Malgré une stabilité macroéconomique enviable, l’économie algérienne reste tributaire et fortement dépendante des aléas du marché pétrolier.
Une situation qui n’est pas sans risques pour le pays qui a engagé des investissements colossaux dans les infrastructures de base et les services publics. Un retournement du marché pétrolier pèsera lourdement sur l’avenir de ces investissements. Le dernier rapport de la Banque d’Algérie (BA) a mis en exergue cette situation qui, au demeurant, est un grand défi pour le pays. «Désormais, l’équilibre budgétaire requiert des niveaux de prix des hydrocarbures supérieurs à 112 dollars le baril pendant que les recettes budgétaires totales restent fortement dépendantes de celles, très volatiles, des hydrocarbures», met en garde le document de la BA. Les experts de la banque expliquent qu’«au cours des années 2000, les dépenses publiques, en forte augmentation, ont joué un rôle moteur dans l’évolution de l’économie nationale et ont été le principal canal de l’allocation des ressources issues des hydrocarbures».
Les dépenses d’équipement ont particulièrement amélioré la dotation du pays en infrastructures de base, externalités nécessaires à l’amélioration de l’environnement des entreprises et à leur développement et réduit ainsi les déficits cumulés en la matière au cours des années 1990, elles ont également stimulé l’activité économique avec un effet revenu, ajoute le rapport. La hausse des dépenses d’équipement a poursuivi une courbe ascendante jusqu’en 2009, mais depuis cette année, le budget de l’Etat a dû faire face à une forte contraction des recettes de la fiscalité pétrolière qui a conduit au premier déficit de la décennie avec 5,7% du PIB qui s’est réduit fortement en 2010, sous l’effet de la forte reprise des prix des hydrocarbures. En fait, les recettes des hydrocarbures qui représentaient en 2010 109% ont baissé de 5 points à 104 %. Ce qui démontre la vulnérabilité des Finances publiques aux éventuels chocs externes. Cette faiblesse a été confirmée par le premier argentier du pays M. Karim Djoudi qui a affirmé récemment qu’«il faut qu’il y ait aujourd’hui une prise de conscience sur le fait que nous avons besoin d’une approche beaucoup plus prudente en matière de dépenses notamment celles de fonctionnement et surtout celles relatives aux salaires de la Fonction publique où nous avons atteint le plafond». Mais, le ministre a refusé de parler d’un plan de rigueur. Il estime qu’«une forte réduction des dépenses d’investissement impactera alors la croissance économique, l’emploi et les revenus». Djoudi parle notamment des dépenses d’équipement nécessaire à l’économie pour maintenir un rythme de croissance appréciable.
L’inflation : un défi à moyen terme
Toutefois malgré une hausse effrénée des dépenses en 2011, il va sans dire que l’effet escompté ne s’est pas produit étant donné que la croissance a reculé d’un point en une année. Les chiffres de la Banque d’Algérie le démontrent. Le pays a enregistré, en 2011, un fléchissement sensible de sa croissance économique passant à 2,4% contre 3,4 en 2010. Un fléchissement qui s’est soldé par la contraction de la dépense intérieure brute. Un recul dû particulièrement à la faible croissance du secteur du bâtiment et des travaux publics et la persistance de la récession dans le secteur des hydrocarbures depuis 2006 ainsi que l’expansion des dépenses budgétaires. Outre le faible impact des dépenses sur la croissance, l’inflation, bête noire de toute économie était au rendez-vous l’année dernière avec des risques innombrables sur le pouvoir d’achat des citoyens. Pour la BA, «l’accélération des poussées inflationnistes conjuguées à la persistance des dysfonctionnements des marchés laisse penser que le risque d’inflation pourrait constituer un défi sur le moyen terme pour l’économie nationale». En d’autres termes, «la forte croissance de la masse monétaire, résultant de la dépense publique courante nettement accrue en 2011, tire les prix à la hausse». «L’inflation annuelle moyenne mesurée par l’indice national des prix à la consommation s’est accélérée ainsi en 2011 à 5,7% contre 4,5% en 2010 et 2,4 en 2009». La hausse des prix des produits manufacturés et des services a contribué davantage à l’inflation des prix intérieurs, sachant que les facteurs endogènes inhérents aux dysfonctionnements persistants des marchés intérieurs amplifient l’effet-prix, notent les experts de la banque. Une seule conclusion pour les observateurs : l’Algérie doit développer tous les secteurs hors hydrocarbures pour sortir de sa dépendance aux recettes pétrolières.