UMA et les relations bilatérales avec la Tunisie,Les réserves d’Alger

UMA et les relations bilatérales avec la Tunisie,Les réserves d’Alger

Une vue de Tunis

L’ouverture aux Algériens du marché du travail tunisien et l’annonce de la tenue d’un sommet de l’UMA posent problème.

Le match Marzouki-Djebali risque de compromettre le prochain sommet de l’UMA prévu à Tunis en octobre prochain. Ce n’est qu’un épisode dans le long feuilleton d’instabilité politique qui caractérise la Tunisie et qui ne manque pas d’avoir des conséquences aussi bien dans ses relations avec ses voisins que sur l’organisation régionale qu’est l’UMA.

Les retombées des décisions du gouvernement tunisien sur ses liens avec l’Algérie sont visibles à travers les règles de circulation et de séjour. Depuis quelques semaines, les autorités tunisiennes, à leur tête le président de la République, Moncef Marzouki, élu par l’Assemblée constituante, ont pris la décision d’ouvrir le marché du travail tunisien aux Algériens. Après la visite de Moncef Marzouki en Algérie, les Tunisiens sont allés aussi vite que cela suscite beaucoup d’interrogations. Les ressortissants algériens pourront obtenir à partir du 1er juillet une carte de séjour en Tunisie sur présentation d’un contrat de travail délivré par une société installée sur le sol tunisien. La partie algérienne a été informée de cette décision d’ouverture du marché tunisien à la main-d’oeuvre algérienne sans négociations préalables.

Or, l’Algérie ne compte pas pour l’instant appliquer le principe de réciprocité. Elle craint surtout que des personnes malintentionnées ne déferlent sur le pays dans un contexte sécuritaire qui n’est pas stabilisé: les terroristes redoublent de férocité dans la région.

Si l’initiative tunisienne vise à préparer un climat favorable à la tenue du prochain sommet de l’UMA, là aussi les choses ont peu de chances de suivre le cours tracé. Ce rendez-vous intervient dans un contexte de crise politique entre le gouvernement et la présidence après l’extradition de l’ex Premier ministre libyen, Al-Baghdadi Al Mahmoudi.

Le chef du gouvernement Hamadi Djebali est passé outre la décision du président. A ce propos, certaines sources affirment que la main du Qatar n’est pas étrangère à ce comportement de Hamadi Djebali.

Le ministre qatari des Affaires étrangères, Cheikh Hamad bin Jassem bin Jaber Al Thani, aurait exercé des pressions sur la Tunisie pour extrader le Libyen qui détient des informations sur le financement de la campagne électorale de Sarkozy en France il y a cinq ans. Ce stratagème est un bon moyen de faire taire les témoins gênants.

Alors que les conditions d’un procès équitable en Libye ne sont pas réunies. Marzouki est-il la victime collatérale dans la quête du Qatar de s’imposer en tant que leader dans la région arabe? Cette immixtion dans les affaires intérieures d’un pays souverain risque de compromettre ses relations avec les voisins. Voire de conduire à l’implosion de la coalition au pouvoir en Tunisie. Chaque jour qui passe révèle un nouvel épisode dans la rivalité entre Marzouki et Hamadi Djebali. Dans ce cas, il est urgent de clarifier les prérogatives de chacun des deux détenteurs du pouvoir exécutif.

La cacophonie ne devrait pas être de mise lors de réunions régionales. Avec qui Alger devrait-elle négocier lors du sommet de l’UMA? Avec Djebali ou avec Marzouki?

Qui prendra des engagements au nom de la Tunisie? A Alger, on continue de s’interroger sur cette donne qui vient perturber le calendrier des rencontres officielles.

D’ailleurs, ce n’est pas que chez nous que cette dichotomie au sommet de l’Etat tunisien inquiète. Au Maroc, ce sont les mêmes inquiétudes qui sont soulevées. Et il n’est pas sûr que le sommet de l’UMA aura lieu à la date prévue.

Malgré des réserves sur nombre d’initiatives lancées par Tunis, l’Algérie s’engage à poursuivre sa coopération, notamment sur les dossiers économiques afin d’aider son voisin à faire face à la crise qu’il traverse depuis la chute du président Ben Ali.

D’après nos informations, cette disponibilité est une belle manière de rendre la pareille à un pays qui a toujours été du côté de l’Algérie dans les heures les plus sombres de son histoire. C’était le cas lorsque la Tunisie a accueilli les réfugiés algériens lors de la guerre de Libération et lorsqu’elle a laissé ses frontières ouvertes lors de la tragédie nationale alors qu’elle subissait des pressions de toutes parts pour agir autrement.