Un nouveau phénomène qui prend de l’ampleur: Vends rein à 300 millions !

Un nouveau phénomène qui prend de l’ampleur: Vends rein à 300 millions !

dinar-algerien_1000da.jpgUn phénomène qu’on ne voyait que dans les reportages de chaînes de télévisions étrangères, mais devenu, ces derniers temps, réalité dans notre société.

Des personnes proposent leurs reins en contrepartie d’une somme d’argent. La plupart d’entre elles, se présentant au service d’urologie du CHU d’Oran, justifient leur acte par la pauvreté et la misère.

«Ce sont des femmes et des hommes, généralement âgés entre 30 et 40 ans, qui viennent nous proposer leurs organes à la vente», nous explique le Pr Attar, chef de service d’urologie, au CHU d’Oran.

Très surpris, les premiers temps, par cette nouvelle forme de «transaction» et cette «audace» des personnes concernées, le chef du service d’urologie avait du mal à expliquer à ces individus le côté illégal de la chose et par conséquent l’impossibilité d’un tel procédé dans un établissement hospitalier, conçu pour prendre en charge les malades sans contrepartie.«Mais ces personnes s’adressaient au service pour conclure une transaction, sans aucune considération à l’éthique et la déontologie», nous confie le Pr Attar. La dernière proposition date d’une semaine. «Une femme est venue au service pour vendre son rein

Elle voulait acheter un logement à 300 millions de centimes. N’ayant pas les moyens financiers pour se payer cet appartement, elle n’a trouvé comme solution que de vendre un organe vital de son corps que rien ne peut remplacer», nous dit le professeur. «Devant cette femme en détresse, apparemment, j’ai souri, souligne le Pr Attar et je lui ai carrément expliqué qu’un tel acte mène directement en prison.

Mais la misère de cette femme, laissait peu de place à la raison pour que cette mère de famille puisse prendre conscience de la gravité de l’acte». La misère et la pauvreté sont-elles réellement à l’origine de ce phénomène ? Cela cache-t-il une organisation qui profite de la détresse des malheureux ? Difficile de trancher sur cette question.

Le même responsable affirme que «le phénomène commence à prendre de l’ampleur et les personnes sont prêtes à tout pour fuir la misère, même s’il faut vendre ses organes». Comme le don de rein se fait rare pour les malades insuffisants rénaux, la demande est là et n’attend que l’offre, même s’il faut payer le prix fort ! Sur le don de rein, le même spécialiste raconte que même entre proches, le problème se pose.

Des réticences et des refus sont souvent exprimés lorsqu’un sujet malade demande à un frère ou une soeur de lui faire don d’un rein. Cependant, pour un père ou une mère, l’opération est systématique et ne semble pas poser problème. «Généralement ce sont les femmes qui font le plus souvent don de leur rein à un fils ou à une fille malade. La situation n’est pas aussi facile entre frères et soeurs. Des compromis qui restent secrets dans la famille se font entre donneurs et receveurs d’une même famille.

Généralement, on n’aime pas dévoiler ces secrets devant un médecin. Les négociations se font dans les coulisses», déclare le Pr Attar. Le cas édifiant qui peut illustrer cette situation difficile pour les proches de faire don de leur organe est celui d’une jeune dont le frère était un insuffisant rénal, indique le chef de service, et qui avait besoin d’un greffe rénale pour survivre.

«Sa soeur avait donné son accord pour faire don de son rein. Toute la procédure a été effectuée pour que l’opération se déroule dans de bonnes conditions. Mais le jour de la greffe, la soeur s’est présentée devant son frère malade avec un document attestant qu’il est prêt à se désister de toute sa part d’héritage en contrepartie de ce don.

Le frère devait signer ce document avant d’entrer en bloc opératoire. Peiné et frustré, il refusa de signer et il mourra quelque mois après». «Aussi étonnant que cela puisse paraître, c’est la réalité à laquelle nous, en tant que médecin, sommes contraints d’y faire face», ajoute ce spécialiste. L’ampleur prise par le phénomène et la situation difficile que vivent les malades, incitent à étudier la problématique du don d’organes, en profondeur.

Le Pr Attar explique : «on est encore loin, et on n’est pas organisé pour mener un tel processus, actuellement. Le second obstacle réside dans notre culture qui n’est pas favorable à ce type de comportement. Il est difficile de convaincre un père qui vient de perdre son fils de faire don d’un des ses organes au moment d’une mort cérébrale. La réaction de ce père risque d’être violente».

Même si la loi existe et autorise le prélèvement d’organe sur cadavre, il n’existe pas encore l’environnement favorable pour une telle procédure. Un travail de sensibilisation doit se faire pour expliquer l’importance de la chose. Sur ce point, le Pr Attar qui est aussi membre du comité de l’éthique des Sciences médicales, souligne que «ce comité a revu les lois sur le don d’organes mais après 2 ou 3 réunions, il n’est plus fonctionnel».

Il déplore aussi l’inexistence de laboratoire qui doit faire le listing des receveurs potentiels et prendre en charge toutes les analyses pour assurer la compatibilité du donneur avec le receveur. Le président de la Société algérienne de néphrologie, dialyse et transplantation (SANDT), le Pr Tahar Rayane, avait indiqué dernièrement que 7.000 patients sont en attente d’être greffés, un nombre qui croît d’année en année, en raison du nombre limité de greffes effectuées chaque année.

L’Algérie accuse un déficit «flagrant» en nombre de transplantations rénales. Le même spécialiste avait affirmé que l’augmentation régulière du nombre de malades atteints de maladie rénale chronique est «très préoccupante», les estimations faisant état de 1,5 million d’Algériens atteints de cette maladie, au moment où le nombre de nouveaux cas d’insuffisance rénale chronique est estimé à 4.000 nouveaux cas par an.

Mokhtaria Bensaâd