Voyage à bord d’une rame à Alger: L’incivisme hante le tramway plus qu’il ne sert les usagers

Voyage à bord d’une rame à Alger: L’incivisme hante le tramway plus qu’il ne sert les usagers

Tant de gens, algérois et même d’autres régions du pays, de passage dans la capitale, commençaient à affluer, en ce dernier jour de vacance d’hiver, en début de matinée du samedi dernier, dans un climat glacial, pour se rendre, via le tramway, à leurs occupations. Tout le monde convergeaient vers la Station principale de ce tram : les Fusillés, (ex-ruisseau). Le rythme grouillant, les pas pressants, le boulevard avait du mal à contenir tout le monde et les bambins, en vacances, étaient eux aussi au rendez-vous, pour prendre le tramway et, pour certains d’entre eux, s’amusaient à monter pour descendre à la prochaine station.

Sous les grands arbres, qui bordent la place, des jeunes et moins jeunes, des femmes et des hommes, des enfants, en groupes et en famille, pour certains et solitaires, pour d’autres, se rendaient sur place, pour rejoindre chacun la destination final de son parcours, par le tramway, ce moyen de transport que les algérois et autres ont vite fait d’adopter. Pour cette dernière journée de vacances d’hiver, il était prévisible que le nombre de personnes qui devaient emprunter le tram était important. Un afflux qui s’est manifesté, au niveau des guichets de vente du fameux ticket, pour pouvoir accéder à ce transport.

Les agents de contrôle étaient à leurs postes, un casse tête au quotidien, pour eux. Trois agents assurant la vérification de la validité des tickets, sur le quai, ne perdaient pas de vue, cet afflux de passagers, car parmi eux, et ils le savent, « il y a toujours des malins qui ne veulent pas payer leur place» nous lance l’un d’eux. Contrôler les titres de transport et repousser « les harraga», ceux qui ne se lassent pas de tenter de passer par les maillons du filet des contrôleurs, est la tâche quotidienne de ces agents. Il faut le dire, réussir à mettre les pieds sur le quai, c’est un parcours du combattant, avec tant de personnes, toutes pressées de se voir contrôler, pour accéder au quai, alors que le tramway n’avait pas encore siffler pour annoncer qu’il rentrait en quai.

Manque de civisme, chez certains qui, souvent engendre des désagréments, voire des situations pénibles, notamment pour les vieux et vieilles et les femmes enceintes. Non loin, trois personnes, d’une vingtaine d’années, ont était rappelées à l’ordre, juste devant la petite file d’attente qui s’est formée, en un laps de temps record. Affichant une mine désagréable, en tentant de passer le mur des contrôleurs, ces derniers les ont invitées à rebrousser chemin pour aller acheter le ticket, comme est l’usage. Sans insister, quelques pas en arrière, ils se sont dispersées entre la foule derrière, peut-être pour tenter, un peu plus tard, de monter dans le tramway sans débourser les 40 Da . Et la matinée du voyage n’a fait que commencer! Sur place, une fois sur le quai, l’on pouvait ressentir le vent glacial souffler, la mer n’étant pas loin, l’odeur de la mer, bleue agitée, nous parvenait jusque là, à cette espace découvert, les quais, où tout le monde attendait l’arrivée du tramway, pour échapper au froid.

Entre la foule, les visages de certains enfants dégageaient une joie, celle d’être contents et émerveillés de découvrir, pour la première fois, ce transport «moderne» qu’ils n’ont vu, jusqu’à ce jour, que dans les dessins animés, les livres ou les jeux et, en ce samedi, ils ont été bien gâtés par leurs parents et proches. Non loin, un homme d’une quarantaine d’année, attire notre intention, il ne cessait de regarder sans cesse, sa montre, sans manquer de chuchoter « je vais être en retard », oubliant que l’aiguille du tramway, elle n’est pas encore arrivée, pour annoncer son entrée en quai. Soudainement tous les regards se tournent, la Ram du tramway s’annonce et dans les temps, comme c’était affiché sur le panneau électronique, que l’homme qui regardait sa montre, ignorait son existence. Au bord de cette Ram, dont sa longueur est de 43,91m, desserte l’agglomération de la région est d’Alger reliant la station des Fusillés à celle de Dergana, en traversant les communes, d’Hussein Dey, El Magharia, El Harrach, Bab Ezouar, Bordj El Kiffan avant d’atteindre la dernière : Dergana.

Les portes du TRAM s’ouvrent sur nous

Avant même que les portes du tram ne s’ouvrent, le mouvement des citoyens sur le quai s’agite, et complique davantage, d’abord la descente des passagers, arrivés à destination finale,-terminus- pour que les autres puissent y accéder. Et c’est là le point noir, le manque de civisme est frappant, pour bon nombre de ces citoyens, quand d’autres s’efforcent de libérer le chemin. Tout le monde se bouscule pour pouvoir monter, alors que d’autres s’éloignent, en ayant un pincement au cœur, de voir que le manque de civisme, persiste à faire défaut, et non loin, d’autres s’emploient à user de leurs coudes, pour se frayer un chemin, n’épargnant personne sur «son exploit » même pour s’arracher une place, avant un vieux ou une vieille.

Les places pour personnes aux besoins spécifiques sont prises en premier, souvent !

Avant que le Tram ne reprenne son parcours, vers Dergana, une nouvelle situation se présente, celle qui ne peut nous laisser en froid. Alors que parmi les passagers assis, des jeunes, notamment, en aucun moment de ce voyage n’ont daigné céder, cordialement et poliment leur siège, à un vieux qui s’efforçait, sur sa canne, à pouvoir se tenir debout, les poids des années de labeurs et de jours pénibles ont eu raison de lui. Mais, heureusement une jeune fille a vite fait de se lever, pour inviter, âmmi Echeikh à s’asseoir, et même là, les jeunes garçons sont restés en marbre, ni le respect pour le vieux, ni la galanterie pour cette jeune fille sont des valeurs à leurs yeux, dans les espaces publics.

Lors de la courte halte du tram, à son arrêt, à une de ses stations, une personne à mobilité réduite, un homme, monte à bord, sans réussir à passer à travers les nombreux passagers à bord, pour parvenir, là où les places lui sont réservées, que d’autres personnes, en forme, occupent, souvent sans scrupules. Après des efforts pour parvenir, à sa place, une mère de famille s’adresse à celui qui faisait semblant de ne pas voir, «cette place est réservée aux handicapés ! », avec une mine de grincheux, il se lève, sans dire un mot, même pas pour inviter celui qui devait s’asseoir, à prendre sa place.

Le tram…reprend son trajet et les choses ne s’arrêtent pas là!

Au bout de quelques minutes seulement, une jeune fille en colère lança en direction de deux jeunes passagers «une femme ne peut pas être respecté dans cette société, un peu de civisme, on n’en a marre ». La solidarité se manifeste, net un groupe de jeunes filles, des étudiantes, sans nul doute, se rapprochent d’elle, en signe dissuasif aux jeunes «déséquilibrés» Pour la femme, en général, et les jeunes filles, en particulier, monter dans le tram «c’est une bataille au quotidien des valeurs contre le manque de civisme et des comportements de violences contre la femme», disait, à basse voix, l’une d’elle à une autre. À cet instant, du fond du wagon, une voix sonore, émanant des hauts parleurs du tram retentit, informant les passagers, ce tram part à «destination Café Chergui» et le Prochain arrêt Tripoli, Thaâlibia».

Un temps limite pour remplir un bocal de Monnaie !

À l’arrêt de la station la Glacière El Harrach, d’autres passagers montent et ceux qui faisaient partie du voyage, à notre départ, descendaient, et au départ, de cette station, au milieu de la foule, surgit une petite fille subsaharienne, munie d’un bocal en plastique, sourire sur les lèvres, demandaient l’aumône, avec un regard qui ne laissait personne indifférent. Et c’est entre deux arrêts, qu’elle décide de descendre, contente d’avoir pu gagner quelques dinars, peut-être pour acheter quelque chose de chaud, en ce samedi glacial.

Les contrôleurs à la chasse des sans-tickets… la galère

Toute infraction à une règle, a ses conséquences, et c’est ce qui semble échapper à ceux et celles qui même après avoir réussi à se faufiler, pour échapper aux contrôleurs, sur les quais, s’obstinent à refuser l’amende de 200 Da, au passage-surprise des agents de contrôle, à l’intérieur du Tramway. Il n’y a pas un jour qui passe sans que cette situation ne se présente, et en ce samedi, nous y étions, et ce n’était pas facile, pour ceux en charge de faire respecter la réglementation. Faisant semblant d’être en règle, en affichant, un ère insoucieux, à l’écoute «de contrôle» que lance les agents, un jeune, ne dépassant pas les 25 ans, son regard levé, au plafond de tramway, les écouteurs dans les oreilles, n’y échappe pas, sans ticket, à la demande des contrôleurs, il ne l’avait pas.

Tentant d’avancer un argumentaire, qui ne tenait pas la route, car, selon la réponse du contrôleur «il te faut un ticket, avant de monter, et là, je suis obligé de te demander de payer l’amende». Ce que le jeune refusa, avec instance, avant qu’il ne se rende compte de la situation «ridicule» dans laquelle il s’est mis et que tout le monde attendait de voir la fin de cette histoire. Alors qu’il aurait, dans la norme, déboursé 40 DA pour son déplacement, ce jeune a fini par payer les 200 DA de l’amende.

Le rendez-vous prisé des pickpockets !

Tel nous l’avons pu constater durant d’autres voyages à bord du tramway, les pickpockets continuent à sévir, en faisant semblant de monter, dans le tramway, ils profitent de ces quelques secondes, pour en faire des victimes, au moment des bousculades dont nous avons fait part plus haut. S’emparer d’un sac, d’un téléphone portable, d’un bijoux ou d’un portefeuille, c’est la chasse à laquelle se livrent des voleurs qui, souvent ne sont pas inquiétés, de voir leur sale besogne mise en échec par les citoyens ou certains policiers même, qui souvent, sont sur la route adjacente, au tramway, pour assurer la circulation des véhicules.

Un laisser-aller, encourageant ces pickpockets à développer des astuces plus subtiles, dans leurs agressions silencieuses. Leurs complices déclenchent un mouvement de panique et de foule, en stimulant des disputes ou en lançant des alertes «balak, balak, serrak(attention au voleur :NDLR)» pour qu’ils arrivent à en faire plus de victimes. La fin n’était pas heureuse pour un jeune homme, dont les poches étaient totalement vidées, ce dernier ne sait pas rendu compte de ce qui se pass’est, et le voleur lui a tout pris, en quelques secondes avant de quitter le tramway.

Mohamed Amrouni

Un autre sans ticket insulte, menace et agresse même un agent de contrôle du tram, sous les yeux, non loin, d’un policier!

De retour de Dergana, vers la Station des Fusillés, arrivé à l’arrêt de celle-ci, la , plus importante, à cette heure de la matinée, il était plus de 11h, nous assistons à une scène hallucinante. À notre descente, nous sommes directement confronté à une dispute entre un homme ne dépassant pas la cinquantaine, tentant de rejoindre le quai pour prendre le tramway un contrôleur qui l’interpelle, pour lui montrer le ticket d’accès. Refusant de s’y soumettre, en exhibant son ticket, il lance à l’agent de contrôle «je ne te montre rien» et avec l’insistance du contrôleur, à la surprise de tout le monde, le fraudeur bouscule, insulte, puis lance son poing à l’agent de contrôle, qui, lui, ne faisait que son travail.

La scène s’est déroulée, non loin, d’un policier en poste, debout sur la chaussée de la route de circulation de voitures que des citoyens ainsi que le contrôleur ont interpellé, pour qu’il face respecter l’ordre. Il n’en fut rien. Il s’est contenté de leur lancer « je ne suis pas apte à intervenir». Le contrôleur a pris son mal en patience, au moment où l’autre continuait à lui lancer des menaces «je reviendrais te faire ton compte», après avoir été interdit, en fin de compte, à accéder au quai pour prendre le Tramway. Il semble que les comportements d’incivismes ont encore, de beaux jours devant eux, et les citoyens et citoyennes révoltés contre cet état de fait, continueront à faire de la résistance, tantôt pour corriger et tantôt pour ne pas se laisser drainer, par le recul de nos valeurs dans la société.

M. A.