C’est le branle-bas de combat chez les citoyens
Approvisionnement en denrées alimentaires, gaz butane, bougies et bois pour affronter de nouvelles tempêtes.
Les services de la météorologie ont annoncé une nouvelle vague de neige pour ces jours-ci dans les wilayas du Centre et de l’Est dont l’altitude dépasse les 700 mètres. Cette annonce est «accueillie» avec beaucoup de crainte par les citoyens de ces régions qui ont déjà fait «l’épreuve dangereuse» des intempéries des derniers dix jours.
«A peine, venons-nous de sortir d’un cauchemar qui a duré plus de 10 jours qu’un autre nous est annoncé, ça fait peur», s’inquiète Farid, un citoyen de la région de Aïn El Hammam, dans la wilaya de Tizi Ouzou, qui culmine à plus de 1100 mètres d’altitude.
Dans les régions montagneuses reculées, les citoyens s’arment de patience pour affronter cette «révolution de la nature» en revenant aux réflexes des bons vieux temps qui précèdent la saison de l’hiver.
Car, si les pouvoirs publics n’ont pas retenu la leçon des dernières intempéries, les citoyens semblent avoir appris beaucoup de choses.
Et la première, c’est de ne plus compter sur l’Etat qui les a abandonnés durant la dernière vague de neige et de froid qui se sont abattus sur les wilayas du nord et de l’est du pays. Dans ces régions, les citoyens sont en «guerre» pour parer à toute éventualité. Ils s’approvisionnent en denrées alimentaires et en gaz butane; ils ramassent du bois pour se chauffer et contourner l’injustice qui fait que dans le pays du gaz, des Algériens meurent de froid; ils se préparent en outre à des campagnes de solidarité. Et pour se prémunir contre le coupures d’électricité, ils achètent des bougies.
C’est dire que la leçon est bien retenue et les gens ne veulent plus revivre les journées infernales de cette dernière semaine lorsque des villages entiers, oubliés par le pouvoir, étaient livrés à eux-mêmes et aux aléas de Dame Nature.
«On a appris la leçon. Je me prépare en m’approvisionnant en gaz butane, en produits alimentaires et ‘isgharen » (le bois)», souligne Arezki Z., citoyen de la commune de Frikat.
Notre interlocuteur a ajouté que les villageois doivent anticiper et se préparer à l’avance car «si les routes sont bloquées par la neige, il sera difficile de s’approvisionner». Son frère Mustapha, enseignant de son état, plaide pour venir en aide aux nécessiteux à l’avance «sinon, dit-il, tout geste qui viendra après sera assimilé à celui d’une campagne électorale». Pour conforter son propos, il cite cet adage: «Ussu qbel nadam» qui veut dire «le lit avant le sommeil».
Dans les villages, c’est donc le branle-bas de combat chez les citoyens. Dans le village d’Ath Boumaza (Frikat) qui est perché à plus de 1000 mètres d’altitude, les habitants se préparent tant bien que mal à affronter une nouvelle «rage» climatique.
La semaine dernière, ce village a été carrément coupé du monde, ne donnant aucun signe de vie pendant trois jours. Une campagne a été menée à travers les réseaux sociaux et la presse pour alerter les autorités sur ce cas. L’alerte, par la voie d’un député, a atterri même dans les bureaux du ministère de l’Intérieur.
A présent, les habitants ne veulent pas revivre la même situation. Les membres du comité de village se sont réunis et se sont engagés pour des campagnes de solidarité et d’entraide en cas de besoin.
«Si d’autres quantités de neige s’abattent sur cette région, on craint la catastrophe surtout que la neige, sous le verglas qui retarde le processus, n’a pas encore fondu», note Arezki Z.
Les autorités algériennes doivent apprendre des citoyens qui se solidarisent entre eux au lieu de continuer à les diviser pour mieux les contrôler. Ceux qui ont les moyens pensent à ceux qui n’en ont pas. «On a le gaz de ville, mais on pense aux autres qui ne sont pas raccordés», souligne Mohamed, enseignant.
Les citoyens promettent de mener la vie dure aux autorités après le passage de la tempête à cause des injustices qu’elles font subir à ce peuple. Ils n’arrivent pas à s’expliquer que des Algériens profitent d’une richesse nationale qui est le gaz naturel alors que d’autres en sont privés et souffrent de l’exclusion, de la marginalisation et de la politique du deux poids, deux mesures.
En attendant, les Algériens continuent à s’approvisionner en bois pour affronter les nouvelles intempéries annoncées. Savent-ils au moins de quel bois se chauffer?