Un imposant cortège a accompagné à sa dernière demeure vendredi après-midi près de Tizi Ouzou le virtuose auteur et compositeur Chérif Kheddam, décédé lundi dernier à Paris à l’âge de 85 ans.
Une foule nombreuse composée de citoyens anonymes, venus des différentes régions du pays, de proches et amis du défunt, d’artistes et de figures politiques et culturelles, ainsi que du wali de Tizi Ouzou et du secrétaire général de l’UGTA, a pris part à ces obsèques.
L’inhumation de la dépouille s’est déroulée au cimetière familial du village Ait Boumessaoud, dans la daïra d’Iferhounène, à une soixantaine de kms à l’est de Tizi Ouzou.
« Da Chérif » comme aimaient à l’appeler ses intimes repose désormais pour l’éternité sous un frêne, face aux cimes enneigées du Djurdjura, qui fut sa première source d’inspiration.
Malgré la consternation et la douleur qui se lisaient sur tous les visages, la levée du corps fut accompagné de youyous des femmes du village d’Ait Boumessaoud où naquit l’artiste un 1er janvier 1927, en signe de reconnaissance au disparu pour avoir sublimé la femme algérienne à qui il a dédié de nombreuses chansons, de véritables hymnes à la beauté.
Le village s’est avéré trop exigu pour contenir la marée humaine qui y déferla très tôt le matin. La présence était tellement dense, témoin de la grandeur de l’homme et artiste, qu’ils étaient nombreux à n’avoir pas pu se frayer un chemin pour rendre hommage au défunt, dont la dépouille était exposée au public dans une salle de la mosquée du village. Les véhicules, immatriculés dans différentes wilaya du pays, étaient stationnés sur deux files à plus de 5 kms du domicile mortuaire.
Le regretté Chérif Kheddam a chanté l’amour, la patrie, l’exil, l’espoir la douleur pour exprimer son vécu mais aussi celui de ses semblables.
Ses tubes Lamri (miroir), Sligh Yemma tnenad (ma mère disait…), et autres mélodies pathétiques retracent les conditions de vie pénibles des montagnards. Ces conditions qui l’ont d’ailleurs poussé à l’exil, dont l’amertume lui permit, paradoxalement, de rencontrer sa destinée d’artiste qui le propulsa au firmament de la création artistique, dont la grandeur n’a d’égale que son humilité et sa discrétion.
Les présents étaient unanimes à le souligner: certes, l’homme n’est plus de ce monde mais son nom restera gravé à jamais dans la mémoire collective nationale, grâce à son riche patrimoine lyrique légué à la postérité, outre d’avoir formé et aidé une génération d’artistes émérites, qui se chargeront de prolonger l’œuvre du maître disparu.
Comme l’a résumé l’écrivain Amine Zaoui, lors de ces obsèques sur les ondes de radio Tizi Ouzou, Cherif kheddam « restera, pour l’éternité, un symbole de l’authenticité qu’il a su mettre en parfaite symbiose avec la modernité, en s’ouvrant sur l’universalité ».