L’Algérie est d’ailleurs et toujours le second pays à incidence la plus élevée après la Somalie pour ce type de cancer. Ce sont ainsi 24 000 décès qui auraient pu être évités si le vaccin avait été introduit.
L’unité de recherche en sciences sociales et santé au sein du Groupe de recherche en anthropologie de la santé (Gras) d’Oran a saisi une nouvelle occasion de relancer le débat sur la prise en charge des malades atteints de cancer, en accueillant, hier matin, le professeur Kamel Bouzid, oncologue au centre Pierre et Marie Curie d’Alger (CPMC). Placée sous le thème “Cancer : état des lieux”, la conférence donnée par le professeur Bouzid a été l’occasion de dresser un tableau noir de la prise en charge des malades du cancer tant sur le plan des dysfonctionnements dans le système de santé que de l’absence de politique ou du moins de politiques de santé s’appuyant sur des données et des analyses fiables et globales. Déjà, Kamel Bouzid a tout récemment pointé du doigt ces graves défaillances dans la prise en charge des cancéreux, en évoquant l’insuffisance criante de centres de radiothérapie.
Aujourd’hui, les malades attendent 18 mois pour avoir un rendez-vous, une situation qui avait été aussi l’objet d’un coup de colère d’un autre oncologue, le professeur Louafi d’Oran, qui parlait l’année passée de scandale pour l’Algérie. Hier, lors de sa présentation, l’intervenant a évoqué une autre forme de scandale, cette fois-ci provoqué par l’archaïsme de certains arguments socioculturels. Il s’agit de la non-introduction dans le programme élargi de vaccination à l’échelle nationale du récent vaccin contre le cancer du col de l’utérus.
Pourtant, les pouvoirs publics avaient laissé entendre récemment qu’ils y étaient favorables, après avoir, dans un premier temps, justifié leur réticence par le coût trop élevé d’une dose de ce vaccin, soit 95 dollars. Et si l’on peut parler de scandale, c’est parce que ce type de cancer occupe la troisième place dans l’incidence des cancers dans notre pays. L’Algérie est d’ailleurs et toujours le second pays à incidence la plus élevée après la Somalie pour ce type de cancer. Ce sont ainsi 24 000 décès qui auraient pu être évités si le vaccin avait été introduit. Mais certaines considérations socioculturelles bloquent son introduction parce qu’en l’état, ce vaccin doit être administré à partir de l’âge de 11 ans et jusqu’à 16 ans, dira l’intervenant. En Algérie, 50% des femmes décèdent du cancer du col de l’utérus dans les 5 années après le diagnostic, soit une femme sur deux, ce qui est énorme en termes de mortalité. Les blocages sont ainsi très forts car cela fait référence à la sexualité, puisqu’il est admis que parmi les causes du cancer du col de l’utérus, l’on peut évoquer la multiplication des rapports sexuels et certaines infections sexuellement transmissibles. Des députés avaient avancé comme argument imparable que les jeunes filles en Algérie n’avaient de rapports sexuels que lors du mariage, en guise d’explication à ce refus.
D.