Les quatre heures passées à l’intérieur de cette usine nous ont beaucoup appris sur le travail de recherche et de fabrication du médicament chez Merinel. Le process, de prime abord compliqué, se décline au courant de la chaîne de fabrication pour se matérialiser dans la mise en boîte à la fin du processus. Avec l’aimable collaboration de l’association nationale des opérateurs de la pharmacie (Unop), nous avons pu suivre la chaîne de production en temps réel.
14h, le transporteur de Merinal arrive afin de nous conduire jusqu’au laboratoire, comme convenu avec l’Unop. L’ambiance était agréable pour une journée de mois de juin déjà caniculaire. 30 minutes après, nous voila arrivés dans la zone industrielle d’Oued Semmar, au Sud d’Alger, où se concentrent plusieurs autres industries nationales.
Le mini bus qui nous sert de transport fonce tout droit sur une piste, difficilement praticable menant vers le laboratoire, Pendant presque 10 minutes, nous avons été secoués par ce chemin serpenté et truffé de nids de poules avant d’apercevoir au loin, un panneau peu visible, de couleur blanche et verte, indiquant le laboratoire.
Il était 14h 46 quand deux agents nous accueillent à la réception du laboratoire, les procédures d’identification effectuées, un pharmacien directeur technique du laboratoire M. Lacheheb, nous fait entrer et conduit à la salle d’attente et informe la direction de notre arrivée.
Quelques minutes plus tard, il nous prie de laisser nos affaires (accessoires, bijoux, montres et téléphones) dans son bureau situé dans l’aile administrative où régnait un calme religieux. A l’entrée de la salle, appelée « la zone propre », nous avons suivis d’autres consignes, cette fois de la responsable de contrôle qualité. Cette dernière nous explique la tenue à suivre : obligation de port de la blouse, des couvre-chaussures, une charlotte sur la tête et un masque, un accoutrement obligatoire pour une zone stérile et dont les normes d’hygiène et de sécurité sont sévères.
C’est la pièce intermédiaire car, donnant directement accès au laboratoire. Une ligne rouge tracée au sol indique au visiteur et à toute personne entrant dans cet espace l’entrée officielle au laboratoire. La première sensation était de fraicheur. Cette zone filtre l’air par le moyen de cinq filtres sensés protéger la zone sensible de fabrication du médicament de toute contamination et agression externes.
Le règlement est strict. L’uniforme et la désinfection sont obligatoires. « Tout le monde doit s’appliquer aux normes et au respect de la réglementation », nous explique le pharmacien directeur technique qui s’arrête sur chaque détail et répond à nos questions. De visu, le matériel est neuf et porte la griffe allemande
1 à 2 cas par an de non-conformité de la matière première
Notre expédition dans le monde des molécules a commencé. La première étape indispensable est le processus de contrôle de la matière première importée. Ainsi les salles de conditionnement primaire et secondaire étaient les premières visitées à l’intérieure de l’usine. C’est dans cette salle située au fond d’un couloir peu éclairé, sûrement, par précaution, que les récipients contenant la matière première sont stockés. Nous n’avons pas été autorisés à y accéder par prévention car c’est une salle réservée, uniquement, aux personnels de la fabrication et contrôleurs. Toutes les matières premières servant à fabriquer les médicaments ayant déjà obtenu leur enregistrement sont combinés dans cette pièce étroite.
Selon M. Lacheheb, « tous ces lots de matière première stockés ont été d’abord enregistrés auprès du ministère de la santé sinon il ne peuvent être validés ». La catégorisation des lots de la matière première se fait en collaboration entre les magasiniers de la matière première et les spécialistes de la fabrication du médicament. Ces derniers vérifient l’authenticité de la marchandise par rapport aux exigences de leur demande. Ils impriment l’étiquetage sur lesquels figurent la signalisation des composantes, la provenance et le nom du laboratoire et ainsi sont vérifiées les quantités livrées à la demande. Après la vérification et la certification des normes, le laboratoire valide l’utilisation de la matière première.
Une opération obligatoire et systématique pour chaque lot. A la question de savoir le nombre de contrôles effectués, notre interlocuteur nous a précisé que « la matière première n’est jamais contrôlée par le laboratoire national dont la principale mission est de contrôler le produit fini ainsi que de valider les opérations de contrôle qualité qu’effectue de laboratoire Merinal afin de nous permettre de procéder à réaliser nos propres analyses de la matière première et du produit fini. Chaque produit importé est accompagné toutefois d’un certificat d’analyse exigé par l’acquéreur et par le législateur ».
Le fournisseur doit répondre à ces exigences. Chaque produit réceptionné subit un autre contrôle au niveau de Merinal afin de vérifier sa conformité avec les normes exigées. En cas de non-conformité, le produit fera objet d’une investigation pour détecter l’anomalie et à quel niveau il a été affecté. Pour le directeur technique, ce type d’incident arrive rarement et, au cas où, il est dû à la lenteur des procédures administratives avant sa réception.
D’ailleurs même, la raison d’une éventuelle anomalie peut être détectée avec un outil spécial, appelé « le Mouchard » utilisé en vue de vérifier la température durant son acheminement ainsi savoir si le produit est envoyé dans les conditions d’entreposage requis. Par ailleurs, en cas de confirmation d’une défaillance, le laboratoire saisit son fournisseur et l’informe du problème. Après expertise, un rapport est rédigé et le produit renvoyé. Le fabriquant, dans ce cas de figure, est remboursé en fonction du contrat conclu à l’approvisionnement et la fourniture des produits. Merinal, d’après notre guide, s’est confronté à ce type de problème une à deux fois par an. Cela arrive rarement et généralement dû à changement de la température lors des longues procédures des opérations de dédouanement vu que le produit a une durée de vie limitée.
La traçabilité d’un médicament c’est important
Nous avons enchaîné notre visite, selon l’ordre des choses, dans la salle de Pesage et mélange, C’est là ou l’on procède au pesage et au mélange du produit initial. Pour la traçabilité de chaque produit, le laboratoire enregistre dans un dossier de lot de fabrication toutes les opérations, après qu’elles soient validées par la responsable de production et la responsable d’assurance qualité.
Un dossier est préparé à cet effet, on y consigne le dosage, le nom de fournisseur, le code interne, le numéro de lot et la vérification des vides Ce processus de vérification et du nettoyage complet des vides est primordial pour chaque lot de différentes composantes, notamment, tandis que pour la même catégorie de produit, un nettoyage partiel peut suffire. Cette technique vise à minimiser l’apport de la poussière et signaler avec une étiquette chaque opération de nettoyage. Chaque lot fabriqué a son propre dossier. Par exemple, il ne faut pas qu’il y ait un microgramme dans un espace de 25cm² par chaque étape. Une manière d’éviter un cas de contamination entre le produit A et B.
« A titre d’exemple, pour le principe actif du produit de la vitamine C, nous nous référons à ses précédentes sensibilités et nous effectuons des essais en les laissant se reposer pendant, trois, quatre, cinq jours avec des contrôles réguliers et quotidiens en vue de détecter l’existence d’une altération », explique M. Lacheheb. Si le produit manifeste au bout de quatre jours une altération, nous déduisons qu’il doit être conditionné trois jours avant le remplissage. Si le produit n’est pas rempli dans les lots ou boîtes au bout de quatre jours, il doit être classé en catégorie de non-conformité. Des problèmes qui arrivent en raison de panne de machines.
120 boites en moyenne par minute
Nous avons compris que l’opération de Pesée est, également, très importante car elle définit la mesure. Après les pesées et les mesures, vient l’opération du mélange. Le premier mélange se fait de manière manuelle. Une opération reproduite pour chaque lot avant le mélange final. Dans cette étape, le produit peut être introduit sur une feuille de 1 millimètre dans une benne de 800 litres. La machine peut contenir 350kg, équivalent de 800 litres. Pour obtenir un bon mélange, il faut avoir un espace entre 25-80% de vide, également avoir 75% du volume occupé par la poudre. Une mesure importante étant donné que la quantité du lot y est incluse. Quant à la date du mélange, elle varie selon le produit.
Après l’opération du pesage, le produit sera conduit dans la salle de la granulation humide où il est mélangé sec. Après qu’il soit malaxé, constituant une pâte, il est calibré avec un calibreur humide, une deuxième fois, par un calibreur séché ensuite il est acheminé vers un autre mélangeur. Tout est contrôlé par un automate. Quand le produit est de couleur différente, il subit un état de pelliculage, comme pour les dragées. Le producteur Merinal ne fait pas de médicament au goût sucré. Le poids d’un comprimé peut être de 100 mlg et on rajoute 5 mlg du pelliculage. Ce dernier a plusieurs rôles, soit pour donner une couleur pour aspect marketing soit pour différencier un produit du même diamètre, également pour distinguer les médicaments lors du conditionnement. Le pelliculage ne concerne que les comprimés.
Une fois le mélange finalisé, le produit sera transporté dans la salle de l’ensacheuse pour la mise en sachet des comprimés. C’est l’opération précédant la mise en boîte du produit.
Par ailleurs, il y a une salle obscure où se fabriquent les médicaments sensibles à la lumière, comme l’Omeprazole. Dans une autre salle, se fait la mise en gélules répondant à des conditions définies. Les machines peuvent fabriquer jusqu’à 120 à 400 boîtes par minute.
Samira Bourbia (L’Éco n°96, du 16 au 30 septembre 2014)