Le vote hier sur le projet de Constitution a mis l’Egypte sous tension. La veille, des heurts ont fait plusieurs blessés, notamment à Alexandrie, entre les partisans et opposants du président Morsi. Le référendum qui a divisé le pays risque d’hypothéquer l’avenir de l’Egypte, surtout que l’opposition a évoqué hier de nombreuses violations commises par les islamistes dans le but de faire passer la Constitution de la confrérie consacrant l’Islam comme unique référence des lois de la République.
En effet, quelle que soit l’issue, le référendum sur la Constitution va plutôt exacerber les tensions politiques et les divisions au sein de la société égyptienne, une société cosmopolite. Hier, les Egyptiens ont commencé à voter sur un projet de Constitution, mais timidement.
Une grande partie des juges avait refusé de superviser les opérations de vote de ce référendum qui se déroulera en deux temps, avec un deuxième jour de scrutin samedi prochain. La première phase d’hier concerne quelque 26 des 51 millions d’électeurs égyptiens.
Les bureaux de vote pourraient ouvrir également aujourd’hui pour permettre à tous les électeurs de s’exprimer, selon un membre de la commission supervisant le référendum, et les Egyptiens de l’étranger, qui ont commencé à voter mercredi, pourraient également bénéficier d’un délai supplémentaire.
Le président Mohamed Morsi figurait parmi les premiers électeurs à glisser son bulletin dans l’urne. Des images le montrant dans le bureau de vote et trempant son doigt dans l’encre, une procédure destinée à éviter qu’une même personne ne vote plusieurs fois, ont été diffusées à la télévision. L’opposition a appelé à voter «non» par la voix du Front de salut national (FSN), formé pour l’occasion.
«L’adoption d’un projet de Constitution qui divise et qui viole les libertés et valeurs universelles est un moyen infaillible d’institutionnaliser l’instabilité et le trouble», a écrit hier l’opposant politique et prix Nobel de la paix, Mohamed ElBaradeï, sur son compte Twitter.
Devant les bureaux de vote se trouvaient partisans et opposants du projet de Constitution.
«Les cheikhs nous ont dit de voter «oui». J’ai lu la Constitution et elle me plaît», raconte Adel Imam, un homme de 53 ans patientant dans la file d’attente d’un bureau de la banlieue du Caire. «Les pouvoirs du président sont moins importants qu’auparavant. Il ne peut être un dictateur».
«J’ai voté «oui» pour la stabilité, déclare de son côté Ahmed Abou Rabu, un commerçant de 39 ans. Je ne peux pas dire que tous les articles de la Constitution soient parfaits, mais je vote pour aller de l’avant. Je ne veux pas que les Egyptiens tournent en rond, perdus à jamais dans cette transition.»
Une Constitution non représentative
Les chrétiens, qui représentent environ 10% des 83 millions d’Egyptiens, craignent de leur côté que les islamistes ne rognent sur les libertés. «J’ai voté «non» par devoir patriotique. La Constitution ne représente pas tous les Égyptiens», explique Michael Nour, enseignant chrétien de 45 ans à Alexandrie. Les Frères musulmans semblent confiants dans l’adoption de cette nouvelle Constitution.
La confrérie semble miser sur la lassitude de la population face au chaos politique et économique persistant. La coalition des partis d’opposition accuse les Frères musulmans de vouloir passer en force sur un texte élaboré par une assemblée dominée par les islamistes. Les résultats officiels du référendum seront annoncés uniquement après le deuxième jour de vote, mais des tendances devraient rapidement émerger dans les prochaines heures.
A. Mohamed