Quelques locaux et rien d’autre
Promesse électorale au départ, avant de devenir l’affaire des rouages bureaucratiques et du pouvoir local, quant à sa concrétisation et sa mise en œuvre sur le terrain, le programme présidentiel des 100 locaux à usage professionnel et artisanal, à réaliser dans chaque commune, ne semble pas susciter, outre mesure, l’engouement des jeunes qu’on espérait soulager du chômage. Mal ou pas informés, beaucoup de ces jeunes se sont trompés sur la nature du projet.
Mostaganem était pionnière dans le lancement du programme, mais elle n’en sera pas de même quant à l’entrée en activité desdits locaux. Non seulement l’objectif théorique des 3.200 locaux devant constituer le quota initial des 32 communes que compte la wilaya, n’a pas été atteint, mais c’est également la quasi-totalité du parc réalisé jusque-là qui demeure toujours fermée.
Dans le meilleur des cas, en chaque site, ceux qui sont opérationnels se dénombrent sur les doigts d’une seule main. Une réticence manifeste, de quoi susciter la grande déception de l’autorité locale, Mme le wali en tête.
Dès le dernier trimestre de l’année 2005, c’est à la DPAT (Direction de la planification et de l’aménagement du territoire) que fut confiée la mission du suivi et de la réalisation du programme. Selon les disponibilités en assiettes foncières et en anciens établissements commerciaux désaffectés, un total de 1.843 locaux sera alors, identifié et mis en chantier de réalisation ou d’aménagement à travers la wilaya.
L’attribution, dont devaient s’occuper des commissions locales à installer, ne figurait pas encore à l’ordre du jour, mais on savait d’ores et déjà, que la priorité serait accordée aux promoteurs ayant bénéficié de l’aide de l’Etat par le biais de l’ANSEJ, ANGEM et autre Caisse d’allocation chômage, pour la concrétisation de leurs projets.
Une année plus tard, les premières livraisons commencent à être réceptionnées, alors qu’en parallèle, les APC, sur injonction de la tutelle, partirent à la chasse de la moindre enclave urbaine, à même de «caser», un maximum de locaux.
On se rappelle, en maints sites, le choix de l’assiette foncière d’implantation a, à chaque fois, été décrié par la population riveraine, désirant préserver, à tort ou à raison, l’aire de jeux, l’espace vert ou l’espace commun contigus.
La rareté du foncier imprévu par les instruments de la planification urbaine en vigueur avait poussé les autorités à se rabattre sur les parties communes en ignorant la procédure des enquêtes de commodo et incommodo. L’essentiel était de concrétiser au plus vite le programme présidentiel.
Avant même leur réalisation, les locaux commerciaux promis par le programme suscitent les plus vives convoitises des jeunes, qu’ils soient de bonne ou de mauvaise foi quant à ce qu’ils voulaient en faire.
Les uns s’adressent aux APC, les autres à l’ANSEJ (Agence nationale de soutien à l’emploi des jeunes) ou l’ANGEM (Agence nationale de gestion du microcrédit) dont les responsables ne savaient point quoi leur répondre. Simultanément aux rotations d’un service à l’autre, c’était quelque 2.500 locaux qui étaient achevés, bons à la mise en exploitation, ou en cours de réalisation. Les premières livraisons furent annoncées pour le courant de l’année 2006.
Il s’agissait, entre autres, des 63 commerces aménagés au sein de l’établissement désaffecté de l’ancienne entreprise des Galeries Algériennes implantée à Sidi Ali. Au chef-lieu de la wilaya, les chantiers étaient à pied d’œuvre dans 9 différents sites. Des sites sciemment choisis pour fonder de nouveaux pôles de commerce appelés à désengorger le centre-ville, à la limite de l’encombrement et de l’asphyxie, nous disait-on.
Dans l’intention précise de ce soulagement, a-t-on retenu, les cités de «Diar El Hana», du «5 Juillet», des «348 et 600 logements» à Kharrouba, des «Mandarins», des «800 logements» à Tigditt et à «Mont Plaisir» qui comptait deux sites. La mise en œuvre de cet important programme constituait la première expérience menée par la DPAT de la wilaya en matière de gestion directe et de suivi de projets.
A des fins de réclame politique, une poignée de locaux seront soumis à l’inauguration officielle par le président de la République, lors de sa visite de deux jours consacrée à la wilaya de Mostaganem en juillet 2007. Mais, depuis, les bénéficiaires ne s’empresseront guère d’ouvrir boutiques.
Là où de nombreux bénéficiaires de ces locaux, croyant en avoir fini avec les affres du désœuvrement, ont vite fait de déchanter, et pour cause.
Compte tenu des nombreux problèmes et autres contraintes qu’ils endurent pour concrétiser leurs projets, sur un parc cumulé de quelque 2.500 locaux réalisés à travers la wilaya, ce ne sont que quelques-uns d’entre eux qui ont commencé à activer, tandis que les autres continuent à meubler le décor des quartiers où ils sont implantés, détournés parfois en repaires de la délinquance, sinon faisant l’objet de pillage et de dégradation.
De par les conditions imposées à l’accès, les postulants ne se bousculent guère au portillon de l’administration, chaque APC concernée n’ayant enregistré que quelques demandes pour les locaux achevés.
Cette situation de blocage a fait réagir les responsables locaux, à leur tête le chef de l’exécutif, qui a sollicité plusieurs «campagnes» de sensibilisation à même d’intéresser les jeunes à l’adhésion au programme présidentiel.
Dernièrement, le DPAT a même brandi la menace de la déchéance des bénéficiaires qui traînent encore les pieds, sans «excuses valables» aux yeux de l’administration. Une mise en demeure collective qui semble rester sans effet.
Parmi les causes évoquées, outre les lenteurs administratives, on relève le retard dans le raccordement au réseau électrique ou de l’AEP et l’inadéquation des locaux attribués. D’autres attributaires avanceront le mauvais emplacement remettant ainsi en cause les choix initiaux des terrains d’implantation éloignés des flux et des espaces commerçants.
En certains endroits, ces locaux, s’apparentant parfois à des casernes de la garde communale, constituent plus une curiosité architecturale qu’un lieu de convivialité et d’activité, a fortiori commerciale. Malgré tous les défauts inhérents à leur emplacement et à leur densité excessive, voilà que ces locaux ne peuvent être éclairés.
Mieux encore, certaines APC ayant inversé, pour on ne sait quels desseins, l’ordre de numérotation des locaux, nombre de promoteurs se verront offrir des locaux dont la superficie se révélera moindre, jusqu’à la moitié, que celle notifiée sur leur décision d’affectation établie par la commission de wilaya.
Des «anomalies douteuses» dont la rectification et la régularisation passent par un autre lassant parcours de combattant administratif.
«L’affectation a été opérée sur la base de critères objectifs en adéquation avec la spécificité de l’activité envisagée. Un choix qui nous a permis le classement des attributaires. Il se peut que nous nous sommes trompés, certaines activités requérant certaines superficies, au rez-de-chaussée ou à l’étage. Je donne instruction aux chefs de daïra à superviser de près cette opération. Là où il y aura problème, on clarifiera les choses.
On ne laissera pas les gens faire ce qu’ils veulent. En certaines communes, le P/APC a mis de côté l’état qui lui a été soumis par la commission de wilaya, et il a réaffecté, à sa guise, les locaux. Une «initiative» que je n’accepterai jamais. Au niveau de la commission de wilaya que je préside, on a affecté selon l’activité et la superficie requise, abstraction faite des individus, et en toute objectivité. Les chefs de daïra doivent assumer leurs responsabilités.
Je ne dois plus entendre parler de ce genre de problèmes d’affectation. Environ 2.500 locaux ont été attribués. En certaines autres wilayas, ce sont «zéro local» qui ont été affectés jusqu’à ce jour. L’Etat nous a gratifiés de ce projet, il faut que nos «enfants» en profitent. Cette affaire de raccordement aux réseaux électrique et d’assainissement, nous y sommes. Les attributaires doivent entamer leur activité, et non pas rester les bras croisés.
A Mostaganem, ils ont tout, mais les locaux demeurent encore fermés. Alors messieurs les élus, encouragez ces jeunes à ouvrir et lancer leur projet. Le citoyen veut l’emploi, le logement, et …, rien que des doléances. Nous lui avons dit, tiens le local et travaille, mais il n’ose rien entreprendre, malgré qu’il dispose de tout.
Que peut-on faire pour ceux-là ? Quand ils ouvriront, nous, nous nous réjouirons On se «vantera» d’avoir contribué à créer des emplois. Ils ont ouvert, mais malheureusement, ils ne sont qu’une minorité. Certains n’ont pas besoin d’eau. A Khadra, une sourde-muette a ouvert son local. Je lui ai dit bravo et je l’ai félicitée.
C’est pour vous dire que c’est une affaire de volonté.
Il faut être entreprenant, et non pas commander ceci, cela à l’administration. Quand le jeune s’adresse à un particulier, osera-t-il lui dicter tant d’exigences ? Notre plus grand mal, c’est l’assistanat et le compter sur autrui. Il faut apprendre à se prendre en charge. M. le Président nous a offert ce projet, mais nos «enfants» se doivent de nous aider en conséquence.
Le représentant de Sonelgaz est parmi nous, il dispose de toutes les études, et l’opération du raccordement ne va pas tarder. Kif-kif pour l’ADE. Le DPAT est également là, il suit l’opération de près.
Malheureusement, le problème demeure. Alors, veut-on oui ou non travailler ?» Tel fut, presque mot pour mot, le «discours» de Mme le wali, lors de la dernière plénière de l’APW dont certains élus avaient soulevé cette «préoccupation majeure».
M. Belarbi