Le Pr Ammar Khodja
Les conséquences psychologiques de la maladie sont importantes notamment la peur du regard de l’autre et la perte de confiance en soi.
En Algérie, le psoriasis est une maladie vraiment méconnue du grand public et mal prise en charge. C’est ce qu’a affirmé, hier, le Pr Ammar Khodja, du CHU Mustapha Bacha, membre du réseau international du psoriasis, lors de la conférence de presse qu’il a animée, à Alger, à l’occasion de la Journée mondiale du psoriasis qui coïncide avec le 29 octobre de chaque année. Faisant un état des lieux en Algérie en matière de psoriasis, le Pr. Ammar Khodja a regretté le fait que notre pays accuse un très grand retard en termes de prise en charge de cette maladie chronique reconnue par la Cnas mais sans qu’une grande partie des médicaments essentiels ne soit remboursable. Il a fait savoir que la première et la seule étude pour établir un profil épidémiologique et clinique des patients atteints par cette maladie ne date que de 2012. Cette étude a montré que la prévalence du psoriasis en Algérie est estimée entre 10 et 26/ 1000, soit 2 à 3% de la population algérienne des deux sexes. 30% des cas sont des enfants. Au total, 7% des cas sont graves, soit 35.000. C’est donc près d’un million d’Algériens qui sont touchés par cette maladie et plus de 125 millions dans le monde.
Aussi, cette étude a fait apparaître qu’un pourcentage très important de patients psoriasiques ne sont ni diagnostiqués ni pris en charge par les médecins, et ce, malgré la disponibilité des traitements permettant de réduire la fréquence des poussées et leur intensité.
De ce fait, les préoccupations actuelles vont vers la reconnaissance de cette maladie comme affection de longue durée. Ce qui permet aux patients d’avoir un accès plus facile à tout l’arsenal thérapeutique disponible et à l’évaluation de leur qualité de vie pour une meilleure prise en charge.
Le même professeur a assuré que grâce aux connaissances acquises sur le plan scientifique ainsi qu’à une meilleure compréhension de l’impact sur la vie des patients, cette maladie a beaucoup évolué. Il faut donc se traiter immédiatement pour faire progresser la prise en charge de cette maladie invalidante.
Les experts assurent que 80% des patients psoriaiques sont redevables d’un traitement typique, c’est-à-dire des traitements médicaux locaux comme les pommades dont certains présentent peu de risque au long cours si on respecte bien les règles de leur prescription contrairement aux traitements systématiques.
Les conséquences psychologiques de cette maladie sont importantes notamment la peur du regard et la perte de confiance en soi. Selon les plus récentes statistiques, environ 11% des patients sont sujets aux dépressions. Ce qui fait que les personnes atteintes vivent une véritable souffrance psychique conduisant à un comportement d’évitement à l’égard de leurs proches. Le Pr. Ammar Khodja a bien affirmé que le stress est un facteur favorisant mais qu’il n’est pas à l’origine de la maladie. Certes, le psoriasis est un handicap majeur surtout qu’il est un facteur de discrimination à l’embauche et d’exclusion sociale. Ce qui nécessite ainsi une prise en charge multidisciplinaire: médicale, psychologique et sociétale.
Cette journée est une occasion pour mieux faire connaître cette maladie inflammatoire de la peau qui entraîne des souffrances psychologiques importantes. Pour ceux qui ne le connaissent pas, le psoriasis est une maladie inflammatoire caractérisée généralement par l’apparition d’épaisses plaques de peau se détachant sous forme d’écailles blanches. Elle touche pratiquement tout le corps, notamment les coudes, les genoux, le bas du dos, le cuir chevelu, les pieds, les ongles et les plis qui restent les endroits les plus souvent touchés. Elle n’est pas une maladie contagieuse, ni un problème d’hygiène, mais une maladie due à un dysfonctionnement immunitaire. Il suffit d’adopter une stratégie à long terme pour la soigner, sachant qu’elle est une maladie chronique qui ne tue pas.
Evoquant le rôle des associations de malades, le Pr. Ammar Khodja souligne que l’Algérie accuse un retard important dans ce sens. Ces associations doivent être exclusivement constituées de malades où aucun médecin ne doit figurer dans le staff, précise-t-il.