À moins d’un an de l’élection présidentielle française, l’immigration continue de figurer au rang des priorités de la droite plus que jamais bousculée par l’héritière de Jean-Marie Le Pen.
La nationalité, un de ses thèmes favoris, vient de faire son entrée dans les préoccupations de l’UMP, le parti au pouvoir. Pays d’accueil et d’intégration comme se vante de le rappeler souvent ce même parti, la France compte des millions de citoyens détenant une autre nationalité. Les Maghrébins, les Algériens à leur tête, forment la première communauté de binationaux. Alors que la gauche milite pour donner des droits politiques aux immigrés résidents, comme le vote aux élections locales, la droite veut les en dessaisir. Le député UMP, Claude Goasguen, rapporteur de la mission d’information parlementaire sur le droit de la nationalité, estime qu’il faut limiter la binationalité ou en tout cas les droits politiques des binationaux, dans un entretien paru lundi dans La Croix. “Il est certes impossible, comme le suggèrent certains extrémistes, de supprimer la binationalité, mais il faut la limiter”, déclare le député-maire du XVIe arrondissement de Paris, alors que la mission dont il est le rapporteur doit achever ses travaux d’ici à la fin mai après une ultime réunion.
“Je souhaite que l’on commence par enregistrer les situations de double nationalité au moment des actes de mariage, de naissance ou de naturalisation. On disposerait ainsi à terme d’un registre des binationaux”, poursuit-il. “En France, aujourd’hui, on ne sait pas combien ils sont, sans doute 4 à 5 millions. Je souhaite aussi qu’on aille progressivement vers une limitation de la double nationalité par le biais de discussions bilatérales avec les pays”, souligne-t-il. Interrogé sur les conséquences concrètes pour les gens concernés, Claude Goasguen répond : “Cela veut dire qu’on demanderait aux gens de choisir entre deux nationalités. Ou bien qu’on aille vers une limitation des droits politiques. Car il est tout de même gênant qu’une personne puisse voter en France et dans un autre État. En procédant ainsi, un binational se retrouverait en quelque sorte avec une nationalité et demie.” Avant Claude Goasguen, l’ancien ministre de l’Immigration, Éric Besson, avait tenté de promouvoir le concept de “hiérarchie des appartenances”, faisant que l’appartenance à la France relègue en arrière-plan l’autre. Son idée a fait long feu. Selon l’historien de l’immigration, Patrick Weil, la double nationalité “est le produit direct d’un phénomène qui s’est développé surtout dans la deuxième partie du XXe siècle : l’égalité hommes-femmes. Auparavant, la femme perdait sa nationalité lorsqu’elle épousait un homme d’une autre nationalité : maintenant elle la conserve et ses enfants récupèrent à la fois la nationalité de la mère et du père. La France, elle, a toujours accepté la double nationalité, comme le Royaume-Uni. Après la Première Guerre mondiale, lors de la réintégration de l’Alsace-Moselle dans la République française, certains Allemands installés dans la région voulaient devenir Français tout en gardant aussi leur nationalité d’origine. Cela n’a posé aucun problème. Cela marquait notre confiance en nous-mêmes”, a-t-il rappelé à l’occasion de l’affaire des quotas dans le football. Par exemple, un Franco-Algérien, résidant en France, ne peut pas se réclamer juridiquement de la nationalité algérienne quand il est en France. C’est une pleine nationalité française qui lui donne les mêmes droits que tout autre Français. L’acquisition de la nationalité française, relativement facile, se fait par le droit du sang (un parent français), le droit du sol (naissance ou résidence sur le territoire français) ou par le mariage. Certains étrangers la possèdent sans même le savoir. D’autres l’ont acquise sans même parler la langue du pays. Sur les 30 000 jeunes étrangers qui acquièrent, chaque année, la nationalité en vertu du droit du sol, 27 000 en font la demande, entre 13 et 16 ans, mais 3 000 l’acquièrent automatiquement et ne l’apprennent souvent que plus tard. Sous quelques conditions, un étranger peut acquérir la nationalité française après cinq ans de résidence en France.
C’est une règle générale qui admet des dérogations. Les Algériens nés avant le 1er janvier 1963 peuvent ainsi demander la réintégration sans attendre cette durée de cinq ans.