La solution du désespoir
Ignorant les multiples dangers qui les guettent, 19 candidats au suicide ont été interceptés par les gardes-côtes alors qu’ils s’apprêtaient à rejoindre la rive Nord de la Méditerranée…
Inconscient du danger auquel ils s’exposent, des harraga frôlent chaque jour la mort pour tenter de rejoindre l’Europe à bord d’embarcations de fortune appartenant à des trafiquants sans foi, ni loi. Profitant de la détresse des jeunes et n’ayant, souvent, aucune expérience en matière de navigation, ces vendeurs de rêves comme on les appelle, sévissent toujours, malgré le renforcement de la surveillance et des patrouilles au large de nos côtes.
Devenue la plaque tournante de ces barques people qui tentent de rallier, de nuit, la rive Nord de la Méditerranée, Annaba a fait, de nouveau, parler d’elle, en déjouant hier, grâce à la vigilance des gardes-côtes, les plans de 19 candidats au suicide qui s’apprêtaient à quitter les eaux territoriales algériennes. Selon le commandement du groupement territorial des gardes-côtes, c’est à 2h 30 du matin, samedi, qu’une embarcation de fortune transportant 19 harraga, parmi lesquels deux mineurs, a été interceptée, alors qu’elle se trouvait à 5 ou 6 miles de la plage de Ras El Hamra.
Pris en charge par une équipe médicale dépêchée sur les lieux, les 19 miraculés devaient être présentés dans la journée au procureur de la République pour statuer sur leur cas. Ce qui porte à 111, au total, le nombre des harraga qui ont choisi l’exil à partir des côtes annabies, depuis le mois de juillet dernier. Avec les 19 clandestins interceptés hier et les cinquante autres interceptés à Annaba, ils sont environs 8O harraga à avoir tenté l’aventure en moins de 48 heures.
Un phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur et contre lequel, malheureusement, toutes les mesures tentées, à ce jour, se sont avérées vaines.
D’ailleurs, nombreux sont ceux qui réclament la dépénalisation du délit de harga, parce que, selon eux, les candidats sont des victimes et on ne doit pas les considérer comme des criminels, même s’ils ont enfreint la loi, en tentant de quitter clandestinement l’Algérie pour rallier un pays européen.
L’oisiveté est mère de tous les vices, dit-on.
Des centaines de milliers d’élèves quittent prématurément l’école, alors qu’ils n’ont que 17 ans.
Malgré l’apport des centaines de centres de formation professionnelle qui accueillent près de 300.000 d’entre eux, chaque année, beaucoup se retrouvent à la rue et tombent, à la longue, dans le piège que leur ont tendu et tendent encore les marchands du voyage de la mort.
Le comble est que les candidats payeraient, parfois, jusqu’à 150.000 dinars pour une traversée à bord d’une embarcation sommaire, sans aucune mesure de sécurité et sans vivres. Beaucoup y laisseront leur vie. Les rescapés ou miraculés ont tout le temps, eux, de méditer sur leur sort, en prison, alors qu’ils rêvaient de l’Europe et d’un monde meilleur. Des centaines, voire des milliers de harraga ont tenté l’aventure, mais combien sont-ils ceux qui ont réussi à aller au bout de leur voyage? Car une fois là-bas, les ennuis commencent. Ils doivent vite trouver un abri pour dormir et manger, sans être repérés.
Quant au travail, ils n’ont rien à espérer sachant que le chômage en Europe frappe plus de 10% de la population et que même les diplômés sont sans travail. L’Algérie doit assouplir la législation et trouver de meilleurs moyens pour lutter contre la délinquance et l’oisiveté qui guettent les jeunes, particulièrement ceux qui sont candidats au suicide.