Les soirées en ce mois de ramadan prennent de plus en plus de couleur dans la capitale. L’ambiance bat son plein et commence à donner lieu à une atmosphère festive.
Bab-El-Oued. L’appel à la rupture du jeûne et à la prière du Maghreb est attendu avec un mélange de soulagement et d’impatience. Certains se regroupent aux pieds des bâtiments pendant que d’autres, les femmes en particulier, se mettent aux balcons. Dès l’appel du muezzin, le vide s’installe. Quelques retardataires pressent le pas pour rejoindre leurs foyers. Déjà le cliquetis des cuillères se fait entendre.
Le quartier le plus peuplĂ© de la capitale ressemble Ă un dĂ©sert pendant presque une demi-heure. Les adeptes du cafĂ© «bien serré» sortent les premiers pour retrouver leur Ă©lixir. Petit Ă petit, le bruit reprend et la ville s’anime. «Les ouled el Houma» investissent le marchĂ© des Trois-Horloges et le «saha ftourek» se fait entendre de partout. A cette heure-ci, le marchĂ© est dominĂ© par les vendeurs des sucreries, des jus, appelĂ©s communĂ©ment charbet et des Compact-disc (CD) contrefaits. A quelques encablures du marchĂ©, les bambins ont investi la fontaine de l’EspĂ©rance inaugurĂ©e par le maire de Marseille et le wali d’Alger en 2010. Ils n’hĂ©sitent pas Ă plonger dans l’eau sale du bassin. Les adultes se contentent d’y poser les pieds pour se rafraĂ®chir. «Quand le ventre est plein, la tĂŞte chante», dit l’adage populaire. Cela se vĂ©rifie amplement au niveau de cette place : tout le monde discute sans … s’écouter, mais c’est comme ça, l’essentiel est de dĂ©gourdir … l’esprit.
L’esplanade adjacente au manège de la place d’El Kitani est investie par des jeunes qui jouent au football. «A chaque mois de ramadhan, nous organisons un tournoi inter quartiers», indique Redouane, l’un des organisateurs. Un peu plus loin, le manège attire beaucoup de familles. Le diktat des enfants fait la loi ! Les parents cèdent devant l’exigence de l’innocence.
LE BELGE ET LES HUMEURS RAMADHANESQUES
22h. A la place Emir Abdelkader, investissent la terrasse du Milk Bar pour y déguster des glaces. «Ramadhan en Algérie est tout simplement magnifique», dira un ami émigré rencontré sur les lieux. Son copain, un Belge, affiche sa stupeur devant ces changements de rythme.
«Tout le monde jeûne, les fast-foods, les restaurants sont fermés, les rues se vident aux heures où habituellement elles doivent être animées et puis à la fin de l’après-midi, les tables se dressent au profit de ceux qui n’ont nulle part où manger. Les Algériens vivent pendant la nuit durant tout un mois», résume-t-il. Côté commerce, ce n’est pas encore le rush. Les propriétaires de magasins et restaurants du centre s’attendent à beaucoup plus d’affluence dans les jours à venir, notamment la seconde quinzaine du mois, à l’approche de l’Aïd. « Il y aura beaucoup plus de gens durant les quinze derniers jours», souligne Mohamed gérant d’un salon de thé. Après la prière de Tarawih, la place Audin déborde de monde. Bouaziz presse le pas. Il doit rejoindre ses amis du quartier. «On s’installe la nuit avec des potes à côté de l’immeuble, on prend des thés et des cafés et on joue aux dominos», lance ce jeune habitant les hauteurs de rue Didouche-Mourad. Pour ce qui est de la sécurité, les familles disent qu’elles n’ont pas à se plaindre. Les agents de police veillent au grain.
Dans certains endroits de la ville, des marchands et même des supérettes ferment à des heures tardives de la nuit avant que tout le monde ne regagne enfin son foyer après une longue soirée de défoulement. Il est une heure du matin. Alger somnole enfin.