Sur un linéaire de 1216 km, d’est en ouest, un tronçon de 1086 km de l’autoroute Est-Ouest a été ouvert à la circulation routière. Un secteur qui a coûté au Trésor public la bagatelle de pas moins de 70 milliards de dollars en dix ans, soit une moyenne de 7 milliards de dollars par an, et ce, au titre de trois programmes quinquennaux, dont 50% du budget sont accaparés par le réseau autoroutier.
Cette information avait été faite par l’ex-ministre des Travaux publics, Farouk Chiali, successeur d’Amar Ghoul, qui a chapeauté durant des années le département des travaux publics, dans un rapport économique, « The Report, Algeria 2014 », du cabinet britannique Oxford Business Group (OBG), il y a quelques mois. Le budget est énorme, eu égard aux infrastructures routières réalisées déjà et d’autres toujours en chantier. L’un des projets pour lequel l’Etat a injecté des sommes colossales est celui de l’autoroute Est-Ouest. Le projet n’est pas encore achevé à 100%. Le même ex-ministre avait déclaré que l’Etat a dépensé 70 milliards de dollars pendant ces dix dernières années, soit une moyenne de 7 milliards par an.
En dépit du manque de statistiques réelles sur les coûts exacts des dépenses de ce secteur, l’autoroute Est- Ouest, ou le projet du siècle, demeure l’un des projets dont le montant a été réévalué. Entaché de beaucoup d’irrégularités liées également à plusieurs scandales et surtout aux normes de réalisation, le projet est toujours en chantier, notamment les sections du centre et de l’est du pays. Initialement, l’enveloppe dégagée pour ce projet était évaluée à 7 milliards de dollars. Cependant, les dépenses ont été augmentées, pour atteindre plus de 13 milliards de dollars, pour ne pas dire plus. Pour beaucoup d’observateurs, notamment des spécialistes, le coût de revient de l’autoroute Est-Ouest est supérieur de 20 à 25% par rapport aux normes internationales.
CHANTIERS BÂCLÉS
Parmi les sections autoroutières mal réalisées figure celle reliant Lakhdaria à Bouira sur une distance de 33 km. Confi és, il y a plus d’une année, au groupe ETRHB Haddad, pour un délai ne dépassant pas les 15 mois, les travaux de mise à niveau ne sont pas encore achevés. En dépit des mises en garde des responsables du secteur, notamment du ministre des Travaux publics, Abdelkader Kadi, qui a mis en demeure l’entreprise réalisatrice à l’occasion de sa dernière visite effectuée au début du mois dernier dans la région, les travaux avancent à pas de tortue. Des embouteillages et parfois des accidents sont enregistrés sur ce tronçon trop dégradé. Ce tronçon avait été réalisé par l’entreprise nationale Cosider, mais sans aucune norme de réalisation.
Ce chemin avait été le théâtre de plusieurs accidents de la circulation, des fois mortels, notamment au niveau de la descente de Djebahia et de Lakhdaria. Beaucoup s’interrogent sur le fait que les pouvoirs publics n’ont pas assuré un bon suivi des opérations de réalisation de ce projet. Pour certains, le coût provisoire de réalisation d’un kilomètre ne dépassait pas les dix millions de dollars. C’est le cas au niveau des pays européens, à l’image du Portugal et de l’Espagne, où le coût du kilomètre varie de 2 à 3 millions d’euros. Cela explique qu’en Algérie, le coût de revient de l’autoroute Est-Ouest au kilomètre est deux fois supérieur à la moyenne européenne.
RETARDS, BÂCLAGES DES TRAVAUX ET CONTRATS RÉSILIÉS
Le projet accuse également des lacunes, non seulement dans ses réalisations, mais en matière d’infrastructures d’accompagnement, stations-services et autres aires de repos. De nombreux usagers se plaignent du manque de stations d’essence et surtout d’aires de repos tout le long de l’autoroute Est-Ouest. Cette dernière dispose à ce jour sur toute sa longueur, estimée à 1 200 km, de 42 stations- services, dont onze sont déjà opérationnelles et dix le seront au courant de la présente année. Par ailleurs, ce sont 22 autres aires de repos qui sont en chantier. A l’est du pays, les travaux n’avancent pas pour la section reliant la ville d’Annaba à la frontière tunisienne sur un rayon de 84 km, en passant par la wilaya d’El Tarf. Confié au consortium japonais Cojaal, qui a déjà décroché en 2006 trois marchés sur un tronçon de 400 km de ce projet, allant de Bordj Bou Arréridj à El Tarf, le ministre des Travaux publics, Abdelkader Kadi, a annoncé, il y a deux jours, la résiliation définitive du contrat liant l’entreprise en question avec l’Agence nationale des autoroutes (ANA).
Le ministre a, dans une interview accordée à la Chaîne III, précisé que ce troisième contrat concernant ce tronçon précis est en résiliation parfaite et toutes les dispositions sont prises pour ne pas tomber dans le panneau concernant des démarches administratives et techniques. Et à propos de la demande d’arbitrage international introduite en France par le consortium d’entreprises japonaises Cojaal, M. Kadi a souligné qu’en cas de litige, cela doit se faire au niveau d’un tribunal algérien. « Nous avons notre mot à dire. Et s’ils veulent un arbitrage, il sera national. C’est écrit noir sur blanc dans le contrat et je ne pense pas que ces gens (Cojaal) ont raison », a-t-il précisé. Et au sujet de la reprise des travaux au niveau de cette section, le ministre a rappelé que l’entreprise détentrice de ce contrat s’est engagée en 2006 pour réaliser les travaux dans un délai de 40 mois. Les délais sont largement dépassés. Il a précisé que deux groupements d’entreprises nationales seront sélectionnés dans les prochains jours pour relancer les travaux. « Les deux groupements nationaux seront choisis dans les jours ou les semaines qui viennent, en vue de la réalisation des 84 km restants, dans des délais record », a-t-il rassuré.
Pour rappel, le consortium japonais avait décroché en 2006 ce projet pour un montant de 376 milliards de dinars, et réclame maintenant, après la résiliation de ce contrat, le paiement de 910 millions de dollars supplémentaires. Par ailleurs, et au sujet de la dégradation de certaines sections, notamment celles reliant Lakhdaria à Bouira, M. Kadi a indiqué que trois entreprises se trouvaient sur le terrain pour réaliser les travaux de mise à niveau. L’autoroute Est-Ouest sera livrée avec toutes les infrastructures, notamment le péage, en 2016. 42 stations services et 76 aires de repos sont également prévues.