Un relèvement du taux de change du dinar algérien par rapport à l’euro et au dollar, tel que le souhaitent certains opérateurs économiques, serait un « cadeau empoisonné » aux entreprises industrielles locales qui peinent à résister à la concurrence des produits importés, a indiqué jeudi à Alger un conseiller à la Banque d’Algérie (BA).
« Si on apprécie le dinar, nous rendrons beaucoup moins chères les importations pour la revente en l’état, ce qui va concurrencer de manière féroce la production de nos entreprises locales… c’est tout simplement leur faire un cadeau empoisonné », a dit M. Djamel Benbelkacem sur les ondes de la Radio nationale.
Dans un pays qui n’est pas tout à fait performant sur le plan économique, comme l’Algérie, dit-il, où la production du textile locale, par exemple, a été divisée par 10 en vingt cinq ans, une surévaluation de la monnaie fera inonder le marché par les importations ce qui tuera le tissu industriel local, a-t-il averti.
Interrogé sur le lien existant entre la hausse des réserves de change et l’appréciation de la monnaie, il a souligné qu’aucune banque centrale au monde, y compris la banque chinoise, ne gère le taux de change en fonction des réserves de change.
La Chine, qui détient les plus grosses réserves de change dans le monde, avec plus de 3.200 milliards de dollars, remarque l’expert, continue à déprécier sa monnaie pour favoriser ses exportations et ses entreprises locales, « comment voulez-vous alors que l’Algérie, où la compétitivité de certaines filiales est en déclin, surévalue sa monnaie? », s’est-il interrogé.
La Banque d’Algérie « n’est pas sur une île isolée. Elle gère le taux de change du dinar conformément à une approche professionnelle commune dans toutes les banques centrales du monde », a-t-il rappelé.
A fin 2011, une légère dépréciation du dinar, « routinière » selon la BA, avait provoqué l’ire de certains opérateurs économiques qui ont évoqué une « dévaluation en catimini » et manifesté leurs craintes de voir les prix de leurs importations de matières premières augmenter en raison de la baisse du cours du dinar par rapport à l’euro.
Selon M. Benbelkacem, « on ne parle de dévaluation que lorsque le taux de change est fixe, c’est-à-dire, qu’il ne varie pas ni dans la journée, ni dans la semaine, ni dans le mois à l’exemple de la monnaie chinoise », a-t-il précisé. Or, le dinar est soumis au régime de « flottement dirigé », ce qui veut dire que sa valeur change au moins cinq fois par jour sur le marché interbancaire de changes. La gestion du taux de change vise l’alignement du cours « nominal » du dinar sur le taux de change « réel ». Ce dernier est en fait le « taux qui permet de préserver la compétitivité de notre économie », explique l’expert.
Selon ce conseiller, plus l’économie est performante, plus les salaires sont importants et plus la monnaie est forte. « C’est la performance de l’économie qui fait la valeur réelle de sa monnaie », a-t-il soutenu. Et d’ajouter « le taux de change n’est pas un simple prix comme le prix de la tomate, c’est une variable macroéconomique qui reflète les performances d’un pays »