Un rapport inédit met à nu les manœuvres de l’Occident en Libye

Un rapport inédit met à nu les manœuvres de l’Occident en Libye

A l’initiative du Centre international de recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT1) et du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R2), et avec le soutien du Forum pour la paix en Méditerranée, une délégation internationale d’experts s’est rendue en Libye

(Tripoli) du 31 mars au 6 avril, puis à Benghazi et en Cyrénaïque du 19 au 25 avril afin d’évaluer la situation libyenne en toute indépendance et neutralité et rencontrer les représentants des deux parties. Cette démarche demeure, à ce jour, unique.

Le compte rendu de cette mission d’évaluation auprès des belligérants libyens livre des vérités troublantes sur cette «guerre civile» qui a été déclenchée, selon les missionnaires, par des personnes voulant à tout prix mettre à feu et à sang un peuple «paisible» et «riche».

La guerre civile en Libye est considérée comme une «cerise sur le gâteau» aussi bien pour la France, la Grande-Bretagne que les Etats-Unis d’Amérique. La délégation de journalistes et de militants des droits de l’homme qui a séjourné pendant plus d’un mois en Libye comprenait les personnalités suivantes, à savoir Saïda Benhabylès (Algérie), ancienne ministre de la Solidarité,

ancien Sénateur, membre fondateur du CIRET-AVT, Prix des Nations unies pour la société civile, Roumiana Ougartchinska (France/Bulgarie), essayiste, journaliste d’investigation, Yves Bonnet (France), préfet honoraire, ancien député, ancien patron de la Direction de la surveillance du territoire (DST), président du CIRET-AVT, Dirk Borgers (Belgique), expert indépendant, Eric Denécé (France), directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), ainsi que André Le Meignen (France), expert indépendant, vice-président du CIRET-AVT.

Pour pouvoir se rendre en Libye, cette délégation a eu «l’autorisation» du philosophe français Bernard Henri Lévy, devenu, selon Saïda Benhabylès, le premier responsable du Conseil de transition libyen (CNT). «Bernard Henri Lévy se rend régulièrement à Benghazi avec un jet privé. Il est considéré comme le véritable coordinateur de la rébellion», a-t-elle ajouté.

«Kadhafi pris de vitesse et piégé par ses proches collaborateurs»

Les missionnaires n’ont pas manqué de rappeler dans leur rapport les efforts entrepris par le guide libyen pour le développement de son pays. Si le leader libyen est «un dictateur et si la situation de la population n’est guère enviable en ce qui concerne l’exercice des libertés démocratiques, la situation socio-économique du pays est exceptionnelle à l’échelle africaine et arabe».

Il a réellement développé son pays. La redistribution de la rente, même inégalitaire, a permis d’assurer la paix sociale. En 1969, lorsque le colonel Kadhafi accède au pouvoir par un coup d’Etat qui renverse la monarchie, le peuple libyen est un des plus pauvres au monde avec un revenu annuel par habitant de moins de 60 dollars.

La Libye a connu un des plus hauts niveaux de vie du monde arabe et le plus élevé en Afrique.

La Libye a été également un acteur majeur du développement et de l’indépendance du continent africain. Kadhafi a permis à l’Afrique de connaître une véritable révolution technologique, grâce au financement du premier satellite africain de communication.

Cet outil a permis de relier l’ensemble du continent par téléphone, d’assurer la diffusion des programmes de télévision et de radiodiffusion, ainsi que plusieurs autres applications technologiques comme la télémédecine et l’enseignement à distance. Grâce aux transmissions radio WMAX, une connexion à faible coût a été mise à disposition à travers le continent, y compris dans les zones rurales.

Après 14 ans de tentatives infructueuses des Etats africains afin d’obtenir un prêt (auprès de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international, des Etats-Unis et de l’Europe), le leader libyen a pris ce projet à sa charge et a mis 300 millions de dollars sur la table, pour débloquer le projet.

La Banque africaine de développement a ajouté 50 millions de dollars et la Banque de développement d’Afrique de l’Ouest 27 millions. C’est ainsi que l’Afrique a obtenu son premier satellite de télécommunication le 26 décembre 2007. La Chine et la Russie ont alors accepté de partager leur technologie, ce qui a permis de lancer des satellites pour l’Afrique du Sud, le Nigeria, l’Angola, l’Algérie. Un second satellite de communication africain a été mis sur orbite en juillet 2010.

Sur le plan institutionnel, le budget de l’Union africaine (UA) est financé à hauteur de 15% par la Libye.

Sur le plan interne, la Libye voulait amorcer un changement de son système de gouvernance. Le rapport a souligné qu’une campagne de communication est confiée, entre 2006 et 2008, au Monitor Group, une société américaine, pour faire connaître la volonté d’évolution du régime.

La Libye a alors besoin d’aide afin de développer ses institutions dans un environnement démocratique et de moderniser son économie. Après des décennies d’isolement, les milieux d’affaires, les citoyens, le gouvernement et les élites intellectuelles cherchent à approfondir leur compréhension des idées et des pratiques du monde. En 2009, près de 2000 islamistes, prisonniers politiques, ont été libérés.

Parallèlement, le régime donne de nombreuses preuves de sa volonté d’établir de nouvelles relations de partenariat avec les pays occidentaux. Malgré son lourd passif, le régime est en pleine évolution. Kadhafi s’apprête même à annoncer de nouvelles réformes quand la «révolution libyenne» vient tout interrompre.

En février 2011, le gouvernement a annoncé diverses dispositions d’apaisement, par exemple en offrant des primes.

Le 2 mars, Kadhafi en personne annonce des réformes qui doivent accorder une plus grande place à la société civile, il assouplit le régime législatif et la Cour suprême publie une déclaration de principes. Mais la contestation ne cesse de prendre de l’ampleur.

Selon le document en notre possession, le Guide a été mal conseillé par son entourage qui l’a incité à recourir à la force. «L’interrogation subsiste de savoir quels sont précisément les personnages de l’entourage de Kadhafi qui avaient intérêt au pourrissement de la situation», s’interrogent les missionnaires laissant comprendre que le régime a été entraîné à desseins dans cette «guerre civile».

Par Farouk Belhabib