Dans l’aréopage de chefs d’État, de gouvernement ou de ministres, il en est qui sont loin d’être des parangons en matière de lutte contre le terrorisme et l’islamisme radical.
“La grande marche républicaine” en France, dimanche, vaut-elle engagement de l’ensemble des États participants à s’arrimer à des synergies internationales en matière de lutte contre le terrorisme ? C’est sur cette question que d’aucuns se sont réveillés, une fois passée l’intense émotion de cette journée à nulle autre pareille.
Dès hier, les coulisses de ce grand événement ont commencé à livrer quelques-uns de leurs secrets. Des faits révélés par plusieurs médias et qui attestent de ce que la quête de dividendes politiques propres a trahi chez certains une solidarité feinte. On aura ainsi appris que le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, et le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, n’ont pas débarqué à Paris dans un élan de solidarité spontané.
Chef du Likoud, le Premier ministre israélien s’est imposé à la grande marche républicaine, à laquelle il ne devait pas prendre part, dès qu’il a su que deux ministres israéliens, ceux des Affaires étrangères et de l’Économie, Avigor Lieberman et Naftali Bennet, qui conduisent deux listes rivales à la sienne pour les législatives anticipées de mars prochain, avaient décidé de participer. Le président de l’Autorité palestinienne a été, lui, invité en dernière minute pour que “la neutralité” française soit sauve.
Enfin, en apparence, du moins. Les déplacements à Paris de Netanyahu et d’Abbas ont procédé de toute autre chose que la volonté d’appuyer activement une éventuelle nouvelle politique antiterroriste européenne ou internationale. La même remarque pourrait être faite au sujet de plusieurs autres participants à la grande marche de Paris.
Dans l’aréopage de chefs d’État, de gouvernement ou de ministres, il en est qui sont loin d’être des parangons en matière de lutte contre le terrorisme et l’islamisme radical. En effet, ce n’est pas parce que l’émirat du Qatar a dépêché un représentant à Paris qu’il se place forcément sur la même ligne de front que les États engagés dans la lutte antiterroriste.
C’est même dans une attitude contraire que s’affiche le petit émirat, coupable, aux yeux de nombreux États, de financer les extrémistes islamistes et d’attiser le brasier de la “fitna” là où il lui est possible de le faire. Faut-il rappeler que c’est sur la chaîne Al-Jazeera que sévit le prêcheur incendiaire Al-Qaradaoui qui ne se retient pas d’appeler à l’exécution de personnalités qu’il juge d’apostasie et tout simplement de tyrannie, comme il l’a fait à l’encontre de Kadhafi ? L’attitude vis-à-vis du terrorisme de l’émirat voisin, l’Arabie saoudite, est également ambiguë.
Exportateur net du wahhabisme, une doctrine salafiste, l’Arabie saoudite ne peut être cataloguée comme un royaume porté sur la lutte contre le terrorisme. Cela même si, en 2001, le royaume a financé l’effort de guerre américain en Afghanistan, une action soutenue, on s’en souvient, par la coalition internationale de lutte contre le terrorisme.
L’Arabie saoudite et le Qatar d’ailleurs sont, par ailleurs, loin d’être des États respectueux des libertés de la presse, cet idéal incarné par le ton provocateur et irrévérencieux de la rédaction de Charlie Hebdo décimée lors de l’attentat terroriste de mercredi dernier.
Faire donc partie de la marée humaine qui a déferlé de République à Nation sous le hashtag “Je suis Charlie” ne signifie pas nécessairement
un engagement pour les libertés de la presse.
On sait ce qu’il en est de cette liberté dans de nombreux pays qui ont délégué un représentant à la marche de Paris. La grande marche de la République pourrait donc n’être prolongée que par le seul engagement européen, voire occidental, à lutter contre le terrorisme. L’Europe a d’ailleurs enclenché déjà une dynamique de renforcement des mesures de prévention et de lutte contre un phénomène qui s’est incrusté au cœur du Vieux continent.
S. A. I