«Actuellement, l’Algérie est beaucoup plus un pays d’écoulement de billets de banque fabriqués à l’étranger qu’un pays émetteur».
C’est là une constatation faite hier par le colonel Djamel Zeghida, directeur de sécurité publique au commandement de la Gendarmerie nationale qui intervenait sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale.
A ce propos, il expliquera que «les faussaires qui se trouvent en Algérie ne sont en fait que de petits délinquants, des groupes organisés d’une manière primaire qui ont recours à un ordinateur performant, un scanner et une imprimante pour l’impression de billets de banque». En outre, il affirmera qu’en Algérie «nous n’avons pas d’ateliers spécialisés dans la fabrication de fausses monnaies. L’Algérie est beaucoup plus concernée par la mise en circulation de faux billets fabriqués à l’étranger».
Et d’ajouter que cette activité est «primaire».Il déclarera que les pays étrangers reconnus en relation avec l’Algérie dans ce trafic sont essentiellement la France, avec l’affaire des faux billets de 1 000 DA trouvés dans un atelier de fabrication à Lyon, et l’Italie. Ainsi, au vu de l’ampleur que prend le phénomène du trafic de faux billets, ce dernier est considéré comme une menace incontestable pour l’économie nationale si l’on considère le nombre d’affaires et de sommes saisies ces derniers mois, essentiellement celles plus récentes effectuées à Annaba et à Tebessa.
Le colonel indiquera que l’évaluation du phénomène du trafic de faux billets en Algérie dépend de «l’angle à partir duquel il est considéré», expliquant que du point de vue du nombre d’affaires traitées le trafic de monnaie par rapport aux années 2008 et 2009 connaît une certaine régression, alors que par rapport à la somme globale saisie le phénomène est en ascension. C’est qui fait que sur ce point, il demeure incontestablement une véritable menace pour l’économie nationale.
Les transactions sur la base de billets favorisent le trafic
Pour ce qui est des facteurs favorisant ce phénomène, le colonel Zeghida soulignera notamment «la masse monétaire en circulation est plus importante à la transaction par chèque ou par carte magnétique». A ce propos, il affirmera que ce phénomène risque de proliférer dans le sens où dans la société algérienne «les transactions commerciales sont faites sur la base du billet, et l’Algérien éprouve une certaine méfiance par rapport au chèque». Le 2e facteur encourageant ce fléau, poursuivra-t-il, serait «la faiblesse des moyens de la monnaie électronique en dépit des efforts engagés». Enfin, le dernier facteur cité par le colonel relève de la présence et l’extension des marchés informels au niveau du territoire national.
En outre, le colonel Djamel Zeghida soulignera que les émigrants clandestins africains et autres ne sont pas directement concernés par le trafic de faux billets proprement dit, mais sont plutôt impliqués dans des affaires d’escroquerie. Expliquant que ces derniers «arrivent en Algérie avec des faux billets qu’ils écoulent avec des procédés traditionnels, profitant de la cupidité et de la naïveté de certains de nos concitoyens».
S’agissant des moyens utilisés pour détecter les faux billets, l’intervenant dira que les institutions financières disposent de moyens technologiques très sophistiqués au même titre que la Gendarmerie nationale, sauf que cette dernière ne se contente pas de détecter mais s’engage également, entre autres, dans la recherche des modes opératoires utilisés par les trafiquants dont les résultats sont communiqués aux banques.
Les marchés à bestiaux, carrefour du trafic
Durant les premiers mois de l’année en cours, 4 millions DA ont été saisis par les éléments de la Gendarmerie nationale, soit une baisse de 50% par rapport à 2009.
Cette baisse se justifie, selon le colonel Zeghida, par les différents dispositifs mis en place pour la surveillance notamment des marchés à bestiaux considérés comme les premiers lieux de trafic par excellence. Ceci en plus du travail des services de sécurité qui traquent les faussaires dans les marchés à bestiaux particulièrement à la période de l’Aid El Adha qui est propice au trafic et où des quantités importantes de faux billets circule.
En 2008, il a été a retiré de la circulation environ 2 millions DA, alors qu’en 2009 la saisie effectuée a été de plus de 8 millions DA où la plus grosse somme recouvrée a été récupérée dans l’affaire traitée à Mostaganem lors d’un démantèlement d’un réseau de trafic de véhicules dont l’un, volé en France, contenait plus de 6 millions DA en billets. A noter que les trafics enregistrés portent beaucoup plus sur le billet de 1 000 DA que sur les autres monnaies, ce qui n’exclut pas le trafic de devises mais à moindre envergure. S’agissant de monnaies étrangères, en 2009 environ 30 000 euros ont été saisis contre 3 000 euros en 2010.
Nombre d’arrestations
Au courant de cette année, 110 personnes ont été arrêtées. A ce sujet le colonel Zeghida fera remarquer, d’une part, «l’augmentation du nombre d’arrestations et d’affaires traitées par rapport à 2009», et d’autre part, «l’implication d’étrangers dans ce phénomène». Une implication beaucoup plus marquée par «des affaires d’escroquerie».
Par Lynda N.Bourebrab