La Russie a précédemment demandé aux pays occidentaux et du Moyen-Orient de «ne pas chercher de prétexte» pour une intervention militaire en Syrie. La Turquie semble en trouver un.
Est-ce le début d’une guerre entre les deux pays voisins ? En tout cas, la Turquie a poursuivi ce jeudi ses bombardements sur la Syrie en riposte aux tirs venus du territoire syrien sur le village frontalier d’Akçakale.
Au lendemain des premières salves de représailles qui ont frappé les environs du poste frontière syrien de Tall al-Abyad, juste en face d’Akçakale, l’armée d’Ankara a repris au petit matin ses tirs d’artillerie vers le territoire syrien, a indiqué à l’AFP une source sécuritaire turque. «Des tirs d’artillerie ont repris à 03h 00 GMT ce matin (jeudi)», a précisé cette source sous couvert d’anonymat. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), les bombardements militaires turques, qui ont notamment visé une position de l’armée syrienne dans la région de Rasm al-Ghazal, près de Tall al-Abyad, a tué «plusieurs soldats syriens». Auparavant, contacté par l’AFP via l’internet, un rebelle syrien s’identifiant seulement comme Wael a déclaré que «des chars syriens dans la province de Raqa», frontalière de la province turque de Sanliourfa où se trouve le village touché d’Akçakale, «ont tiré sur le poste frontière de Tall al-Abyad». Les tirs turcs se sont poursuivis mercredi durant toute la soirée vers le territoire syrien. Plusieurs soldats syriens ont été tués dans la nuit de mercredi à jeudi. «La Turquie ne cherche pas à faire la guerre mais elle est parfaitement capable de se défendre contre toute attaque menaçant sa souveraineté», a lancé à la presse, en marge des débats, l’un des vice-présidents du Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir, Ömer Celik. Dès hier soir, le chef du gouvernement turc a fait part de sa détermination à riposter après le bombardement, qui, selon un dernier bilan, a tué cinq personnes et fait une dizaine de blessés à Akçakale, récent théâtre de combats entre les troupes fidèles au régime du président Assad et les rebelles de l’Armée syrienne libre (ASL). «La Turquie ne laissera jamais impunies de telles provocations du régime syrien, qui menacent notre sécurité nationale, dans le respect du droit international et de ses règles d’intervention», a tonné M. Erdogan, à l’issue d’une réunion d’urgence avec ses conseillers. Et c’est là l’incident le plus grave depuis la destruction d’un avion turc par la défense anti-aérienne syrienne en juin dernier et qui a été fermement condamné par l’OTAN et les Etats-Unis, qui ont affiché leur solidarité avec Ankara, pays membre de l’Alliance atlantique.
Pour Ankara, il n’y a aucun doute, les tirs venus du territoire syrien ne peuvent être que de l’armée de Bachar al Assad. Qui donne autant de certitudes à la Turquie ? Et si c’était un scénario monté de toutes pièces par un Occident impatient d’un désordre avec le régime de Damas qui a jusqu’ici résisté à toutes les tentatives de déstabilisation ? Une entrée en guerre avec la Turquie amènerait l’OTAN à la soutenir et la boucle est bouclée. Voilà pourquoi la mise en garde de Moscou aux pays occidentaux prend toute sa signification et son importance.
R. I. / Agences
Le Parlement turc en conclave
Le Parlement turc s’est réuni d’urgence à huis clos jeudi pour autoriser formellement l’armée à conduire des opérations sur le territoire syrien. Les députés turcs doivent débattre d’un texte proposé par le gouvernement islamo-conservateur qui stipule que, «si nécessaire», il sera mandaté pour ordonner des opérations armées en Syrie car «les activités hostiles visant le territoire turc sont sur le point de devenir une attaque militaire (…) et de ce fait sont de caractère à menacer notre sécurité nationale». Cette autorisation parlementaire est valable un an. La Constitution turque prévoit que toute opération militaire extérieure doit être autorisée au préalable par le Parlement. Le texte devrait être voté sans surprise. Par ailleurs, la Turquie a saisi hier mercredi le Conseil de sécurité de cet incident frontalier avec la Syrie.
Enquête sur l’origine du tir à la frontière turque
La Syrie a ouvert une enquête sur l’origine d’un tir d’obus transfrontalier qui a fait cinq morts en territoire turc, a annoncé hier mercredi, le ministre syrien de l’Information, dans un communiqué cité par la télévision officielle syrienne. «Les parties concernées étudient actuellement l’origine du tir contre la Turquie», a déclaré Omran Zoabi. «La Syrie présente ses sincères condoléances aux familles des victimes et à nos amis, le peuple turc», a-t-il dit. «La frontière turco-syrienne est longue, et la Syrie demande une coopération pour le contrôle de la frontière», a déclaré le ministre syrien de l’Information. M. Zoabi a réitéré les déclarations de Damas selon lesquelles la Syrie combat «des terroristes» soutenus par l’étranger. «Il y a des groupes étrangers qui constituent un danger non seulement pour la sécurité nationale syrienne, mais aussi pour la sécurité régionale», a déclaré le ministre syrien.
L’attentat d’Alep revendiqué
Un groupe jihadiste, le Front al-Nosra, a revendiqué les attentats à la voiture piégée qui ont fait mercredi au moins 48 morts dans le centre d’Alep, deuxième ville de Syrie, selon le centre américain de surveillance des sites islamistes SITE. Dans un communiqué posté sur des sites jihadistes, Al-Nosra affirme avoir «touché quatre cibles utilisées par les forces du régime, dont un club des officiers et l’hôtel Al-Amir». Le communiqué est accompagné de photos des immeubles endommagés par les explosions et des auteurs des attentats. Selon Al-Nosra, l’attaque contre le club des officiers a été menée à 07H45 (04H35 GMT) par Abou Hamza al-Shami qui a transformé le bâtiment «en décombres», explique Al-Nosra. Deux minutes plus tard, Abou Suleiman al-Shami a fait sauter l’hôtel touristique. Al-Nosra avait revendiqué la plupart des attentats dans le pays et récemment le double attentat contre le siège de l’état-major syrien à Damas.