Washington présentera, avant la fin avril, un projet de résolution aux pays membres du Conseil de sécurité de l’ONU pour étendre le mandat de la mission des Nations unies au Sahara occidental (Minurso) au respect des droits de l’Homme. En clair, les Etats-Unis veulent que l’ONU, à travers ses représentants dans la région, puisse enquêter sur les atteintes aux droits de l’Homme au Sahara occidental, colonisé par le Maroc depuis 1975.
Des droits de l’Homme violés systématiquement par Rabat et que dénonce le Front Polisario (Front pour la libération de Sakia El Hamra et Rio de Oro), et les organisations de défense des droits de l’homme. Des droits insuffisamment protégés par la Minurso, avait déjà constaté le Front Polisario.
Le projet américain tend à élargir les missions de la Minurso à la surveillance et l’information en matière de droits de l’Homme. Créé le 29 avril 1991 par la résolution 690 du Conseil de sécurité, la Minurso a pour responsabilités premières la surveillance des forces en présence ainsi que la préparation du référendum sur le statut final du Sahara occidental. Après le référendum, la Mission avait pour mandat de surveiller le cessez-le-feu. Si le cessez-le-feu est globalement respecté, le référendum prévu en 1992 est constamment reporté du fait de l’absence de consensus entre les parties. En 2007, un projet d’autonomie présenté par le Maroc est rejeté par le Front Polisario qui continue de défendre l’idée d’un référendum.
L’initiative américaine semble être l’aboutissement de plusieurs actions initiées pour faire de la protection des droits de l’Homme au Sahara occidental une priorité internationale. La militante sahraouie des droits de l’Homme, Aminatou Haidar, avait effectué, en 2012, une visite à Washington et New York pour plaider la cause du Sahara occidental et dénoncer les violations des droits de l’Homme par le Maroc. A New York, la militante sahraouie avait rencontré des membres du Conseil de sécurité de l’ONU ainsi que le secrétaire général adjoint de l’ONU pour les droits de l’Homme.
Outre de porter à la connaissance de l’opinion publique américaine «les violations flagrantes des droits de l’Homme perpétrées par les forces marocaines contre le peuple sahraoui», le but de Aminatou Haidar est également de demander l’introduction du mécanisme de surveillance des droits de l’Homme dans le mandat de la Minurso. Une demande également formulée par le centre américain Robert F. Kennedy pour la justice et les droits de l’Homme (RFK Center) qui avait dressé, en septembre 2012 un rapport accablant sur le Maroc pour sa violation des droits de l’Homme des Sahraouis et appelant à l’urgence de l’instauration d’un «mécanisme international permanent afin de protéger les droits de l’Homme du peuple sahraoui».
Force est de constater que depuis 2011 et dans le sillage des événements sanglants de Gdeim Izik, les Etats-Unis manifestent davantage d’attention à la question des droits de l’Homme dans la région. Les Sahraouis avaient érigé en novembre 2010 un camp à Gdeim Izik près d’El Ayoun, capitale occupé du Sahara occidental, pour revendiquer pacifiquement leurs droits, dont celui à l’autodétermination. Le démantèlement violent du camp par les forces d’occupation marocaines avaient fait plusieurs morts et blessés. Le Congrès américain avait adopté en décembre 2012 une loi qui exige du département d’Etat de s’assurer du respect des droits de l’Homme au Sahara occidental préalablement à l’octroi de toute aide financière militaire au Maroc.
Le représentant du Front Polisario à l’ONU, Ahmed Boukhari, et à propos du nouveau rapport du Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, sur le Sahara occidental, a déclaré que le rapport onusien peut convaincre le Conseil de sécurité à prendre les mesures nécessaires en vue de la mise en place d’un mécanisme permanent pour surveiller la situation des droits de l’Homme au Sahara occidental et que la Minurso est le meilleur cadre et le plus approprié pour assurer cette mission qui le placerait sur le même pied d’égalité avec toutes les missions de maintien de la paix des Nations Unies mises en place depuis 1978.
Comme il fallait s’y attendre, Rabat a rejeté l’initiative américaine qui demande aussi que les agences de l’ONU veillent au respect des droits de l’Homme dans les camps de réfugiés sahraouis de Tindouf, en Algérie, tenus par le Front Polisario. Le roi du Maroc, Mohammed VI, a réuni ce lundi les membres de son gouvernement pour dénoncer cette démarche visant à «dénaturer le mandat» de la Minurso, a indiqué un communiqué du cabinet royal, publié par l’agence officielle marocaine MAP.
Moncef Wafi
La proposition marocaine d’autonomie «ne peut pas servir de seule base dans les négociations»
L’ambassadeur des Etats-Unis au Maroc, SamuelI Kaplan, a affirmé que les Etats-Unis considèrent que la proposition marocaine d’autonomie «ne peut pas servir de seule base dans les négociations» pour trouver une solution au conflit du Sahara occidental.
L’ONU et les Etats-Unis considèrent que la proposition marocaine d’autonomie «ne peut pas servir de seule base dans les négociations» entre les parties du conflit (Maroc et Front Polisario), a déclaré le diplomate américain dans une conférence- débat tenue à Casablanca à la veille de la fin de sa mission, entamée en 2009, en qualité d’ambassadeur des Etats-Unis au Maroc. Il a tenu à préciser qu’il ne s’était jamais rendu au Sahara occidental «car, il est toujours classé par l’Organisation des Nations-Unies comme sans souveraineté».