La production de l’usine algérienne ne représentera que 10% de la production marocaine
Après la matérialisation de son implantation, c’est au tour du coût et de la nature du projet de faire polémique.
Le projet de la construction d’une usine Renault en Algérie vient enfin de se concrétiser à la faveur de la visite du président français, François Hollande, en Algérie. Toutefois, malgré la matérialisation de ce projet qui a tant fait parler de lui, la polémique est toujours aussi vive. Les raisons? Coût et nature du projet.
En effet, les spécialistes dénoncent le coût faramineux de ce projet qui est le même que celui de l’usine Renault de Tanger, soit près d’un milliard d’euros. Or, la production de l’usine algérienne ne représentera que 10% de la production marocaine. «Pourquoi dès lors le même montant d’investissement que celui de Tanger?», s’interroge l’expert international et professeur en économie, le Dr. Abderahmane Mebtoul dans une contribution parue dans la presse nationale. Autre problématique soulevée par les experts, la nature du projet. L’usine ne sera finalement qu’une «unité de montage de kits importés de Roumanie et de Turquie», a expliqué vendredi le directeur pour la zone Euromed-Afrique du constructeur, Jean-Christophe Kugler. C’est au moment où la marque au Losange accroîtra sa cadence pour atteindre 75.000 unités par an, qu’elle passera alors à une production complète sur place, avec un atelier de tôlerie et de peinture.
Cependant, cette deuxième étape est tributaire de la réussite du projet. Pour le Dr Mebtoul, économiquement parlant, cette usine ne sera jamais rentable. «La capacité prévue de 75.000 unités par an est faible pour sa fiabilité économique, les normes internationales pour les voitures de moyenne gamme étant de 300.000 à 400.000 unités par an, ce qui alourdira l’amortissement pendant au moins quatre à cinq ans», a t-il expliqué dans la même contribution.
«Il ne sera jamais question que Renault supporte les surcoûts et produise les mêmes gammes qu’à Tanger, car en France existe une opposition et une transparence des comptes et que c’est la rentabilité économique qui doit primer», a-t-il assuré. «Pendant la période d’exonérations fiscales et d’avantages accordés par le gouvernement algérien via l’agence Andi, l’unité pourrait tenir face à ses concurrents», rapporte-t-il. «Mais aussitôt les avantages arrivés à terme, cette unité devra rembourser ses emprunts et payer ses charges fiscales et ce, dans le cadre de la règle 49/51%. A ce moment-là, l’unité ne peut être rentable avec une capacité si faible. A moins que l’Algérie supporte les surcoûts, mais trop importants par rapport au ratio capacité sur l’investissement annoncé», rétorque le Dr Mebtoul. «L’amortissement sera trop importants par rapport aux normes internationales», soutient-il. A quels coûts l’Algérie produira-t-elle cette voiture?
Le nombre d’emplois prévus fait également polémique.
Les pouvoirs publics ont annoncés la création de 8000 postes d’emplois directs et 20.000 autres indirects. Mais Renault ne parle pour le moment, que de «350 emplois directs»! Déjà, pour le nombre d’emplois annoncés par les pouvoirs publics, le Dr Mebtoul estime qu’il donnerait lieu à «des emplois rentes subventionnés par le Trésor public, rendant la compétitivité impossible». Cela à cause de la faiblesse de la productivité et le manque de rentabilité de cette usine Renault. Autre point qui fait mouche dans cette future usine de montage de voiture, est l’engagement du gouvernement algérien à ne pas autoriser d’autres constructeurs à s’installer en Algérie pendant une période de trois années. «Ce qui contredit les règles élémentaires de l’Accord que l’Algérie a signé avec l’Europe et surtout des perspectives d’adhésion à l’Organisation mondiale du commerce qui prohibent toute restriction au libre-échange», explique encore le Dr Mebtoul dans la même contribution. La polémique sur cette usine est donc de nouveau d’actualité. Les tergiversations liées à l’implantation de l’usine en Algérie avaient fait polémique. Désormais, ce sont les conditions d’implantation qui sont dans l’oeil du cyclone.
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