«La médiation judiciaire doit être une alternative à la justice» ont fait remarquer les experts.
La médiation judiciaire qui demeure très timide en Algérie a été passée au crible hier, lors d’un séminaire organisé à l’hôtel Sheraton sous la conduite du président de l’Association nationale des médiateurs judiciaires, Ali Boukhalkhal. Des médiateurs judiciaires sont venus des quatre coins du pays pour assister à ce séminaire organisé en coordination avec le ministère de la Justice et l’aide de l’Union européenne et la participation des experts européens. Il a été question, pour la première fois en Algérie de la «médiation judiciaire» et le constat a été sans appel: aujourd’hui, la majorité des citoyens recourent plus à la justice qu’à la médiation. Ce qu’il faut savoir, c’est que la médiation c’est un terme large. On peut distinguer dans la médiation trois créneaux: le créneau de la médiation judiciaire, celui de la médiation conventionnelle et enfin le créneau de la médiation pénale. Pour la médiation conventionnelle, «il faut un code de déontologie du médiateur. Un code qui organise la médiation de manière générale là ou on peut limiter le rôle du médiateur. Il faut aussi la formation du médiateur pour qu’il soit au courant et qu’il marche avec le processus. C’est ainsi que nous pouvons aller à la médiation complète et c’est notre but à l’avenir», a expliqué M. Ali Boukhalkhal. S’agissant de la médiation judiciaire, «elle est conforme à la loi. Le Code de procédure civile et le décret exécutif sont en marche. C’est une médiation qui est sous le contrôle de magistrats compétents», note M. Boukhelkhal rassurant que «la médiation pénale viendra. Il s’agit là d’une médiation qui est sous le contrôle du procureur de la République, donc, on ne craint aucunement à ce qu’il y ait des dépassements». Il reste la médiation conventionnelle qui, avant de l’exercer, «il va falloir des lois et des textes au préalable et c’est un de nos projets», a encore souligné le président de l’Association nationale des médiateurs judiciaires. Dario Quintavalle, expert judiciaire auprès du ministère de la Justice italienne, constate «des efforts très consistants de l’Algérie dans le cadre juridique». Cet expert estime que l’Algérie est très avancée dans ce domaine. «Nous commençons avec la médiation civile, c’est-à-dire, la loi qui établit l’obligation de la médiation civile pour certains cas. Il y a plusieurs façons de résoudre les litiges. Chaque pays a son approche, on ne peut comparer l’Algérie à d’autre standards européens. Chaque pays a ses expériences. Nous sommes ici pour les échanger, de faire suivre certains exemples. Le but est de stimuler des idées dans l’expérience de l’Algérie dans le domaine de la médiation» a indiqué l’expert italien. A titre d’exemple, la médiation au niveau de la famille, aujourd’hui, «il y a des mesures de conciliations concernant des questions personnelles. Pour cela, il y a des bureaux au niveau des inspections du travail au niveau national», a fait savoir le représentant du ministère de la Justice.
De l’avis de nombreux participants, la médiation «doit s’étendre sur l’ensemble des litiges que connaît la société algérienne, compte tenu de sa complexité».
Actuellement, «nous allons valoriser ce que nous avons, et à travers notre expérience, nous apportons des idées novatrices», soutiennent-ils. Dans cette perspective justement, il y a un projet pour que la médiation soit intégrée dans le domaine pénal. «Les questions et les affaires qui ne sont pas graves sur la législation ou le dispositif judiciaire à l’instar de certains délits relatifs au voisinage, la médiation demeure la meilleure manière qui va inculquer la paix dans la société», a soutenu ce représentant du ministère de la Justice. Parlant de la déontologie, il dira: «Actuellement, il y a deux projets soumis au ministère de la justice, soit le guide du médiateur et qui comporte l’éthique de médiation judiciaire», a-t-il soutenu en précisant que c’est aux médiateurs de l’enrichir. Ce représentant n’a pas passé sous silence la question de manque de communication quant à la médiation, car selon lui, «il est plus que temps que la presse contribue à vulgariser cette mission».
«On ne va pas procéder à l’importation de lois, mais nous devons valoriser nos initiatives. L’important est la réussite de la médiation, chose qui ne serait possible sans l’entraide des différentes parties», a-t-il conclu. Il est fait appel, par ailleurs, au ministère des Affaires religieuses pour instruire les imams de traiter de la médiation lors des prières du vendredi. Ce que demandent les médiateurs, «c’est que les magistrats doivent soumettre la médiation aux plaignants avec plus d’importance et ce qui ne fera que donner plus d’ampleur à la médiation», a insisté pour sa part, Hlimi Khediri, président des médiateurs de la wilaya de Tébessa. Aujourd’hui, en somme, «la médiation judiciaire doit être une alternative à la justice. Recourir directement à cette dernière a entraîné la détérioration de la société», explique-t-il. Le système judiciaire, en effet, connaît un climat étouffant, ce qui empêche la justice d’accomplir sa mission correctement.