La loi sur les violences faites aux femmes, adoptée il y a quelques mois par l’Assemblée populaire nationale, tarde à atterrir sur le bureau du Conseil de la nation. Face à cette situation, pour le moins insolite, plusieurs associations de femmes et des droits de l’Homme, militant dans différentes régions du pays, dont le réseau Wassila d’aide aux femmes et enfants victimes de violence, le Ciddef, Fard d’Oran, Afad d’Annaba, Initiatives de protection des droits des femmes de Tébessa, l’Association des femmes algériennes pour le développement, SOS Enfance en détresse de Tiaret et Afac Béjaïa, se sont concertées.
Elles ont surtout décidé de réagir car elles sont “très inquiètes” sur le silence installé après les oppositions qu’a rencontrées cette loi, lors des débats à l’APN, et parce qu’elles sont conscientes que “des milliers de victimes continuent d’être violentées tous les jours”. Cette coalition d’association organisera une conférence de presse, aujourd’hui, au siège de l’association Femmes en communication (FEC), à la maison de la presse Tahar-Djaout (Alger). Soumia Salhi, féministe et syndicaliste, que nous avons pu joindre, hier, au téléphone, a laissé entendre que le retard pris dans le traitement de cette loi ne saurait durer encore en raison “des souffrances des femmes victimes de violences”, en signalant que la démarche des associations est destinée à “faire bouger les choses”.
Les violences à l’égard des femmes, phénomène qui touche de nombreux pays dans le monde, sont de plus en plus dénoncées en Algérie, y compris par une partie des victimes. La présence des femmes dans l’espace public, à l’université, dans la Fonction publique et dans le secteur économique où elles sont nombreuses à occuper des postes qualifiés, a aidé à la prise de conscience des dégâts de ce fléau, et ce, d’autant que les violences faites aux femmes se sont parfois terminées par un handicap à vie ou par le décès de certaines d’entre elles. Mais, c’est également la mobilisation du mouvement associatif, de parlementaires et de citoyens qui a donné de la visibilité à ce phénomène de santé publique. À partir de là, la promulgation d’un texte de loi contre la violence envers des femmes s’imposait d’elle-même. À ce sujet, Mme Salhi a rappelé que pendant plusieurs années, les associations ont milité pour “une loi-cadre” sanctionnant toutes les formes de violences faites aux femmes, jusqu’à ce que les pouvoirs publics proposent ladite loi. “Nous avons refusé la clause du pardon, mais dans l’ensemble, le reste des dispositions de la loi est une première réponse positive à nos demandes”, a-t-elle encore indiqué. Pourtant, il a suffi de “quelques propos démagogiques (de députés, ndlr) pour faire hésiter le pouvoir” et bloquer la loi.
La militante féministe, membre de la coalition, a du mal à comprendre l’attitude de “ceux qui se proclament de la démocratie et des droits des femmes (qui) se sont cantonnés dans un silence sidéral”. Par calculs politiques ? “À part quelques voix féministes et quelques officiels, les traditionalistes étaient les seuls à parler, pour réclamer le droit de battre leur femme en 2015”, a-t-elle déclaré à Liberté.
H. A.