Cela fait maintenant deux semaines que wikileaks a entamé la publication des câbles diplomatiques qui ont mis en émoi les états et réjouit les citoyens, qui commencent à être informés, enfin, de ce qui se trame sur leur dos dans les bureaux fermés des ambassades américaines dans le monde entier.
Que nous apprennent donc ces câbles ? Au delà des anecdotes de nos dirigeants, des mesquineries qu’ils se lancent les uns les autres, chacun pour plaire, on l’aura compris, à la première puissance mondiale, ils nous informent sur leur fonctionnement face aux américains.
Voilà donc des régimes qui les appellent à bombarder l’Iran (l’Arabie Saoudite ou le Bahrein alors qu’ils se prétendent les leaders du monde musulman) d’autres qui les supplient de ne pas quitter trop rapidement l’Irak (l’Algérie qui fait croire officiellement qu’elle demande le retrait des américains du pays de l’Euphrate) et la liste n’est pas exclusive. Bref des dirigeants qui tiennent un double langage. Un premier discours destiné aux américains, qui consiste en une allégeance franche et directe et parfois, en allant même plus loin que les américains ne l’espèrent, tout en cachant « honteusement » cette « coopération – collaboration » à leur peuples.
Et un second discours qui consiste à jouer les fiers à bras, islamistes ou nationalistes, devant leurs opinions. Souvent même, ils harcèlent, interdisent et emprisonnent ceux qui tiennent, publiquement et en l’assumant, le dixième des discours qu’ils tiennent, eux ,dans les salons chic des ambassades ou dans les bureaux feutrés des palais présidentiels. Imaginons un instant que ces révélations avaient concerné des opposants ou même des personnalités indépendantes qui auraient ainsi admis devant les américains que la politique de l’Egypte à l’égard de gaza était bonne et surtout que s’ils étaient au pouvoir, ils accorderaient le droit de survol par l’aviation américaine de l’espace aérien algérien . On entend déjà les cris d’orfraie et les accusations de trahison.
Ce double discours, permet à ce régime, qui se targue de représenter les islamistes et les nationalistes, contre les démocrates laïques, de se faire passer pour des progressistes, pragmatiques, modernistes presque obligés de cacher leur véritables positions à des populations « arriérés » qui ne comprendraient pas leurs soumissions au demandes américaines. N’est ce pas bouteflika qui a lancé le concept de « el izza wal karama » ? Il y a un mot pour qualifier cela : l’imposture.
De l’autre coté, ces câbles nous apprennent que les américains ne sont pas dupes pour un dollar. Ils savent exactement à qui ils ont à faire. Car enfin, les analyses, que dis-je, les radioscopies, que dressent les américains de nos sociétés, de nos états, sont sans concessions et très proches de la réalité : régimes dépassés, sclérosés, corrompus, liberticides, quasi mafieux et sans aucune vision pour leur propre pays. C’est exactement le constat que partagent tous les observateurs locaux ( à l’exception des dirigeants en place) et internationaux.
Ce « malheur des peuples », diagnostiqué par eux-mêmes, ne semblent pas les concerner. Les américains, avec le cynisme des puissants, et avec comme unique objectif leurs propres intérêts, profitent largement de la faiblesse et de l’incompétence de ces régimes pour arracher toujours plus de concessions. Ils profitent, directement et consciencieusement du « malheur des peuples » et de la félonie de leurs dirigeants pour conserver leur leadership sur le monde.
Si l’on ne peut, honnêtement, reprocher aux américains d’être à l’origine de nos malheurs, il apparaît clairement avec les révélations de wikileaks, qu’ils n’en ignorent rien. En ne dénonçant pas publiquement, ce qu’ils pensent réellement et secrètement de ces régimes, les américains sont au-delà de la « non assistance à peuples » en danger. Leur silence officiel, leur double langage qui permet à ces situations de perdurer, fait d’eux les complices objectifs des régimes qu’ils considèrent comme sclérosés.
Par Yahia Bounouar