Des affrontements ont encore une fois ébranlé la vallée du M’zab dans la nuit de samedi. Concentrées dans le quartier Kourty, où cohabitent les deux communautés mozabite et arabe, ces échauffourées ont duré toute la nuit malgré le déploiement rapide des forces de l’ordre. L’origine des émeutes : une simple provocation dont a été victime un jeune Mozabite qui se déplaçait à bord de sa moto, un moyen de transport très prisé dans la région.
Le garçon a été attaqué par jet de pierres dont on ignore encore la provenance. Mais le mal était déjà fait. Cet incident a suffi pour créer une atmosphère d’instabilité et d’insécurité. Les Mozabites, aussitôt avertis, se sont vite regroupés et idem pour le camp d’en face. Les appels à la vengeance ont envenimé la situation. Même si aucun blessé n’a été enregistré, les prémices d’une nouvelle tension sont perceptibles. Les provocations des Arabes en direction des Mozabites sont devenues récurrentes. Mercredi, un incident similaire a failli provoquer des émeutes dans le quartier Chaâba en Nichane.
Au cours de la semaine dernière, des jets de pierres contre plusieurs bus appartenant à des Mozabites ont été signalés. Selon des témoignages, les auteurs sont des personnes encagoulées qui se tiennent au bord de la route. Les chauffeurs sont désormais obligés de changer leur itinéraire pour éviter ces agressions. Les Mozabites refusent toutefois, selon des sources sécuritaires, de porter plainte, «accusant les policiers de prendre position avec les Arabes».
Bakir, père de famille habitant le quartier Chaâba en Nichane, affirme que la majorité des plaintes sont jetées aux oubliettes. «J’ai reçu des menaces me sommant de quitter mon habitation. J’ai tout de suite porté plainte, mais sans aucune suite. J’étais obligé de déplacer ma famille par mesure de sécurité. Je reviens quinze jours après, ma maison est incendiée. Voilà le résultat». Dans la même localité, le siège de l’association d’aide aux orphelins de Ghardaïa a été pillé et saccagé.
Daddi Baba, président de cette association qui prend en charge plus de 300 orphelins, refuse de faire l’amalgame entre les deux communautés, mais dénonce cependant l’acte de vandalisme. Il appelle les autorités locales et sécuritaires à prendre des mesures rigoureuses afin d’identifier ces malfaiteurs et les traduire en justice.
A rappeler que la cellule de crise et de suivi (CCS) mise en place au lendemain des violences, dénombre 700 habitations et locaux incendiés, dont 450 dans la commune de Ghardaïa et 130 dans le quartier de Mermed. Khodir Barbaz, de la même cellule, estime que «les fauteurs de troubles sont des personnes étrangères à la région». Ils sont arrivés à la veille des violents évènements pour semer la discorde en s’appuyant sur les rivalités existantes entre les deux communautés.
Dans les quartiers chauds, le calme semble revenu, mais la vigilance est de mise chez les Mozabites. De jeunes Mozabites s’engagent à assurer la garde dans leurs quartiers, malgré le déploiement des forces de l’ordre. La garde est une pratique séculaire au M’zab.
De notre envoyée spéciale : Samira Azzegag