L’Algérie négocie un report de son application intégrale à la date prévue initialement. De son côté, l’UE met l’accent sur le volet politique en empruntant le train du vent de révolte dans la sphère arabe.
Avant le dernier round (le 4e) des négociations du “nouvel” accord d’association de l’Algérie avec l’Union européenne, son commissaire à l’Élargissement et de la Politique du voisinage, Stefan Füle, est venu à Alger pour défricher le terrain. Avec un propos parfois en écart avec la diplomatie, le commissaire européen a surtout lancé des messages, notamment en évoquant le dossier politique. Pour sa seconde visite à Alger, M. Füle s’est efforcé d’expliquer la nouvelle démarche de l’union incluant la redéfinition de la démocratie. Ce qui suppose, selon son explication, un dialogue avec les autorités, mais aussi avec les ONG et la société civile. Concernant les réformes, “il ne s’agit pas d’impliquer uniquement les partis politiques, mais aussi la société civile”, dit-il. “Les réformes, c’est la démocratie, la liberté d’expression et d’association à renforcer”, a-t-il ajouté. L’UE a accaparé les slogans des révolutions arabes, ces écriteaux portés par les manifestants réclamant “égalité et dignité”. “C’est ce que nous voulons”, dit-il.
Les discussions qui se poursuivent encore aujourd’hui sont laborieuses, puisque M. Füle évoque un “mi-chemin”, “un compromis”, rectifiera M. Medelci, qui a animé avec lui une conférence de presse après un tête-à-tête, hier. Même si les discussions progressent, les deux parties ne semblent pas arriver à un consensus. Du moins pour l’instant, même si les deux responsables évoquent une avancée satisfaisante.
L’Algérie accorde de l’importance à la révision du calendrier du démantèlement tarifaire. Elle négocie un report de son application intégrale à la date prévue initialement. De son côté, l’UE met l’accent sur le volet politique en empruntant le train du vent de révolte dans la sphère arabe.
Le commissaire européen a, cependant, salué la levée de l’état d’urgence et l’annonce de réformes politiques en Algérie. “Nous sommes confiants qu’elles (réformes) répondront aux aspirations du peuple algérien. Il faut, bien entendu, être à l’écoute de ses aspirations”, dit-il, précisant être “convaincu que cela va renforcer les relations entre l’Algérie et l’UE”. Et de lancer enfin comme une sentence : “Personne n’a d’immunité contre le changement”, avant d’atténuer avec “chaque pays a son chemin” ; même l’UE est en train de changer, de changer sa démarche. Pour le diplomate européen, la nouvelle politique de voisinage n’est pas “une camisole”, l’UE agit avec “une différenciation entre les pays” afin, dit-il, d’“assurer plus d’efficacité”.
Après son propos rassurant, il s’en démarque avec, en prime, un jugement de valeur qui en dit long sur la nouvelle conception de l’UE, de ses partenaires et/ou de ses intentions. “Nous avons des intérêts. Et des valeurs”, dit-il.
Pour lui, beaucoup de choses restent à faire en Algérie. En plus des réformes politiques — les relations avec le Maroc abordées avec Medelci au même titre que le Sahel —, l’UE compte, selon lui, sur les réformes juridiques également et la lutte contre la corruption afin d’améliorer le climat des affaires et attirer les IDE. Mais, l’Algérie demeure, selon lui, “un acteur crucial dans la région”.
Il a refusé, cependant, de s’avancer sur la question du calendrier sur le démantèlement tarifaire dont les propositions seront soumises, d’après lui, à tous les membres de l’UE. Idem pour les visas, mais côté algérien. “Nous préférons les négociations bilatérales, notamment sur la question de réadmission. Les accords fonctionnent bien”, a déclaré M. Medelci, qui refuse un accord global sur la liberté de mouvement des personnes dans l’espace européen, et inversement. M. Füle a annoncé, de son côté, la mise au point de visas spécifiques pour les hommes d’affaires, les étudiants… avec un clin d’œil à l’endroit des jeunes qui pourraient bénéficier d’un statut dans le cadre du travail. “Pour contrôler l’immigration illégale et l’immigration légale”, dit-il. L’on n’est donc pas loin de l’immigration “sélective” à la française. Seule décision, en attendant le 4e round qui se déroulera en juin, l’installation officielle du sous-comité du dialogue et des droits de l’Homme.