Meurtres, détentions arbitraires et actes de tortures contre les Sahraouis impunis. Le dernier rapport mondial 2010 du département d’Etat américain sur les droits de l’Homme épingle de nouveau le Maroc pour ses pratiques répressives à l’égard des populations du Sahara occidental et relève que le mandat de la Minurso continue d’être privé du mécanisme de surveillance de ces droits.
Le rapport du département d’Etat américain revient longuement sur l’assaut militaire lancé par les forces marocaines contre le camp sahraoui de Gdeim Izik en novembre qui a nécessité une session spéciale du Conseil de sécurité, suite à l’assaut donné par les forces marocaines contre ce camp, à l’aube du 8 novembre 2010, ainsi que la chasse à l’homme qui a été menée à travers les ruelles de la ville d’El Aâyoune occupée.
De nombreuses organisations internationales des droits de l’Homme avaient réagi rigoureusement contre l’assaut de ce camp, donnée par les forces d’occupation marocaines. L’Organisation mondiale contre la torture, l’Omct, qui constitue aujourd’hui la principale coalition internationale d’organisations non gouvernementales (ONG) luttant contre la torture, les exécutions sommaires, les disparitions forcées et tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant, a exprimé sa préoccupation quant au sort réservé aux centaines de Sahraouis arrêtés par les forces d’occupation marocaines.
L’exode massif à la loupe
L’Organisation mondiale contre la torture a plaidé pour que toute la lumière soit faite sur les véritables causes ayant provoqué l’exode massif des Sahraouis qui a donné naissance, durant le mois d’octobre 2010, au camp de Gdeim Izik.
Comme elle a rappelé que ce sont des tirs à balles réelles dont ont fait usage les forces de répression marocaines sur un véhicule, le 24 du même mois, qui ont entraîné la mort de Zoubir Najem El Garhi, âgé de 14 ans, et provoqué de graves blessures aux autres passagers. Le black-out imposé à la ville d’El Aâyoune par les autorités marocaines, l’interdiction faite aux journalistes et aux observateurs internationaux de se rendre dans la capitale du Sahara occidental sous occupation marocaine, figurent parmi les principaux griefs adressés aux autorités du royaume chérifien.
L’Omct «a appelé les autorités marocaines à garantir l’intégrité physique et psychologique des Sahraouis arrêtés, à faire cesser les abus, tortures et mauvais traitements infligés aux Sahraouis en détention et à leur garantir un jugement juste et équitable», a rapporté l’agence de presse officielle sahraouie SPS dans une dépêche datée du 20 novembre 2010. Citant à ce propos les rapports de l’Association marocaine des droits de l’Homme (AMDH) et de Human Rights Watch (HRW), le département d’Etat note que les forces marocaines avaient fait usage d’une «force excessive» pour démanteler ce camp, et que plusieurs maisons sahraouies avaient été attaquées à El Aâyoune et ajoute que les autorités marocaines ont empêché les journalistes marocains et internationaux de se rendre à El Aâyoune dans les jours qui ont précédé et suivi le démantèlement du camp, ce qui a rendu difficile l’obtention et la vérification des informations. Les autorités marocaines ont arrêté plus de 300 civils sahraouis après le démantèlement de ce camp, dont un grand nombre est encore en détention bien qu’aucune accusation formelle n’a été portée.
En outre, «un grand nombre de ceux qui ont été libérés et la plupart des familles de ceux qui sont encore en détention rapportent que les responsables de sécurité les ont battus et abusé d’eux, ce qui a été confirmé même par les ONG internationales et locales», souligne le rapport. Pour le département d’Etat, «des informations crédibles indiquent que les forces de sécurité marocaines avaient fait usage de tortures, de passages à tabac et d’autres mauvais traitements contre des détenus sahraouis». «Les organisations Human Rights Watch, Amnesty International et les ONG locales ont continué à signaler les abus, en particulier contre les défenseurs sahraouis de l’indépendance», a-t-il mentionné.
Menaces d’actes immoraux
Le département d’Etat a signalé qu’Amnesty international, l’Association sahraouie des victimes des violations des droits de l’Homme et d’autres ONG nationales avaient rapporté que, «dans de nombreux cas, des agents de sûreté avaient eu recours ou menacé les détenus d’actes immoraux». En outre, selon plusieurs ONG internationales et locales, «le nombre de plaintes déposées contre la police par les victimes sahraouies de violation des droits de l’Homme était en constante augmentation».
Les défenseurs internationaux et locaux des droits de l’Homme font souvent valoir que les tribunaux avaient souvent «refusé d’ordonner des examens médicaux, ou de considérer les résultats des examens médicaux en cas de torture des Sahraouis», a noté le département d’Etat. Sur ce point, le rapport cite le cas de 52 Sahraouis arrêtés par les forces marocaines suite au démantèlement du camp de Gdeim Izik qui avaient demandé, en vain, des examens médicaux afin de prouver les actes de tortures qui leur avaient été infligés par la police.
Par ailleurs, des étudiants sahraouis, ayant organisé des manifestations pour la cause du Sahara occidental, avaient été emprisonnés et maltraités, dont l’un deux, Mohamed Berkan, avait été défenestré dans un centre de police avant d’être condamné à 1 an de prison et à une amende, a ajouté le département d’Etat. Au cours de l’année 2010, «des informations crédibles indiquent que les autorités marocaines empêchaient certains journalistes de rencontrer les activistes sahraouis», insiste le rapport.
Le département d’Etat a relevé, en outre, que dans un discours prononcé en novembre dernier, «le roi Mohamed VI avait appelé à une politique ne tolérant plus les personnes qui expriment des opinions favorables à l’indépendance du Sahara occidental». En conséquence, souligne le rapport, «les individus et les médias marocains ont recouru à l’autocensure et aucune opinion n’a, depuis, paru dans les médias soutenant l’indépendance ou un référendum avec l’indépendance comme une des solutions»..
Par : Sadek Belhocine