L’administration américaine a tout fait pour faire passer la pilule des pseudo révélations de Wikileaks présentées comme authentiques. L’opinion publique mondiale est occupée à décrypter et à essayer de comprendre le contenu de ces centaines de milliers de câbles qui sont perçus comme une mise à nu de la première puissance mondiale.
Cette même puissance donne cette image pathétique de vulnérabilité, de géant aux pieds d’argile, au ventre mou. Certains sont même tentés de croire qu’il n’existe pas de citadelle imprenable, mais des citadelles mal attaquées.
Il suffit d’en découvrir le talon d’Achille pour accéder à l’antre de la bête. A première vue, les Etats-Unis ont enfanté El Qaïda qui s’est retourné contre eux, tout comme ils ont aussi inventé Internet qui s’est avéré un cheval de Troie redoutable qui a mis à nu la «vierge effarouchée».
La Triade donne l’impression d’être fragilisée au point qu’une bande de hackers, aidée par une taupe, a réussi à dévoiler «ses secrets» les plus intimes, révélant au monde entier sa «vulnérabilité» et son «innocence» puérile.Les Etats-Unis, pivot de la Triade qui s’est partagée le monde et préside à sa destinée depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, se sont retrouvés brutalement, en 1989, sans alibi pour justifier leur hégémonie et leur domination.
La chute du mur de Berlin a complètement bouleversé l’ordre mondial décidé à Yalta. La stratégie mise en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale n’était plus de mise et il fallait improviser et se trouver un ennemi pour justifier le déploiement de la puissance militaire américaine à travers le monde et continuer à surveiller tous les mouvements suspects de l’ennemi potentiel contre lequel il faut mobiliser tous les alliés. Si l’Iran était susceptible depuis la révolution islamique de jouer le rôle de l’ennemi idéal, l’Afghanistan qui occupait déjà l’attention des Etats-Unis posait un problème dans la mesure où Washington y a créé une armée islamique qu’elle soutenait et qu’elle armait pour combattre le «péril rouge». La déroute de l’armée et la chute, les bouleversements imprévus dans l’Europe de l’Est ont surpris l’Occident en général et les Etats-Unis en particulier. Ces derniers ont donc fait de l’allié d’hier un ennemi conjoncturel devant leur permettre de maintenir leur mainmise sur le sort du monde en attendant d’élaborer une
nouvelle stratégie conforme aux nouvelles donnes. Sous l’administration de Clinton, un courant modéré et moins avide avait suggéré l’esquisse d’un nouvel ordre mondial au visage humain qui devait être développé lors d’un sommet regroupant à Rome, tous les sociaux-démocrates du monde, notamment ceux des puissances mondiales, pour proposer une troisième voie entre le communisme stalinien qui venait de péricliter et le capitalisme sauvage qui menace l’humanité d’implosion. Cette rencontre eut lieu mais sans lendemain. Monika Lewinsky a eu raison de Clinton et de ses rêves philanthropiques. Sous les Bush, père et fils, Les Etats-Unis
allaient faire du «péril vert» et de la menace nucléaire et de la chasse aux armes de destruction massive leur cheval de bataille pour approfondir le désordre mondial. De la guerre contre les Etats ayant caractérisé les guerres classiques, les Etats-Unis sont passés à la guerre contre les peuples. Cette nouvelle donne, produit de l’absence d’une stratégie subtile, est devenue une menace réelle contre les Etats-Unis et leurs alliés qui sont perçus comme les responsables du chaos caractérisant la planète en ce début du troisième millénaire. Ou les choses changent sous le contrôle de la Triade et s’orientent conformément à leurs intérêts, ou elles changent dans un sens qui pourrait remettre en cause tout l’ordre mondial.
Manifestement, les Etats-Unis, l’Europe et le Japon ont pris conscience du risque réel qui menace leur suprématie et leur hégémonie économique, militaire et politique. Le processus de mondialisation qui est l’expression du capitalisme sauvage et ses limites structurelles est à revoir. L’arrivée d’Obama au pouvoir est un indice de cette mutation en douce voulue par la Triade et les lobbies des multinationales qui gèrent depuis plus de trente ans des crises cycliques touchant aussi bien les économies du monde que les relations internationales. La feuille de route de la nouvelle stratégie globale qui se prépare dans les laboratoires secrets des Etats-Unis et de ses alliés ne sera jamais divulguée par Wikileaks avant son adoption, sa mise en œuvre et sa
découverte sur le terrain.