Une branche de la cia a publié une étude prospective sur le sujet Que sera l’Algérie en 2030 ?

Une branche de la cia a publié une étude prospective sur le sujet Que sera l’Algérie en 2030 ?
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La zone nord-africaine, en «plein basculement », au même titre que tous les États et royaumes arabes, sera bien différente dans une vingtaine d’années. Mais, entre le meilleur et le pire, plusieurs paramètres, à commencer par les choix de la forme d’islam qui seront adoptés par chacune de ces entités. Les enjeux sont immenses. Et les perspectives plus que troubles…

Le Conseil des agences de renseignement américain (National Intelligence Council, NIC) a publié ce lundi son rapport sur les prospectives mondiales à l’horizon 2030, dans lequel il a consacré un chapitre à la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA).

Dans la présentation de sa vision de l’avenir des pays du MENA, le NIC (branche de la CIA) souligne que « cette région, qui est au point de basculement, sera très différente en 2030 de ce qu’elle est maintenant, mais avec un large éventail de situations allant d’une croissance et d’un développement fragiles jusqu’à une instabilité chronique et à des conflits régionaux potentiels ».

Dans leur vision à long terme, les experts de cette organisation de renseignement du gouvernement américain soutiennent que l’avenir de la région dépendra de six déterminants- clés relatifs, notamment, à l’évolution de l’islam politique instauré dans plusieurs pays du MENA, à la stabilité et à la situation économique.

S’interrogeant si l’islam politique modéré allait assumer durablement le pouvoir, cette agence observe qu’après « le faux départ » du Front islamique du salut (FIS) en Algérie, lors des élections de 1991, l’islam politique « est en train de prendre le pouvoir dans le monde sunnite », citant les partis AKP en Turquie, le Parti de la liberté et de la justice en Égypte, Ennahda en Tunisie, le Hamas dans la bande de Ghaza et les victoires islamistes potentielles en Libye et en Syrie.

« Le paysage du Moyen-Orient est en train de se transformer en profondeur », observe-t-elle. Selon le rapport, si les partis islamiques, tels qu’en Égypte, ont pris des mesures populistes (subvention des produits alimentaires, filets sociaux) pour répondre aux besoins de la population, « ces politiques ne sont pas durables ».

Les décisions futures des partis islamiques, table cette agence, « deviendront plus orientées vers le marché, dotant la nouvelle garde des jeunes Frères musulmans et d’autres d’un plus grand pouvoir entrepreneurial pour développer l’économie ». Au fil du temps, « Le pragmatisme politique pourrait l’emporter sur l’idéologie, aidé par une société civile croissante qui va générer une nouvelle catégorie de leaders d’entreprises que les régimes autoritaires avaient systématiquement étouffés ».

« La démocratie islamique va certainement se transformer en une variété de nuances politiques », pronostique le rapport. Concernant la Syrie, il prédit que le pouvoir de l’après-al Assad va probablement être pris par les Sunnites dans une coalition comprenant les Frères musulmans, les minorités religieuses, les druzes et les Kurdes.

C’est le cas en Irak avec un gouvernement chiite qui est prêt à partager le pouvoir avec les arabes sunnites et les Kurdes. Néanmoins, le rapport avise qu’en cas de persistance du chômage et de la corruption, ou en l’absence d’une amélioration des conditions de vie en dépit de gouvernements et d’élections démocratiques dans les pays qui ont connu des bouleversements en 2011, les populations « pourraient se tourner vers des chefs politiques qui offrent une approche plus radicale ».

SÉRIEUSES MENACES SUR LES MONARCHIES DU GOLF

Dans ce cas, « les islamistes de la ligne dure pourraient bénéficier d’un plus grand attrait populaire en raison de leur engagement à des principes religieux conservateurs, offrant une alternative au capitalisme occidental et à la démocratie ». Le deuxième point auquel s’intéresse le rapport est la capacité des gouvernements en transition à prévenir les conflits civils.

À ce propos, les mêmes experts prédisent que « l’instabilité chronique sera une caractéristique de la région en raison de la faiblesse croissante de l’État et la montée du sectarisme, de l’islamisme et du tribalisme ». Le Bahreïn pourrait aussi devenir un foyer de rivalité entre Sunnites et Chiites, qui pourrait être déstabilisant pour la région du Golfe, souligne-t-il encore.

Au fil du temps, « une violence continue pourrait nuire à la gouvernance démocratique et conduirait à l’émergence de dictateurs, éloignant ces pays de la démocratie ». Le troisième paramètre-clé abordé par NIC dans ses prospectives est l’économie, relevant que la région MENA, ne reçoit que 2% des investissements directs étrangers, et ce, dans les seuls domaines de l’énergie, du tourisme et de l’immobilier, accusant un grand retard en technologie et elle est la moins intégrée dans le commerce et la finance.

Concernant les pays pétroliers de la région, le rapport avertit que ces derniers « pourraient faire face à des défis sévères si l’offre mondiale en pétrole augmentait substantiellement dans le sillage de l’exploitation du gaz de schiste, réduisant les prix de l’énergie ».

Abordant l’Iran, le NIC avance qu’un certain nombre d’experts pensent que l’Iran s’arrêtera de développer l’arme nucléaire, mais conservera, toutefois, la capacité à développer une telle arme. Devant cette situation, les Émirats arabes unis, l’Égypte et la Jordanie pourraient aussi lancer leur propre programme nucléaire.

Concernant le conflit israélo-palestinien, le rapport est très peu optimiste quant à la résolution de cette question soulignant que les questions relatives au statut d’al Qods et au droit au retour des réfugiés palestiniens ne seront pas entièrement résolues d’ici à l’horizon 2030 lequel « ne verra pas la fin complète du conflit ».

L’agence NIC s’est également penchée sur l’éventualité de voir les monarchies du Golfe (CCG) connaître des mouvements de protestations. À ce sujet, elle prédit qu’une instabilité politique en Arabie saoudite pourrait déclencher des incertitudes politiques et économiques étendues et qu’à l’instar de l’Égypte, la transition politique « pourrait être confuse et compliquée ».

Les autres monarchies sunnites de la région, pronostique cette agence, « pourraient bientôt se trouver sous la pression d’engager de profondes réformes politiques ou faire face à des soulèvements ». Selon le rapport, « si les monarchies du Golfe sont capables de surmonter avec succès le printemps arabe, les plus grands bénéficiaires de la région pourraient être la Jordanie et le Maroc qui sont les monarchies sunnites les plus vulnérables ».

Rafik Bakhtini