Soraya Kinane, celle qui, dans les années 1980, a bercé le public par sa belle voix de rossignol, cette voix qui, jusqu’à maintenant, résonne tel un refrain mélodique dans nos oreilles, s’est éteinte la semaine dernière en Espagne.
Une fois encore, une voix emblématique de la chanson algérienne s’est tue. Et ce qui est regrettable, c’est que sa disparition est passée inaperçue dans les médias algériens.
Celle qui s’est consacrée à la musique algérienne en la renouvelant par des mélodies modernes et harmonieuses a quitté ce monde dans le silence, parce que c’est dans le silence et dans la discrétion qu’elle luttait contre le cancer mammaire qui la rongeait petit à petit, depuis plusieurs années. Soraya Kinane nous a donc quittés à l’âge de 55 ans, à l’hôpital de la petite ville de Dénia, dans la région d’Alicante, en Espagne. L’artiste résidait depuis plusieurs années en Espagne, où elle animait de nombreux galas et soirées, notamment avec l’Association algérienne de Valencia qui l’avait sollicitée maintes fois pour célébrer les fêtes nationales algériennes. Très appréciée par la communauté algérienne résidant en Espagne, la chanteuse oranaise comptait un public fidèle et une audience très appréciable. Soraya Kinane, qui s’inscrivait dans la pure chanson populaire oranaise, possédait une voix qui fait toute sa particularité, à la fois aiguë et puissante. Dès sa première apparition télévisée, elle a su marquer son passage. Désormais, elle avait son public et pouvait compter sur lui. Un public connaisseur qu’elle avait séduit et tenait toujours en haleine grâce à un dense répertoire des plus représentatifs de la chanson oranaise. Avant d’émigrer en terre ibérique, elle se produisait souvent à la Télévision algérienne et animait des soirées dans plusieurs villes du pays, particulièrement dans la capitale de l’Ouest.
Sa voix très expressive, son interprétation et sa diction en font sans doute la dernière chanteuse oranaise, après la mort de Sabah Es-Saghira, inspirée par les artistes comme Blaoui Houari et Ahmed Wahbi. Soraya qui, par son répertoire inspiré des plus grands poètes populaires de l’Ouest algérien, continue même aujourd’hui d’inspirer les nouvelles générations d’artistes, savait mêler poésie populaire et touches musicales modernes. Elle avait réussi le pari d’imposer sa propre conception de la chanson oranaise moderne. Plusieurs de ses titres qui avaient remporté un vif succès auprès du public en sont des témoins évidents. Soraya Kinane a quitté la scène, celle de l’art et celle de la vie, un peu sur la pointe des pieds. Elle tire sa révérence et laisse en héritage pour les générations futures un répertoire et des souvenirs d’une artiste dévouée à la culture algérienne.
-Soraya Kinane a vu le jour le 1er janvier 1958 à Mostaganem, ou elle vécut une enfance heureuse. S’ensuivit un passage plutôt prometteur dans les études qui, pourtant, a été interrompu par une incroyable envie de chanter. En 1979, Soraya tente le tout pour le tout et participe à l’émission «Alhan wa chabab» avec une reprise du grand Rabah Driassa Habit n’toub.Très soutenue et encouragée par son époux, Rostan Ben Ali, lui-même musicien, la chanteuse démarre d’abord dans une chorale, pour travailler sa voix. Puis, elle participe à des galas ainsi qu’à des tournées en compagnie de plusieurs artistes. Une expérience qui lui a permis de passer au niveau supérieur pour devenir chanteuse à son tour. Naissance, en 1986, d’un produit intitulé Zine Zine qui l’a propulsée au devant de la scène. Les albums commencent alors à pleuvoir, de tubes en succès dont 7 duos avec le défunt Hasni, entre autres D’lamet alia, Waâlach ya aïnia, Sebar dak hadha. Après la mort du chanteur, Soraya Kinane a rendu hommage à ce dernier en reprenant quelques-uns de ses titres dans ses albums «rebaptisés» avec ses propres paroles, dont Lamima.En 1990, ce fut la rencontre avec Rachid et Fethi et le titre Nar el-hamra né une année plus tard en duo avec cheb Anouar qui recommence en chantant avec elle dans Bir Zemzem et Djani téléphone. Depuis plusieurs années, Soraya Kinane s’était établie en Espagne et se produisait devant un public, aussi bien algérien qu’espagnol, féru de chanson algérienne.
Yacine Idjer