Des associations anticolonialistes, des syndicats
et des partis politiques ont contesté l’inauguration dimanche à Perpignan (Sud de la France) d’un centre de documentation dédié aux Français d’Algérie, estimant que cette initiative n’est qu’un « rond de jambe de plus » de l’UMP à destination de l’extrême droite, à quelques semaines de l’élection présidentielle.
Regroupé dans un Collectif « Pour une histoire franco-algérienne non falsifiée », ils dénoncent une initiative « révisionniste » visant à réhabiliter les nostalgiques de l’Algérie française et à promouvoir l’action de fervents militants de la « reconnaissance de l’action positive des Français d’Algérie ». Selon Josiane Boucher, militante anticolonialiste native d’Alger, ce centre a été confié à la seule gestion des nostalgiques de l’Algérie française, avec une collection de documents à la « gloire de la colonisation ». Le Collectif dont elle fait partie proteste contre le fait que ce centre, inauguré dimanche par le ministre de la Défense, Gérard Longuet, soit entièrement géré par ces nostalgiques et réclame que les « massacres et méfaits » commis par 130 ans de colonialisme français soient « reconnus comme des crimes d’Etat », a-t-elle indiqué lundi à l’APS.
Pour elle, l’inauguration de ce centre, à l’occasion du cinquantenaire de l’indépendance algérienne « gagnée sur l’impérialisme français », est « partie intégrante de toute une campagne orchestrée par la droite et l’extrême droite françaises pour réhabiliter le colonialisme français ». « C’est une tentative de réhabilitation qui alimente la xénophobie et le racisme qui balaient aujourd’hui notre pays », a soutenu Mme Boucher.
Le groupe socialiste accuse directement l’UMP, représentée par le ministre de la Défense qui a procédé à l’inauguration dimanche du centre, de « draguer » l’extrême droite, dont la présidente, Marine Le Pen, était présente ce jour-là à Perpignan pour animer un meeting : « Ici, l’UMP a besoin, pour gagner, d’intégrer les voix les plus extrêmes », a estimé Jacqueline Amiel-Donat, chef de file socialiste de l’opposition perpignanaise. Ce centre est, selon elle, une faveur supplémentaire faite aux nostalgiques de l’Algérie française, après la stèle dédiée aux anciens de l’Organisation armée secrète (Oas). « L’apologie du colonialisme que fait Perpignan avec sa direction municipale remonte à loin », soutient Henri Pouillot, ancien appelé à la Villa Susini (un des centres de torture algérois, sous l’occupation) et auteur de témoignages les tortures dans ce centre, rappelant qu’en mai 1986 déjà, lorsque Paul Alduy, ancien maire UMP de Perpignan, inaugurait le musée du Mémorial de Sidi Ferruch à Port-Vendres, il saluait l’action de « l’armée française qui avait apporté à la terre d’Algérie, les bienfaits du génie de la France ».
Les membres du Collectif « Pour une histoire franco-algérienne non falsifiée » affirment ne pas remettre en cause la création d’un centre d’information, à condition qu’il porte sur l’histoire franco-algérienne, que ce soit un lieu de mémoire partagée et qu’il soit piloté par un comité scientifique constitué d’historiens. « Mais confier ce centre de documentation au seul Cercle algérianiste, c’est scandaleux. Car cela représente une subvention de 1,8 M d’euros au bénéfice
d’une association! », s’indignent-ils, proposant de faire appel à des historiens avec l’objectif de restituer ces 132 années de colonialisme français (en Algérie) dans toutes ses facettes, et partant, faire prendre conscience au public le plus large des « responsabilités historiques écrasantes » de la France coloniale en Algérie.