Les faits sont gravissimes et jettent le discrédit sur le système de soutien à l’emploi de jeunes, de plus en plus décrié par ceux qu’il est censé aider.
Une quarantaine de jeunes promoteurs porteurs de projets soutenus par l’Ansej sont dans le désarroi. Ces derniers qui avaient rempli toutes les formalités pour l’acquisition de bateaux de pêche en 2005, sont à ce jour au point mort.
Les embarcations qu’ils avaient commandées auprès d’un constructeur, qui en a pourtant encaissé le prix fort, n’ont pas encore vu le jour. Et pour ajouter au drame de ces jeunes, les banques ont commencé aujourd’hui à réclamer le remboursement des crédits contractés.
Ces derniers ont bénéficié de l’aide de l’Agence nationale de soutien à l’emploi de jeunes dans le cadre du programme présidentiel.
Conformément à la réglementation en vigueur, ils se sont acquittés des 10% représentant l’apport personnel du promoteur (un montant de 1 million de dinars, ndlr), ce qui leur ouvrait droit, après fourniture du dossier, à un soutien à hauteur de 20% de l’Ansej, le reste étant financé par le biais de crédits bancaires, Badr et CPA.
«Après avoir rempli toutes les conditions, il ne nous restait que la réception de nos petits métiers de pêche pour lancer notre activité. Mais depuis 2005, le constructeur, payé à l’avance à raison de 20 à 30 millions de dinars pour chaque bateau, n’a livré aucune unité», diront des promoteurs qui ont déposé une plainte contre
lui le 1er février auprès du procureur de la république près le tribunal d’Aïn El turck. Et pour ajouter au malheur de ces derniers qui ont été gavés de promesses depuis la finalisation de leurs dossiers, le délai accordé par les banques pour le remboursement des crédits qu’elles ont octroyés est arrivé à échéance.
«Nous sommes des promoteurs, chômeurs et redevables de grosses sommes, quelle ironie du sort», écriront les plaignants dans la requête adressée au représentant du parquet. De plus, les banques menacent de retirer les avantages accordés dans le cadre de l’Ansej, estimant que les délais réglementaires sont largement dépassés. Elles menacent même de revoir à la hausse les taux d’intérêt des crédits», affirme la même source.
Ni service fait ni retenue de réserve
L’entrepreneur qui devait livrer ces embarcations a encaissé la totalité du montant de la commande qui comptait près d’une quarantaine d’unités de pêche. La question que se posent les promoteurs est comment le constructeur a pu bénéficier de cette manne financière sans avoir satisfait à une procédure de «service fait». «L’usage veut qu’une commande ne soit honorée qu’une fois le service fait ou la marchandise livrée.
Et même dans certains cas, il existe des retenues de réserve qui oscillent entre 20 et 30% du montant du marché et qui ne sont levées qu’une fois le marché clôturé», affirme notre source, précisant que leurs nombreuses tentatives de pousser le constructeur à honorer ses engagements ont buté sur une indifférence totale. «L’entrepreneur a profité de notre naïveté puisque notre relation avec lui sent l’arnaque. Nous avons signé nos contrats avec une entreprise, et avec le temps, il l’a mise en faillite et constitué une autre
Sarl au nom de son épouse. Et aujourd’hui nous sommes ballotés entre ces deux entreprises sans avoir nos bateaux», affirment ces derniers qui précisent que depuis quelques jours, le constructeur est aux abonnés absents puisqu’il est annoncé par ses proches à l’étranger.
Des chantiers sous-loués
Les jeunes promoteurs s’interrogent sur les garanties que présentait ce constructeur pour les berner et se jouer de toutes les barrières légales. «Figurez-vous que les deux chantiers à Ghazaouet où devaient être construits nos embarcations ne lui appartiennent même pas. Ils étaient loués à des particuliers qui lui réclament depuis quelques mois les montants des loyers» affirment nos interlocuteurs.
Une source proche de l’Ansej a reconnu les faits reprochés au constructeur tout en nous invitant à nous reprocher du chef du service contentieux, un responsable qu’on nous a présenté comme serviable mais que nous n’avons pas pu approcher, car étant toujours absent, selon une secrétaire de la direction régionale d’Oran.
Cette affaire, qui ne semble pas être un fait isolé, remet à l’ordre du jour le débat sur les aides de l’Etat à l’emploi qui profitent souvent à ceux qui n’en ont pas besoin. Les jeunes chômeurs, véritables dindons de la farce, s’endettent pour initier des projets, de véritables châteaux en Espagne qui ne verront pas le jour pour différentes raisons, mais qui échappent souvent à la volonté de ces pauvres malheureux.
Par F. Ben