Un mois après l’intervention militaire au Mali,La guerre est-elle finie ?

Un mois après l’intervention militaire au Mali,La guerre est-elle finie ?

Dans l’évolution de la crise du Mali, le bout du tunnel semble encore loin pour les soldats maliens appuyés par l’armée française. La première phase est bouclée, elle concernait la reprise des villes entre les mains des terroristes. Tout le monde pensait que l’essentiel était fait et la France souhaite même se retirer et laisser la Misma au premier rang comme prévu. Mais la réalité du terrain est tout autre et beaucoup reste à faire.

La tension est encore vive à Gao, dans le nord du Mali, où les militaires français ont déminé les ruines du commissariat et de ses alentours après un bombardement à l’aube pour éliminer les terroristes qui s’y étaient retranchés. Un mois jour pour jour après le début de l’intervention militaire française, «l’essentiel du territoire malien a été libéré, aucune ville n’est occupée par un groupe terroriste, aucun des réseaux ou groupes qui jusque-là mettaient en péril la vie des Maliens n’est capable de mener une véritable offensive», a assuré le président français François Hollande. «Nous devons poursuivre non plus la libération d’un territoire mais [sa] sécurisation», a-t-il expliqué, alors que Gao, la plus grande ville du nord du Mali, a été dimanche le théâtre de combats de rue entre soldats maliens et français et des combattants djihadistes qui y ont aussi commis les premiers attentats suicides de l’histoire du pays, marquant une nouvelle étape du conflit. Au moins deux terroristes et trois civils ont été tués dans les affrontements qui ont également fait 17 blessés, 15 civils et deux soldats maliens, selon plusieurs sources. Lundi en début d’après-midi, des soldats français ont déminé les ruines du commissariat, découvrant au total quatre mines enfouies dans la cour du bâtiment, ainsi qu’une roquette et deux grenades. Dans le même temps, le principal marché de la ville, qui se trouve à proximité du commissariat, a été évacué en début d’après-midi par des soldats français pour faciliter le travail des démineurs. «Nous sommes dans la crainte d’un attentat, c’est pour cela que pour des raisons de sécurité nous avons évacué le marché de Gao», avait affirmé un officier de l’armée ma-lienne. Le commissariat, ancien siège de la «police islamique» mise en place par le groupe islamiste du Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) lorsqu’il occupait la ville, a été bombardé lundi à l’aube par un hélicoptère de l’armée française, selon des témoins. Les combats à Gao, à 1 200 kilomètres de Bamako, sont le signe d’un regain d’activité des groupes armés qui avaient, dans un premier temps, fui les villes reprises par les soldats français et maliens fin janvier. Pour la première fois dans l’histoire du Mali, ils ont commis à Gao, en deux jours, deux attentats suicides contre un poste de contrôle de l’armée malienne à la sortie nord de la ville.

Le retrait de l’armée française au mois de mars est-il possible ?

Contrairement aux assurances du ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, les troupes française ne peuvent pas se retirer du Mali au moins pour deux raisons. L’instabilité qui demeure aussi bien au nord qu’au sud  du Mali et la tension qui se manifeste au sein de l’armée malienne. Les terroristes du Mujao qui contrôlaient Gao ont donc opté pour la guérilla. Les militaires appellent cette tactique une guerre asymétrique en milieu urbain, avec combats de rue, mines et attentats. Les militaires français disent s’être préparés à cette évolution. Face à cette menace en milieu urbain, les contingents français et africains soutiennent qu’ils veillent à ce que l’emploi de la force soit le plus maîtrisé possible, afin d’éviter les pertes civiles. Il faut tout surveiller. Une moto, un jeune avec un âne peuvent être dangereux. Le renseignement est donc crucial. Au sein de la Misma, l’expertise des uns et des autres est également sollicitée pour cette nouvelle phase de la guerre. Les soldats nigérians, par exemple, ont l’habitude d’affronter en milieu urbain des membres de la secte islamiste Boko Haram. Il est également prévu que des éléments du génie sénégalais soient déployés à Gao pour des missions de déminage. Si la France et la Misma pensaient que la menace se situait seulement au niveau des terroristes qu’elles combattent, une seconde a repris corps au Sud, précisément à Bamako. Au sein de l’armée malienne entre bérets rouges et verts. Une histoire de revanche ? L’affrontement qui a l’image de règlement de comptes prouve à suffisance que le mal qui gangrène l’armée ma-lienne aux yeux de la communauté internationale est plus grave qu’elle ne le prévoyait. La France n’a pas intérêt à se retirer si vite au mois de mars, car le chemin est encore long et sa présence a un apport capital aux côtés des forces de la Misma et l’armée malienne.

Casques bleus : le déploiement n’est pas pour demain

Le gouvernement malien «hésite toujours» à donner son feu vert pour une opération de maintien de la paix de l’ONU dans le pays quand la sécurité le permettra, a indiqué lundi un haut responsable de l’ONU. «Il semble y avoir une convergence de vues croissante sur la nécessité d’une (telle) opération» parmi les cinq membres permanents du Conseil de sécurité ainsi qu’au sein de la Cédéao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) et de l’Union africaine, a estimé le vice-secrétaire général de l’ONU, Jan Eliasson. Mais l’ONU «n’a pas encore reçu un feu vert clair de la part du gouvernement ma-lien (…) qui hésite toujours», a-t-il ajouté. Il a réaffirmé que des Casques bleus ne pourront être déployés que «quand la phase des combats aura pris fin» et qu’il y aura eu «une stabilisation de la situation». «Pour l’instant la situation militaire n’est pas claire, pas plus que la situation politique à Bamako», a-t-il résumé. Avant de déployer des Casques bleus au Mali, il faudra également une nouvelle résolution du Conseil de sécurité de l’ONU.

Par Mehdi Aït Mouloud

Washington débloque 50 millions de dollars d’aide militaire

Le président des Etats-Unis, Barack Obama, a donné l’ordre d’allouer 50 millions de dollars à une aide militaire d’urgence pour la France et le Tchad dans le cadre du conflit au Mali. «J’ai déterminé qu’il existait une situation d’urgence imprévue requérant une assistance militaire immédiate au Tchad et à la France dans leurs efforts en cours pour protéger le Mali des terroristes et des extrémistes violents», a affirmé Obama dans un mémorandum mentionnant la somme de 50 millions de dollars. Obama invoque ainsi une clause prévue par la loi américaine qui dispose qu’une rallonge du budget de la défense est possible pour aider un pays étranger en cas de situation d’urgence. Les Etats-Unis ont engagé depuis le 21 janvier des ressources de transport aérien pour aider la France dans son engagement militaire au Mali. Selon un responsable du Pentagone, à la date d’avant-hier, les avions-cargo C-17 américains avaient effectué 41 vols au profit de la France et du Tchad.  Washington fournit également, depuis le début de l’opération le 11 janvier, un soutien en matière de renseignement.

M. A. M.