en est pas caché lorsqu’il a affirmé que son pays appuierait une éventuelle intervention militaire africaine dans le nord du Mali. Pour faire face aux problèmes sécuritaires qui se posent à la région, le secrétaire d’Etat adjoint américain a indiqué que les Etats-Unis sont en faveur d’une coopération avec le Mali et tous les pays de la région en matière de lutte contre le terrorisme. Les va-t-en guerre ont trouvé dans la presse un allié de taille. Le 3 décembre dernier, le New York Times a affirmé que la filière d’Al Qaîda au Sahel «est la filière la mieux armée dans le monde, à cause des centaines de millions qu’elle a gagnées du paiement des rançons, du trafic de drogue et d’autres activités illicites, comme le carburant et le tabac». Le 5 décembre dernier, le Washington Post s’est mis de la partie. Il a rapporté que l’intervention militaire pourrait avoir lieu au début de l’année 2013.
Le quotidien américain s’est basé sur les propos tenus par Alassane Ouattara, président de la Côte d’Ivoire, qui était mercredi dernier à Paris. Quand c’est la presse américaine qui s’y met, il faut craindre le pire.
