Suivant un postulat typiquement algérien, il faut entamer chaque nouvelle étape avec du neuf. Qui dit neuf dit nouvelles personnes ou nouvelles habitudes. Ce postulat a été brandi après la CAN-2013, pour justifier des changements qu’on annonce chez les Verts dans la perspective de la reprise des éliminatoires pour la Coupe du monde 2014. Il est question de réaménagement du staff technique et d’un renforcement de l’effectif. Après l’échec de la participation algérienne à la CAN, on recherche la panacée qui, dans l’esprit de tout Algérien, ne réside que dans un changement, quel qu’il soit.
Changer un adjoint, un magasinier ou un chauffeur n’est pas un changement
Or, le salut réside-t-il forcément dans le changement ? La question mérite d’être posée. Changer juste pour changer n’est pas la meilleure solution, surtout s’il s’agit d’un simple «replâtrage» de circonstance. Nommer un nouvel entraîneur des gardiens de but, un nouveau magasinier ou un nouveau chauffeur ne constitue pas un changement de fond et ce n’est pas cela qui va booster l’équipe. De même, ramener de nouvelles têtes dans le groupe de joueurs n’est pas le meilleur gage d’une reprise efficace et efficiente. La thérapie de choc peut réveiller un malade, tout comme elle peut aggraver son cas.
Le dossier de Brahimi pas encore validé, Belfodil se fait désirer, Taïder n’a pas tranché

Alors que le match face au Bénin approche, il semble que même les changements prévus ont du mal à prendre. L’adjoint recherché et promis ne sera pas désigné, avant que le match ne se joue, alors que les joueurs désignés comme des messies rechignent à venir, qui pour des raisons acceptables, qui pour des motifs farfelus. Ainsi, le dossier de Yacine Brahimi est toujours au niveau de la FIFA et son engagement en faveur de l’Algérie n’a pas encore été entériné ; Ishak Belfodil n’est pas pressé de venir tout de suite, car totalement concentré sur son club Parme pour terminer la saison en beauté et concrétiser un transfert qui se profile vers la Juventus ; Saphir Taïder se trouve entre deux feux, l’un paternel et l’autre maternel, et il n’a toujours pas tranché -du moins officiellement et publiquement- entre la Tunisie et l’Algérie.
S’ils ne viennent pas, les attaquants actuels accepteront mal de jouer «par défaut»
Devant ces atermoiements, le sélectionneur Vahid Halilhodzic risque de se retrouver à attendre des joueurs qui, au final, ne viendront pas pour le match du 26 mars. C’est comme s’il est en train de tirer des plans sur la comète. Cela est dangereux à double titre. D’un côté, il est peut-être en train de préparer un plan de jeu en fonction des nouveaux venants et il risque de devoir revoir sa copie. Par ailleurs, le groupe actuel des joueurs a tellement entendu et lu qu’il y aura des changements qu’une partie d’entre eux -plus précisément ceux évoluant aux postes promis à des changements- sont probablement déjà démobilisés et, par conséquent, difficiles à motiver. Quand on annonce l’arrivée d’un attaquant pour régler le problème de l’inefficacité devant le but, il ne faut pas s’attendre à ce que les attaquants habituels soient enchantés qu’on les fasse jouer «par défaut», juste parce que les «stars» attendues se font désirer.
Les changements seraient raisonnables en juin, pas en mars
Pour préserver la sérénité du groupe, surtout qu’il s’agit d’un match crucial qu’il faudra absolument gagner devant le public algérien, la meilleure option pour Halilhodzic est de travailler avec le même groupe pour cette confrontation et reporter les changements à juin. Pour un seul match, il serait maladroit de chercher à trop innover, au risque de faire perdre à l’équipe son équilibre, a fortiori quand on sait qu’il y a peu de chances que les éléments «novateurs» soient présents. Pour les matchs de juin, les changements seront raisonnables et faisables, car il y aura deux matchs précédés chacun d’un stage de préparation, donc d’une marge de travail suffisante pour adapter les nouveaux venus au système de jeu de l’équipe.
«Il vaut mieux tenir que courir», un proverbe d’actualité
Plutôt que d’attendre des arrivants qui ne peuvent pas (ne veulent pas ?) encore arriver, mieux vaut travailler avec ce qu’on a en apportant les correctifs qui s’imposent, afin d’éviter les erreurs de la CAN. Comme le dit si bien le proverbe, «un tiens vaut mieux que deux tu l’auras». Ce serait dommage d’attendre désespérément des joueurs, au risque de perdre bêtement -par démotivation- ceux qu’on a sous la main. Halilhodzic ayant bien précisé et martelé qu’il ne suppliera personne et qu’il ne courra pas derrière les réticents, il devrait faire sien cet autre proverbe : «Il vaut mieux tenir que courir.» Malheur à lui s’il laisse échapper la victoire face au Bénin, à force de courir derrière des fantômes…