«Une anarchie totale dans le transport des voyageurs»

«Une anarchie totale dans le transport des voyageurs»

Plus de 300 000 postes d’emplois (directs et indirects) sont générés par le secteur des transports de voyageurs et de marchandises, nous dit Boucherit Abdelkader, président de la Fédération nationale du transport des voyageurs et des marchandises, affiliée à l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA). Selon lui, ce secteur vit dans une anarchie totale due essentiellement au laxisme des autorités concernées. 

L’Econews : Quel constat faites-vous au secteur des Transport en Algérie ?

Boucherit Abdelkader : Aujourd’hui, le secteur du transport terrestre notamment celui des voyageurs vit dans une anarchie totale. L’ouverture de ce secteur aux privés était a été faite, dès le début d’une manière désordonnée. Il s’agit de l’anarchie dans la délivrance des lignes de transport, l’absence d’un plan national de transport et de circulation, saturation et déficit de certaines lignes et destinations.

Aujourd’hui, le secteur privé possède 70 000 bus employant plus de 100 000 chauffeurs, plus de 100 000 receveurs et plus de 100 000 postes indirects générés (mécaniciens, lavage…), ce qui fait un total dépassant les 300 000 postes entre directs et indirects.

Il y a près de deux ans déjà, des recommandations ont été élaborées pour le développement de ce secteur stratégique. Où en est l’application ?

Malheureusement, jusqu’à aujourd’hui, toutes les recommandations élaborées lors des assises du secteur des Transport n’ont pas été prises en considération et sont restées lettres mortes.

 Le ministère des Transports vient d’accepter votre demande de revoir à la hausse le prix du ticket urbain et celui des lignes de moins de 30 km. Mais que faites-vous en contrepartie pour améliorer les prestations ?

C’était l’une des revendications du syndicat suite à l’augmentation du gasoil, essence. Mais aussi à la dévaluation du dinar qui a engendré la hausse de 30% des prix de la pièce de rechanges, des accessoires, des lubrifiants, des pneumatiques et autres. L’augmentation de 10% des tarifs du transport collectif urbain et suburbain privé n’a pas été négociée avec nous. Elle a été imposée par le ministère des Transports sans prendre en considérations nos revendications.

La prestation des services est une affaire de tous les acteurs (ministère de tutelle, les transporteurs). Le laxisme des autorités à travers l’anarchie de la distribution des lignes et autres contradiction ont engendré des prestations non conformes aux normes. A titre d’exemple, cela fait plus de dix ans que les autorités parlent de renouvellement du parc national des moyens de transports, mais aujourd’hui, ces mêmes autorités qui veulent le renouvellement continuent encore à délivrer des lignes aux transporteurs ayant des bus qui dépassent les 20 ans de mise en circulation. Ainsi, il y a quand même une contradiction de la part du ministère et des directions des wilayas. Comment voulez-vous que la prestation s’améliore ? Sur quelles bases on octroie des agréments aux transporteurs et sur quelles bases sont faites les affectations vers telle ou telle ligne ?

Vous revendiquez également la mise en place d’un nouveau plan national de transport qui prend en compte les nouvelles villes et agglomérations ainsi qu’un nouveau plan de circulation dans les grandes villes mais surtout dans la capitale. Quelle a été la réponse des autorités ?

Cette revendication remonte également à plus de 10 ans. Il faut bien établir une étude sérieuse et approuver des plans de transport et de circulation. Il existe aujourd’hui un grand déséquilibre entre les 48 wilayas, dont certaines sont saturées et d’autres manquent de lignes. Nous avons demandé un plan de transport bien étudié sur la base de statistiques réelles. Il ne faut pas oublier l’extension des villes, où des nouveaux quartiers et des nouvelles agglomérations ont été créés et qui ne sont pas desservies par les transporteurs.  Le ministère de tutelle n’a pas encore répondu à notre demande. Elle est toujours en attente.

Comment faites-vous pour remplacer les véhicules vétustes ?

Actuellement, le parc commence à s’améliorer. Il existe des wilayas où le parc a une moyenne d’âge de moins de 10 ans. Malheureusement d’autres wilayas ont des parcs où la moyenne d’âge dépasse les 20 ans. Nous avons demandé au ministère de tutelle de trouver des mécanismes (prêts bancaires) pour permettre aux transporteurs de changer leurs véhicules. Mais au jour d’aujourd’hui rien de sérieux n’a été fait par la tutelle pour l’amélioration de la situation actuelle du secteur du transport.

Pourquoi vous n’avez pas pensé à former les personnels du secteur des transports (chauffeurs, receveurs) ?

Notre syndicat n’a pas cessé de revendiquer, il y a plus de 10 ans, la formation des chauffeurs du transport de voyageurs et de marchandises. Malheureusement, le ministère ne fait que des promesses. Ainsi, je pense que la tutelle ne veut pas aller à la professionnalisation du secteur des transports et des métiers de ce secteur. D’ailleurs, aujourd’hui, le recrutement des receveurs de bus, se fait dans les rues et les cafés