Un projet futuriste pour booster la transplantation d’organes

Un projet futuriste pour booster la transplantation d’organes

10_200_150.jpgL’Institut national du rein est un mégaprojet initié par le chef de l’état en 2003, lors de sa première visite au CHU Frantz-Fanon de Blida. Les travaux qui ont démarré en 2006 connaissent un état d’avancement de l’ordre de 90%. Reportage sur une structure unique en son genre à l’échelle du continent africain.

Cet institut de sept étages est implanté dans l’enceinte de l’hôpital de Blida, sur une superficie de 13 587 m2, avec la perspective d’avoir dans un délai de 20 mois un accès propre. Une fois en activité, cette structure dispensera des soins de haut niveau et prendra en charge les différents aspects de la maladie rénale, tant dans le domaine du diagnostic et de la thérapeutique que dans le domaine de la recherche clinique. Conçu essentiellement pour la transplantation des organes, l’Institut national du rein, d’une capacité de 200 lits, comprendra un service de néphrologie (adulte et pédiatrique), un service d’urologie (adulte et pédiatrique), un plateau technique constitué de 3 laboratoires (immunologie et histocompatibilité, biochimie et virologie, et anatomo-pathologie), un centre d’investigations et de diagnostic composé d’un centre d’imagerie médicale d’un lithotripteur, et des équipements ultramodernes pour l’exploration et le traitement des maladies rénales. Le matériel de pointe en voie d’acquisition a coûté la bagatelle de 156 milliards de centimes

Quant à la partie pédagogique, elle sera constituée d’un amphithéâtre de 350 places, d’un auditorium de 80 places, d’une salle de cours, d’une salle de colloque, d’une bibliothèque et d’un local pour la télémédecine, ainsi que des chambres d’hôte pour les équipes médicale et paramédicale. Une formation de recyclage de 6 mois dans l’activité de la greffe sera dispensée aux médecins intéressés.

L’unité d’hémodialyse de 12 lits, située au premier étage, recevra les patients qui doivent effectuer leur bilan pré-greffe rénale. Trois générateurs d’hémodiafiltration sont prévus pour prendre en charge les patients greffés en cas de reprise retardée de la fonction rénale. L’Institut national du rein disposera aussi d’équipements modernes pour traiter les pathologies urologiques (lithotripteur, matériel d’endoscopie), et proposera les thérapeutiques les plus modernes dans le domaine.

La confection des abords vasculaires sera effectuée aussi dans ce centre. De même, des nouvelles techniques de dialyse (hémo-filtration, hémodiafiltration, plasmaphérèse, dialyse péritonéale automatisée) seront proposées aux patients en cas d’indication. Tout a été pensé, jusqu’aux choix des couleurs dans la salle de transplantation pour alléger la pression du temps sur les chirurgiens et une grande ouverture permettant l’entrée de la lumière du jour à profusion.

La nécessaire révision des lois régissant les prélèvements d’organes

C’est le professeur Tahar Rayane, chef de projet de l’Institut national du rein et des greffes d’organes, lui-même accompagné du chef de service de néphrologie de CHU Bab El-Oued, qui nous fera le tour du propriétaire. Ce jour-là, l’architecte en charge du suivi de ce projet, des membres du bureau d’études et des représentants des entreprises partie prenante dans la réalisation étaient également présents. C’était l’occasion pour le chef du projet de donner quelques orientations et de demander de refaire certaines finitions qui ne cadrent pas avec les normes en matière de construction de structures de santé.

“Nous avons conçu dans cet institut un schéma de prise en charge du patient intégré où toutes les investigations et toutes les thérapeutiques seront proposées au patient durant son hospitalisation”, explique le professeur Rayane, futur directeur de l’institut.

Il sera ainsi procédé dans un premier temps à la mise en place du registre national des maladies rénales et de l’insuffisance rénale chronique. C’est un pas très important car, selon ce spécialiste, “plus de 15 000 patients sont actuellement traités par une méthode de suppléance dans notre pays et la prévalence a atteint 460 patients par million d’habitants, et le nombre de cas incidents est estimé à 3500 nouveaux cas par an. Le nombre de greffes réalisées ne dépasse pas une centaine de cas par an, et la liste d’attente a dépassé les 7000 patients”.

Le but est d’arriver très vite à multiplier par deux le nombre de greffes réalisées dans notre pays et à développer les prélèvements sur les personnes en mort encéphalique. La légalité religieuse du prélèvement d’organes à partir de donneur en mort encéphalique a été, à plusieurs reprises, admise par le ministère des Affaires religieuses, mais les textes de loi tardent à voir le jour.

Toutefois, dans cette perspective, l’Institut national du rein disposera de 2 blocs dédiés à la transplantation rénale ; une unité de réanimation de patients en mort encéphalique ; un laboratoire d’histocompatibilité et un laboratoire d’anatomopathologie spécialisé dans la pathologie des maladies rénales.

Selon le professeur Rayane, “le futur INAR dispose en son sein de tous les moyens matériels et humains nécessaires à une activité de prélèvement et de transplantation rénale (et d’organes). Les patients en mort encéphalique seront pris en charge précocement dans une unité spéciale de réanimation. Toutes les investigations complémentaires seront effectuées au niveau de l’institut : diagnostic de la mort encéphalique, bilans urologiques et infectieux, bilans immunologiques, explorations radiologiques et échographiques. Une fois que le diagnostic de mort cérébrale est confirmé, une structure spécialement conçue pour recevoir les parents du défunt est mise à la disposition de l’équipe de greffe”.

Même s’il concède l’existence d’orientations politiques claires pour faciliter l’accès à la greffe d’organes, de tissus et de cellules à un nombre plus important de patients algériens, le professeur Rayane pense que l’impact de cette volonté politique reste limité par l’absence d’un programme national de promotion du don d’organes à partir de donneur en mort encéphalique. “Les lois algériennes régissant les prélèvements d’organes sur les donneurs vivants et à partir de patients en mort encéphalique doivent être révisées en levant certaines restrictions. Le cercle des donneurs vivants doit être élargi en incluant les cousins germains, les beaux-parents, les oncles et les conjoints”, préconise-t-il. Dans ce sens, il faut, précise-t-il, mettre à la disposition des citoyens des moyens pour faire part de leur choix (carte de donneur, registre de refus).

Car, semble-t-il, ne pas connaître la volonté du défunt est la principale cause du refus de la famille de faire don de ses organes. “L’Algérie accuse un déficit flagrant en transplantation d’organes en général et en greffe rénale plus particulièrement. Ainsi, depuis 1986, moins de 1000 greffes rénales ont été effectuées, et la liste d’attente, qui était de 3000 patients en l’an 2000, a plus que doublé en 10 ans. Ils sont plus de 7000 patients en attente d’un greffon, et moins de 20% parmi eux disposent d’un donneur apparenté. Une dizaine de centres greffeurs réalisent une centaine de greffes rénales par an (dix greffes par centre et par an)”, conclut le professeur Rayane. L’hospitalisation d’un greffé dure entre 15 jours et 1 mois.

Une salle de repos, un espace de vie et une terrasse sont prévues pour rendre le séjour des malades plus agréable.

N. H.