Un numéro d’urgence pour lutter contre la cybercriminalité

Un numéro d’urgence pour lutter contre la cybercriminalité

Dans son rapport remis lundi, Marc Robert, procureur général à Riom, préconise également le retour de la coupure de l’accès à Internet mais déconseille le blocage de sites sans l’aval d’un juge.

Sur Internet comme dans la vraie vie, les criminels doivent répondre à la justice. C’est en substance ce que promet le rapport «Protéger les Internautes», remis lundi par Marc Robert, procureur général à Riom, à Christiane Taubira, Arnaud Montebourg, Bernard Cazeneuve et Axelle Lemaire. Ce document, fruit d’un groupe de travail interministériel, a pour but de mieux protéger les Français face à la cybercriminalité. Cette dernière y est définie comme l’ensemble des «infractions pénales tentées ou commises à l’encontre ou au moyen d’un système d’information et de communication, principalement Internet.»

«Il importe d’avoir les yeux ouverts sur ces dangers nouveaux, sans pour autant dramatiser», peut-on y lire en préambule. «Cet objectif concerne au premierchef les internautes eux-mêmes, mais aussi ceux des décideurs qui, n’étant pas nés avec Internet, ont du mal à saisir le bouleversement culturel qu’il implique, voire ont tendance à y appliquer des schémas de réponse parfois peu adaptés.»

Retour de la coupure d’Internet

En guide de réponse, le rapport propose 55 recommandations égrenées au fil de ses 277 pages, dont vont s’inspirer les différents ministères concernés dans leur travail. Il insiste notamment sur l’importance de la prévention de la cybercriminalité, au travers de moyens divers. Le rapport propose par exemple la mise en place d’un «17 de l’Internet ouvert au grand public», qui permettrait aux citoyens de signaler des infractions dont ils seraient victimes, comme par exemple une escroquerie en ligne. Il suggère également la création d’une délégation interministérielle à la lutte contre la cybercriminalité, qui serait chargé d’élaborer et de mettre en place cette prévention.

Le rapport Marc Robert imagine également de nouveaux moyens pour punir les cybercriminels, au travers d’un arsenal judiciaire renouvelé. Il y est par exemple proposé de créer une peine spécifique réprimant l’envoi massif de courriers indésirables (spam) ou de faire de l’usurpation d’identité sur Internet une circonstance aggravante.

D’autres recommandations sont d’anciennes mesures remises au goût du jour. C’est notamment le cas de la peine de suspension du droit d’accès à Internet, proposée pour punir les «infractions mettant en péril un mineur commises au moyen d’un réseau de communications électroniques». Cette mesure faisait partie des armes légales de la Hadopi (Haute Autorité pour la Diffusion des Oeuvres et la Protection des droits sur Internet) entre 2009 et 2013, avant d’être finalement supprimée par la ministre de la culture Aurélie Filippetti.

Des recommandations déjà ignorées

Marc Robert et son groupe de travail entendent également clarifier le rôle des intermédiaires, comme les hébergeurs ou les fournisseurs d’accès à Internet, dans la lutte contre la cybercriminalité. Ces derniers sont déclarés irresponsables «de principe» des actes malveillants effectués en ligne. En revanche, le rapport préconise l’obligation pour les intermédiaires de surveiller et de détecter en prévention les «infractions les plus graves».

Autre mesure notable, le rapport Marc Robert déconseille le blocage d’un site Internet sans l’aval d’un juge, sauf pour les contenus pédopornographiques. Cette recommandation intervient peu de temps après le dépôt d’un projet de loi de lutte contre le terrorisme par la France auprès de la Commission européenne, qui vise justement à autoriser le blocage administratif – sans accord d’un juge – de certains sites Internet. À peine publié, le rapport de Marc Robert pourrait donc déjà être partiellement ignoré.